Critique

À la télé ce samedi soir: Otis, the King of Soul

Otis Redding, 1967. © DR
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Partant de sa fin tragique, le documentaire de Stefan Morawietz revient sur la carrière fulgurante et fugace d’Otis Redding.

10 décembre 1967. Aéroport de Cleveland. Par un froid glaçant, Otis Redding et ses Bar-Kays embarquent dans un vieux coucou de six places que la star encore naissante du rhythm’n’blues s’est offert pour faciliter ses déplacements. Quelques heures plus tard, l’appareil rate la piste d’atterrissage de Madison de cinq kilomètres et échoue tête la première dans le lac gelé de Monona. A seulement 26 ans (aucun de ses musicos n’a encore fêté son 20e anniversaire), Mr Pitiful comme on le surnomme à cause du titre d’une de ses chansons et de son timbre mélancolique s’en va rejoindre son idole Sam Cooke au paradis de la soul.

Le festival de Monterey vient d’élargir son public au-delà des États du sud et Redding a mis l’Europe à ses pieds pour sa première tournée sur le Vieux Continent. Mais (Sittin’ On) The Dock of the Bay, son seul titre qui se hissera en tête des hit parades pour devenir la septième chanson la plus diffusée de tous les temps, n’a été enregistrée que trois jours avant l’accident.

Partant de sa fin tragique, le documentaire de Stefan Morawietz revient sur la carrière fulgurante et fugace de ce grand garçon un peu gauche de Géorgie. Né le 9 septembre 1941 à Dawson, fils de pasteur, Otis Redding fréquente à la fois l’église et les clubs de blues. Il rêve de devenir le nouveau Little Richard mais doit dans un premier temps se contenter des télécrochets et du statut de musicien et de chauffeur pour Johnny Jenkins, guitariste survolté de la scène locale qui joue de la guitare à l’envers et influencera grandement Jimi Hendrix.

Alors qu’ils enregistrent à Memphis, Redding fait pression pour ajouter un morceau de dernière minute à la session. Interprétée par ses propres soins, These Arms of Mine, ballade plaintive dont il fera l’une de ses spécialités, bluffe les responsables d’Atlantic et lance la carrière d’un performer électrisant. Une étoile, malheureusement filante, est née. Etayé par des images d’archive, des photos, des interviews de sa veuve, du copropriétaire de l’écurie Stax, Al Bell, dont il incarnera le son dur et brut comme Sam and Dave, Rufus Thomas et Eddie Floyd, du trompettiste des Mar-Keys Wayne Jackson, ou encore de Charles Bradley, Otis, the King of Soul raconte aussi l’industrie de l’époque et la ségrégation.

« Otis avait une larme dans la voix. Et cette larme inondait le coeur des femmes. Il n’avait pas besoin de coucher avec elles. Il leur procurait du plaisir avec ses chansons et sa musique. » Soul Giant.

  • DOCUMENTAIRE DE STEFAN MORAWIETZ.
  • Ce samedi 7 février à 22h20 sur Arte.

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