Critique | Séries/Télé

1985: l’année de plomb pour la Belgique

3,5 / 5
© Thomas Nolf/Eyeworks/VRT/RTBF
3,5 / 5

Titre - 1985

Genre - Drame

Réalisateur-trice - Willem Wallyn

Quand et où - À partir du 22 janvier sur La Une et sur Auvio

Casting - Tijmen Govaerts, Aimé Claeys, Mona Mina Leon

Nicolas Bogaerts Journaliste

Collaboration inédite entre la RTBF et la VRT, la série 1985 évoque une Belgique assoupie, réveillée par l’échappée sanglante des tueurs du Brabant.

Raconter un trauma national, les tueries du Brabant, série d’attaques sanglantes qui ont déstabilisé un Royaume de Belgique endormi dans les années 80. Plonger dans cette époque poisseuse pour en déloger les racines occultées. Sortir de l’amnésie. Tenter de comprendre les ressorts d’une affaire jamais élucidée et dont les ramifications se perdent entre omerta, gendarmerie factieuse, enquêtes bâclées et paranoïa. Il y avait beaucoup de raisons de faire 1985, fiction revenant sur l’agitation d’une décennie qui a secoué les fondements du pays. Willem Wallyn, son créateur, qui a vécu de très près les événements a choisi non pas de donner sa version des faits sous forme d’enquête corsée, mais plutôt de reconstituer une atmosphère: délétère, agitée, glauque.

Capter l’époque

La perspective est celle de trois jeunes adultes, prêts à faire le grand bon de leur Flandre natale vers la capitale: la jeune Vicky s’apprête à entrer à la VUB et dans son premier kot. Son frère Franky et son meilleur ami Marc vont eux intégrer la gendarmerie. Leurs univers sont aux antipodes, mais leurs désillusions vont s’échouer sur les mêmes récifs. Adepte des radios libres, Vicky teste l’élasticité démocratique d’un pays tendu par la guerre froide. Franky et Marc, affectés dans des unités différentes, sont loin d’y faire de joyeuses entrées et découvrent une arrière-cuisine peu reluisante: violence, corruption, luttes pour le pouvoir, naissance d’un groupe radicalisé à l’extrême droite (groupe Diane), ballets roses où politiques, riches dirigeants et flics grenouillent allègrement. Plongés dans l’Histoire, les amis d’enfance seront testés dans leur amitié et leur humanité. Comme la capacité de résilience d’un pays soudain confronté à ses démons.

Aimé Claeys – © Thomas Nolf/Eyeworks/VRT/RTBF

Sans en rajouter dans la reconstitution à base de moumoutes, 1985 réussit à capter l’époque: une Belgique douloureusement normale, un peu délabrée, soumise à la lente infection de nos illusions intimes et collectives. À ce pays pépère, sympathiquement surréaliste, se substitue une implacable réalité: la tentative d’assassinat du major Vernaillen (Peter Van den Begin), les coups tordus des ripoux et l’autoritarisme naissant dans le corps de gendarmerie, qui allaient mener vers le meurtre d’innocents. Le casting est flamboyant, et distribue le meilleur de part et d’autre de la frontière linguistique. La réalisation minimaliste ménage ses effets comme pour mieux nous laisser adopter le regard des protagonistes. Très astucieusement, des capsules en fin d’épisode replacent les événements dans leur contexte, archives à l’appui, rappelant ce qui se tramait sous les yeux des bons citoyens, alors tout à leur digestion d’un stoemp saucisse en attendant la météo et le nouvel épisode de Dallas.

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