Critique

[Critique ciné] Blaze, vibrant hommage à une légende oubliée

Nicolas Clément
Nicolas Clément Journaliste cinéma

DRAME/ BIOPIC | Généreux et inspiré, l’acteur Ethan Hawke rend un vibrant hommage à Blaze Foley, légende oubliée de la musique country folk américaine.

Cette précision, d’abord: Blaze, le troisième long métrage de fiction réalisé par l’acteur de Dead Poets Society, Before Sunrise et Gattaca, était censé connaître une sortie nationale ce 6 mars. Mais, en dépit d’une presse excellente et d’une large campagne promo, les résultats catastrophiques du film aux Pays-Bas en auront décidé autrement. Seul un cinéma bruxellois a malgré tout décidé de parier sur Blaze. Il faudra donc se rendre à l’Aventure, dans la Galerie du centre, pour découvrir ce très bon biopic consacré à une légende oubliée de la country folk US.

On connaît l’amour d’Ethan Hawke pour la musique. Lui-même guitariste et chanteur à ses heures, il a été réalisateur de clip pour Lisa Loeb (le tube Stay), a participé à la BO de plusieurs films où il faisait l’acteur -de Reality Bites (1994) à Boyhood (2014)- et a même interprété Chet Baker dans Born to Be Blue (2015), biopic très libre où il donnait d’ailleurs également de la voix. Ses deux précédents longs métrages de fiction en tant que cinéaste (Chelsea Walls en 2001 et The Hottest State en 2006) tournaient, en outre, déjà plus ou moins ouvertement autour du sujet. Sans même parler du docu Seymour: An Introduction, en 2014, consacré à Seymour Bernstein, pianiste classique virtuose reconverti par choix dans l’éducation.

[Critique ciné] Blaze, vibrant hommage à une légende oubliée

Humeur vagabonde

Né en Arkansas en 1949, Michael David Fuller, alias « Blaze » (« le feu », « la flambée », « l’incendie ») Foley s’épanouit au sein d’une petite communauté d’artistes où il rencontre Sybil Rosen, avec laquelle il vivra des moments de bonheur pur entre quelques planches de bois accrochées dans un arbre. La suite, au fond, n’est que paradis perdu et vicissitudes de la ville: ravagé par l’alcool et ses excès, psychologiquement éteint, Foley bute sur la cruauté du monde et l’ignorance crasse de ceux à qui il adresse son art ouvragé et fragile. En proie à l’autodestruction et rongé par un besoin d’argent qui pourrit tout, ce perdant magnifique, armoire à glace boiteuse et hobo dans l’âme, disparaît tragiquement dans l’anonymat à la fin des années 80, alors qu’il n’est pas même âgé de 40 ans.

À Rosen, dont le livre Living in the Woods in a Tree a largement inspiré le film de Hawke, qu’elle coécrit par ailleurs, il avait dit un jour: « Je ne veux pas être une star, je veux être une légende. » Blaze, aujourd’hui, y contribue amplement. Construit autour d’une interview de l’ami Townes Van Zandt et de l’ultime concert donné par Foley, le film partage avec son antihéros rebelle et provocateur, renégat folk au destin fracassé sur un mur d’indifférence, un vrai plaisir du storytelling. Loin de la tentation facile d’un cinéma décoratif, pittoresque, Blaze évite le fantasme hagiographique comme le misérabilisme crapoteux, entremêlant les époques dans un montage organique qui impressionne. Armé d’une caméra particulièrement mobile, Hawke a l’excellente idée de confier les rôles de Foley et Van Zandt à deux véritables musiciens -les incroyables Ben Dickey, songwriter folk, et Charlie Sexton, compagnon de route de Bob Dylan. Voire, mieux, de faire appel à Kris Kristofferson le temps d’une bouleversante apparition. Les légendes sont éternelles.

D’Ethan Hawke. Avec Ben Dickey, Alia Shawkat, Charlie Sexton. 2h07. Sortie: 06/03. ***(*)

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