Critique

[A la télé ce mardi soir] Natan

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Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Oublié de l’Histoire, Bernard Natan a pendant l’entre-deux-guerres changé le cours du cinéma. Son portrait, que dressent ici David Cairns et Paul Duane, c’est celui d’un Juif roumain né en 1886, qui débarque à Paris en 1905 rêvant par-dessus tout de travailler dans le monde merveilleux du septième art.

Oublié de l’Histoire, Bernard Natan a pendant l’entre-deux-guerres changé le cours du cinéma. Son portrait, que dressent ici David Cairns et Paul Duane, c’est celui d’un Juif roumain né en 1886, qui débarque à Paris en 1905 rêvant par-dessus tout de travailler dans le monde merveilleux du septième art. Fils de commerçants, mais sans argent ni relations, Natan commence comme chimiste chez Pathé (dont il est selon la légende renvoyé), puis comme projectionniste à Ménilmontant. Mais en Europe en général, et en France en particulier, la Première Guerre mondiale anéantit le secteur et son économie. Les films disparaissent. Les acteurs aussi. Pendant l’entre-deux-guerres, Natan est l’un des rares entrepreneurs à reconstruire l’industrie du cinéma français. Il devient propriétaire de Pathé, bâtit des studios (qui accueillent aujourd’hui une école de cinéma: la Fémis), ouvre une cinquantaine de salles aux quatre coins du pays et produit soixante films, notamment de Maurice et Jacques Tourneur, Marcel L’Herbier et René Clair.

Les origines juives de Natan précipiteront sa chute. Victime d’une cabale antisémite, il sera incarcéré pour fraude en 1938 et envoyé en camp dès sa sortie de prison. Raconté à la première personne, mais aussi à travers la voix de ses petites-filles et d’historiens, cet homme visionnaire qui a apporté le son aux films français, qui fut à l’origine des premiers spots publicitaires et des premières actualités et qui a préfiguré les bonus DVD plus d’un demi-siècle avant leur invention fut victime de ce que certains qualifient d’affaire Dreyfus du cinéma. L’incroyable destin d’un mec accusé de pornographie qui envoyait des chèques à Méliès quand ce dernier n’était plus rien.

DOCUMENTAIRE DE DAVID CAIRNS ET PAUL DUANE. MARDI 22.20 sur ARTE

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