À la télé cette semaine: Foxcatcher, Le Fantastique Bill Murray, Dernier train pour Busan…

© DR
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Notre sélection de films, séries et documentaires pour la semaine du 26 octobre au 1er novembre.

LE FANTASTIQUE BILL MURRAY

Documentaire de Stéphane Benhamou. ***(*)

Dimanche 27/10, 22h30, Arte.

Avec sa calvitie naissante et sa mine boudeuse de Droopy hollywoodien, il est connu pour poser des lapins aux réalisateurs, improviser sur les tournages en snobant les dialogues, jeter dans des piscines les gens qui ne lui reviennent pas et se pointer dans des endroits où on ne l’attend pas: concerts rock, mariages, Bar Mitzvah… Bill Murray a grandi dans une famille catholique de Chicago au milieu de huit frères et soeurs. Il a partagé avec John Belushi ses délires les plus fous, puis aussi fugué en France avec femme et enfants. Sa mélancolie existentielle est devenue une incroyable force comique tandis que Bill, l’insaisissable, se forgeait une réputation d’homme le plus cool du monde. Le documentaire de Stéphane Benhamou tente de percer les mystères qui entourent mister Murray. Un mec que les rapports du lycée qualifiaient de carrément incontrôlable. Un acteur, un homme, qui se plaît encore aujourd’hui à subvertir les usages.

Du Saturday Night Live qui a fait entrer la parodie la plus subversive dans les écrans de télé américains au Lost in Translation de Sofia Coppola en passant par la case chasseur de fantômes, Le Fantastique Bill Murray raconte le tournage chaotique d’Un jour sans fin (il a embauché une assistante sourde et muette pour faciliter sa communication avec le réalisateur Harold Ramis). Sa relation avec Wes Anderson (la folie douce bien réglée) et son entrée dans le cool absolu… Un portrait à son image: soigneusement décalé. J.B.

À la télé cette semaine: Foxcatcher, Le Fantastique Bill Murray, Dernier train pour Busan...
© DR

VINCENT VAN GOGH SUPERSTAR

Documentaire de Stefanie Appel. ***(*)

Dimanche 27/10, 17h35, Arte.

Les légendes se bâtissent imperceptiblement sur un capricieux équilibre d’admiration et d’empathie. Archétype de l’artiste incompris, miséreux et névrosé, Vincent van Gogh, qui est allé au bout de ses errances et a érigé sa fragilité en noblesse, bénéficie d’un capital d’admiration colossal. Comment est-il devenu une figure digne de l’Olympe dans l’imaginaire collectif? Tant de mythes et de malentendus font que l’homme a pratiquement disparu derrière la caricature historique. Au risque de voir son prolifique travail assimilé à un plan marketing aussi méthodique que juteux. Stefanie Appel, dans un effort de reconstitution méticuleux, invite quelques experts triés sur le volet à traiter avec objectivité et bienveillance le cas van Gogh. À faire la part des choses entre romance et véracité, et à réanimer les forces qui, quelles qu’elles furent, lui procurèrent cette insondable énergie. Comme si au final, il fallait se libérer de cette aura mystique pour s’abandonner pleinement au ravissement de son oeuvre. M.U.

À la télé cette semaine: Foxcatcher, Le Fantastique Bill Murray, Dernier train pour Busan...
© DR

TURQUIE, NATION IMPOSSIBLE

Documentaire de Nicolas Glimois. ***

Mardi 29/10, 20h50, Arte.

Mettre en miroir d’un côté Mustafa Kemal « Atatürk », père, entre 1923 et 1938, de la Turquie moderne et de son mythe national, et de l’autre les dérives autocrates et islamistes de l’actuel président Recep Tayyip Erdogan (exacerbées après le coup d’État raté des 15 et 16 juillet 2016) est un parti pris extrêmement délicat. Mais ce documentaire se défait plutôt bien des pièges du déterminisme historique, détaillant la genèse de cette nation turque fondée sur les miettes de l’Empire ottoman, arrivée avec violence dans le concert des nations, marquée par le génocide arménien de 1915 (et sa négation insupportable), les persécutions des populations grecques puis kurdes et alévies dans les années 20, le jeu ambigu entre laïcité et fondamentalisme religieux (dont ce dernier est sorti vainqueur). L’expression contemporaine de cette tentation historique d’éliminer toute contestation est racontée pour l’essentiel par ceux-là mêmes qui la subissent (historiens, écrivains, journalistes…), éclairant les failles et les dangers d’un nationalisme vigoureux. N.B.

À la télé cette semaine: Foxcatcher, Le Fantastique Bill Murray, Dernier train pour Busan...
© DR

DERRIÈRE UN MICRO: PARIS-BRUXELLES

Présenté par Kyan Khojandi. ***(*)

Mercredi 30/10, 21h00, Be 1.

Comédien, humoriste, scénariste, Kyan Khojandi (photo) s’est fait connaître avec les capsules humoristiques Bref (dont il interprétait le rôle principal) et Bloqués (qu’il coécrivait pour Gringe et Orelsan). Avec Derrière un micro, lancé à Montréal en 2018, le comique français d’origine iranienne voyage à travers le globe pour faire découvrir le stand-up francophone. C’est à Bruxelles, au Théâtre du Vaudeville, dans la Galerie de la Reine, qu’il s’est arrêté le 10 juin dernier. Et ce n’est pas totalement un hasard. Les humoristes belges ont régulièrement eu du succès en France mais jamais le stand-up du Plat Pays n’a autant eu la cote qu’aujourd’hui. Spectacle filmé, Derrière un micro: Paris-Bruxelles rejoue la demi-finale de la Coupe du monde et rassemble pour le coup Baptiste Lecaplain, Melha Bedia, Doully, Fanny Ruwet, Tareek, le recommandable Inno JP et l’inimitable Guillermo Guiz. J.B.

À la télé cette semaine: Foxcatcher, Le Fantastique Bill Murray, Dernier train pour Busan...
© DR

DERNIER TRAIN POUR BUSAN

Thriller d’épouvante de Yeon Sang-ho. Avec Gong Yoo, Jung Yu-mi, Ma Dong-seok. 2016. ****

Mercredi 30/10, 23h25, Arte.

On ne compte plus les films et séries consacrés aux zombies et aux morts-vivants. Difficile, dans cette vague impressionnante où le meilleur côtoie le pire, d’émerger avec des qualités propres à électriser l’amateur forcément un peu blasé. Le réalisateur coréen Yeon Sang-ho y parvient pourtant avec un brio certain. Il faut prendre sans hésiter son Dernier train pour Busan, et plonger dans un spectacle d’action et d’horreur mené à 300 à l’heure. Tout commence quand une personne infectée par un étrange virus frappant certaines zones du pays parvient in extremis à monter à bord de l’express KTX en direction de la ville de Busan. Très vite, la contagion aura lieu, wagon après wagon, transformant voyageurs et employés des chemins de fer en monstres agressifs et assoiffés de sang… D’une tension constante, semé d’épisodes inventifs et de grands moments de mise en scène, le film atteint des sommets ahurissants dans son genre populaire, tout en restant jusqu’au bout très intelligent. L.D.

À la télé cette semaine: Foxcatcher, Le Fantastique Bill Murray, Dernier train pour Busan...
© DR

BARRY (SAISON 2)

Série créée par Alec Berg et Bill Hader. Avec Bill Hader, Henry Winkler, Sarah Goldberg. ***(*)

Jeudi 31/10, 21h00, Be Séries.

Il est arrivé comme une bonne surprise en 2018, orné d’une double récompense aux Emmys pour son acteur Bill Hader (un ancien du Saturday Night Live) et le second rôle Henry Winkler (Fonzie de Happy Days). Barry est le récit d’une transition professionnelle atypique et rocambolesque, celle d’un assassin redoutable, méticuleux et froid (Hader) qui réalise contre toute attente que sa réelle vocation est de devenir acteur. Il se retrouve, à l’occasion d’un quiproquo digne d’un film de Jerry Lewis, dans le cours de théâtre de Gene (superbe Henry Winkler), et se débarrasse de la menace que faisaient peser sur lui la pègre et l’inspectrice Janice Moss. L’histoire, qui délivre une double satire d’Hollywood et de l’archétype de l’anti-héros, appuyée par l’époustouflante palette dramatique d’Hader, aurait pu s’arrêter là. Mais le succès appelait une nouvelle saison. Barry y poursuit son rêve et prend les rênes de son groupe de théâtre suite à la dépression de Gene. Les deux personnages tentent de gérer leurs démons intérieurs (douleur, culpabilité) au long d’un chemin de croix pavé d’humour noir. Très noir. Mais le contraste entre le drôle et le drame, qui faisait le sel de la saison précédente, s’est un peu évaporé, laissant la plupart de la charge comique aux seconds rôles (notamment Anthony Carrigan dans le rôle de Noho, le contact de Barry au coeur de la mafia tchétchène) et à une collection de gags efficaces qui agissent comme des flotteurs dans l’eau trouble de la tragicomédie. N.B.

À la télé cette semaine: Foxcatcher, Le Fantastique Bill Murray, Dernier train pour Busan...
© DR

FOXCATCHER

Biopic de Bennett Miller. Avec Channing Tatum, Steve Carell, Mark Ruffalo. 2014. ****

Jeudi 31/10, 23h35, La Trois.

Passionné par la lutte, le milliardaire John du Pont (Steve Carell) a les yeux fixés sur les Jeux Olympiques de Séoul, qui auront lieu en 1988. Utilisant ses grands moyens financiers, il entend créer sur une de ses propriétés un camp d’entraînement pour l’élite américaine de son sport favori et parvient à convaincre le médaillé olympique Mark Schultz (Channing Tatum) de le rejoindre. Ainsi commence non seulement une préparation sportive mais aussi une relation très étrange, entre un lutteur en manque de figure paternelle et un coach désirant le respect de ses pairs et de sa mère écrasante. Un mélange assurément toxique, où vient s’ajouter le frère et rival de Mark, Dave (Mark Ruffalo)… Inspiré de faits aussi réels que bizarres, Foxcatcher allie tension et sophistication extrêmes. Fascinant de bout en bout, le film de Bennett Miller (Capote, Moneyball) signe un film brillant et inquiétant, aux résonances sociales et politiques, tout en offrant un rôle majeur à Steve Carell. L.D.

À la télé cette semaine: Foxcatcher, Le Fantastique Bill Murray, Dernier train pour Busan...
© DR

GRAND HOTEL

Série créée par Brian Tanen. Avec Demián Bichir, Roselyn Sanchez, Denyse Tontz. **

Vendredi 1/11, 20h30, Be Séries.

Cette adaptation d’une série espagnole « Belle Époque » transfère ses intrigues dans le Miami bling-bling des années 2010. Le résultat, produit par Eva Longoria, oscille entre le Dynasty des années 80 et la classe des Loft/Secret Story des années 2000. Un père veuf remarié à une marâtre plonge son hôtel de luxe dans la dèche, alors que son fils s’encanaille et que sa fille Alicia, fraîchement diplômée, entend glisser son grain de sel. C’est sans compter les secrets, complots et retournements qui rythment ce divertissement punchy accumulant les clichés sexistes. Chaque femme qui y montre un tant soit peu de jugeote voire (ouh!) de détermination est, au choix, morte, vénale ou transformée en femme-enfant à la vue du premier serveur gaulé comme Brad Pitt. Et la traditionnelle femme enceinte par les soins du fils du patron? La femme de chambre, évidemment! Loin de réclamer le grand soir pour les soeurs brisées, la série en fait de la chair à canons télévisuels, entre plans de jambes dansant la salsa et vues panoramiques de l’océan. Ce Grand Hotel touche le fond de sa piscine. N.B.

À la télé cette semaine: Foxcatcher, Le Fantastique Bill Murray, Dernier train pour Busan...
© DR

BRIAN JOHNSON’S A LIFE ON THE ROAD

Série documentaire présentée par Brian Johnson. ***

Vendredi 1/11, 21h10, La Trois.

Brian Johnson n’est pas que le chanteur chevelu, surexcité et hurleur d’AC/DC, c’est aussi une star de la télé. Activité qu’il marie généralement avec sa passion pour les bagnoles. Après avoir participé à The Race sur la chaîne anglaise Sky, une émission de téléréalité mettant en scène des courses de voitures, et avoir présenté dans une série documentaire les véhicules les plus emblématiques de l’Histoire de l’automobile (Cars That Rock with Brian Johnson), le successeur de Bon Scott est parti à la rencontre d’artistes comme Roger Daltrey, Robert Plant et Sting pour parler des concerts, des tournées et de la route. La Trois diffuse un épisode de A Life on the Road: sa visite dans l’antre de Metallica et ses bavardages avec Lars Ulrich. Le batteur danois montre sa collection de drapeaux glanés aux quatre coins du monde, plonge dans ses souvenirs, se rappelle des premières tournées et galères, de l’achat d’un avion privé… Un concept sympa malgré des interviews superflues (manager, fan…). Les images d’archives (parfois exceptionnelles) auraient suffi à l’habillage. J.B.

À la télé cette semaine: Foxcatcher, Le Fantastique Bill Murray, Dernier train pour Busan...
© DR

JANE BIRKIN, SIMPLE ICÔNE

Documentaire de Clélia Cohen. ****

Vendredi 1/11, 22h30, Arte.

Grands yeux rêveurs, accent à couper au couteau, voix haut perchée à la limite de la cassure… Elle a incarné la liberté des années 70 et passé 50 ans de carrière à multiplier les rôles et les emplois. Muse, chanteuse, artiste engagée, pilier du cinéma d’auteur… Jane Birkin a été tout ça à la fois. Une icône aussi. Accessible et sincère. Père dans la Royal Navy, mère attentive qui tourne des petits films avec ses gosses pour les distraire… Passionnant, fouillé, le documentaire de Clélia Cohen raconte l’enfant, la jeune adolescente au physique androgyne et sa poitrine qui ne pousse pas. Sa rencontre avec John Barry, qu’elle épouse, Blow Up d’Antonioni qui la sort de l’ennui, puis bien sûr sa relation avec Doillon et surtout Gainsbourg. Pierre Grimblat présente Jane et Serge pour les essais d’un film: Slogan. Ils se sont détestés au premier regard, mais ça n’a pas duré très longtemps. Mêlant les interviews, les extraits de films (notamment de Jane B. par Agnès V. que lui a consacré Varda) et des images d’archives complètement dingues (elle ne voyait aucun problème à être filmée tout le temps), Jane Birkin, simple icône tire le portrait d’une fille nature et libre, sexy mais jamais graveleuse. Il y a la lolita et l’Anglaise rigolote, les nanars et les incursions sérieuses dans le cinéma, la une des magazines de charme et les premiers concerts après 20 ans de carrière. Un docu bercé par l’incroyable humour à froid de son héroïne. J.B.

À la télé cette semaine: Foxcatcher, Le Fantastique Bill Murray, Dernier train pour Busan...

THE LAUNDROMAT

De Steven Soderbergh. Avec Meryl Streep, Gary Oldman, Antonio Banderas. 1h36. **(*)

Disponible sur Netflix.

Satire grinçante, The Laundromat voit Steven Soderbergh revenir sur l’affaire des Panama Papers, s’employant, sur les pas d’une veuve (Meryl Streep) victime d’une arnaque à l’assurance, à décrypter les montages imaginés par le cabinet d’avocats Mossack Fonseca. Les intentions sont louables, et l’entreprise a le mérite de rendre intelligibles les mécanismes de la finance internationale et des sociétés-écrans, ce qui n’est pas rien. Le trait est malheureusement à ce point appuyé que l’impression est surtout à la caricature grossière, le cabotinage effréné de Meryl Streep (dans un double rôle) et de Gary Oldman (démontrant qu’il est possible de faire du sous-Christopher Waltz) n’arrangeant rien à l’affaire… J.F.Pl.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content