Cet été, la Belgique parle d’elle au Musée d’Ixelles

Veronique Boissacq, Lost Identities (2012), au Musée d'Ixelles © Veronique Boissacq
Sophie Deprez Stagiaire

En plus des expositions permanentes, le Musée d’Ixelles offre une rafraichissante échappée belle pour explorer cet été les PAYSAGES de Belgique, le passage De l’ombre à la lumière du peintre Henri-Victor Wolvens et les Équations de Véronique Boissacq.

Il suffit de passer la porte du Musée d’Ixelles pour se laisser emmener dans une balade artistique hors des sentiers battus. En plus de ses expositions permanentes, le musée propose trois expositions inédites, véritables bouffées d’oxygène pour respirer l’art belge autrement. Les PAYSAGES de Belgique revisitent les contrées belges dans l’art depuis l’origine du pays. De l’ombre à la lumière consacre une salle entière à l’oeuvre de Henri-Victor Wolvens dans toute sa révélation lumineuse et, tout au bout du musée, Véronique Boissacq dénonce l’aspect dénaturé d’une société obsédée de trouver les inconnues des Équations.

Les six faces des Paysages de Belgique

Le musée d’Ixelles balade ses visiteurs au fil d’une sélection de peintures, gravures, photographies, vidéos et installations, pour un voyage thématique sur le paysage belge à travers l’art. Rassemblant plus de 70 artistes et organisée autour de six thèmes clefs, cette exposition marque un arrêt sur les moments forts de l’art belge.

Pol Bury, Vieillesse du cuivre (1944)
Pol Bury, Vieillesse du cuivre (1944)© Raymond Saublains

Dans la section Paysages intérieurs, territoires imaginaires, la réalité se métamorphose pour devenir trouble, onirique, étrangement inquiétante. « C’est une section qui envisage le réalisme magique. Partir de la réalité et la transformer, décaler l’angle de vue que l’on a sur le réel de façon à y intégrer une part de mystère, à rendre ce réel en partie flou, fantomatique, irréel. C’est très symboliste et surréaliste. » explique Denis Laoureux, commissaire de l’exposition.

Maximillien Luce, Terril de charbonnage (1896)
Maximillien Luce, Terril de charbonnage (1896)© Mixed Media

Du côté des Paysages industriels, il explique que le choix des oeuvres exposées s’est fait naturellement pour représenter les différentes phases qu’a traversées la représentation de l’industrie belge dans l’art au cours des décennies. « La première phase a commencé pendant la première moitié du XIXe. À ce moment, les gens trouvaient que la Belgique était un pays formidable, comptant des richesses extraordinaires et qu’il fallait exploiter. Sans parti pris, sans jugement, on montre comment la Belgique est à ce moment-là dans le top trois des puissances mondiales avec un équipement à la pointe. »

Vers 1880 apparaissent les premières remises en question. En images, les artistes belges commencent à dénoncer la pénibilité du travail et la transformation lourde du paysage par l’industrie.

Le commissaire de l’exposition poursuit. « Dans les années 1960, le changement dans l’économie du sud du pays force les charbonnages à fermer les uns après les autres et les artistes à rendre compte de l’état de déliquescence de l’économie fondée sur l’industrie lourde. »

La dernière phase se passe maintenant. Trois oeuvres, trois artistes, se réapproprient poétiquement le paysage industriel autour de questions sur l’avenir des vestiges de cet univers industriel.

Omer Ozcetin, Quelque part (2004)
Omer Ozcetin, Quelque part (2004)© Luc Schrobiltgen

« L’idée, c’est de revenir sur les paysages industriels de manière très poétique et de se poser la question de la mémoire. Qu’est-ce qu’on fait avec les charbonnages qui ont fermé? Qu’est-ce qu’on fait avec les équipements industriels? Est-ce qu’on les démonte? Est-ce qu’on les garde? Est-ce qu’on en fait des musées? », demande le commissaire de l’exposition sans apporter de réponse, évidemment.

L’expo Paysages de Belgique présente quatre autres sections: Les paysages de la nation, Nocturnes et effets de lune, Nuages et Paysage et abstraction.

Les explosions chromatiques de Wolvens

Henri-Victor Wolvens, Plage dorée (1962)
Henri-Victor Wolvens, Plage dorée (1962)© Luc Schrobiltgen

Plus loin, le Musée d’Ixelles consacre une pièce entière au passage de Henri-Victor Wolvens De l’ombre à la lumière. Wolvens n’a pas peur du banal. Pire, il affectionne les sujets ingrats, les plus quotidiens, les plus pauvres et décèle un certain tragique dans l’ordinaire et le « petit bourgeois ». « C’est tendre et c’est fort, c’est délicieux et c’est grand » écrivait Paul Fierens à l’égard du maitre en 1945. Ces mots sont inscrits sur les murs entourant les peintures, d’abord sombres à ses débuts bruxellois, puis consacrées aux variations de lumière, de couleurs et de matières que la Mer du Nord a inspirées à Wolvens.

Véronique Boissacq dénonce l’inconnue mais aussi l’équation

Veronique Boissacq,Twisted communication (2004)
Veronique Boissacq,Twisted communication (2004)© Veronique Boissacq

Avec Équations, la photographe plasticienne belge Véronique Boissacq dénonce une société à la dérive, cachée derrière une beauté superficielle. « L’équation de la vie ne se trouve pas dans Internet ni notre surcommunication. Elle se retrouve dans le réel, dans la vie. On ne sait même plus ce que ça veut dire, la vie, tellement on est sous cloche, sous boite. »

Pour autant, l’expo, n’est pas là pour désacraliser ce qui chagrine Véronique Boissacq dans la société actuelle; elle est là pour sacraliser ce qui lui fait du bien. « Là-bas, la dernière photo symbolise la reprise de la nature sur des choses beaucoup trop technocratiques. »

La voilà, la note d’optimisme: dans une serre abandonnée, la nature reprend ses droits. « Il faudrait laisser la nature reprendre le dessus des serres », conclut l’artiste qui travaille en argentique et au Mamyia 6 x 6 pour prendre son temps avant chaque prise de vue et pouvoir parler avec ses modèles. « Au lieu de mitrailler n’importe comment en prenant mille photos et en espérant qu’il y en ait une qui soit bonne. Comme à la guerre. »

Le Musée d’Ixelles propose ses expos d’été jusqu’au 20 septembre, en plus des expositions permanentes. Les portes sont ouvertes du mardi au dimanche (sauf jours fériés), de 9h30 à 17h00.

Plus d’infos sur http://www.museedixelles.irisnet.be/

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