Critique | Musique

Mykki Blanco, plus perçante que jamais sur son troisième album

3,5 / 5
© DR
3,5 / 5

Album - Stay Close To Music

Artiste - Mykki Blanco

Genre - Pop

Label - Transgressive

Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Sur son troisième album, l’artiste joue et gagne, entre fronde rap et explorations pop. Sans jamais perdre de vue son discours inclusif.

Au moment de publier son premier album solo, il y a quelques semaines d’ici, Oliver Sim n’a cessé d’insister: si, au fil du temps, celui qui compte pour un tiers de The xx, a pu mieux accepter sa séropositivité, mais aussi assumer tout simplement son homosexualité, c’est grâce en partie à des artistes comme John Grant ou Mykki Blanco.

De fait, depuis une dizaine d’années, cette dernière est devenue l’une des figures queer les plus emblématiques de la culture pop. Dès 2012, son premier EP –Mykki Blanco & the Mutant Angels– a marqué les esprits. Né Michael David Quattlebaum Jr., à Orange County, Californie, en 1986, Blanco met alors directement les choses au clair. Évoquant sa sexualité, dans un genre -le rap- souvent accusé de réflexes homophobes, elle rue dans les brancards. Sa fronde punk décomplexée et ses performances scéniques font mouche. Un an après avoir révélé être porteuse du virus HIV, en 2015, elle sort un premier album, Mykki, qui confirme sa personnalité bigger than life, tout en lui apportant de nouvelles nuances: si Blanco évoque les combats de la communauté LGBTQIA+, elle ne veut pas être forcément réduite au rôle de porte- drapeau, prenant soin de donner une tournure personnelle à ses morceaux.

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Entre-temps, les questions de genre et de discrimination envers les minorités sexuelles ont trouvé une nouvelle visibilité. De là à penser que la situation d’une artiste transgenre noire comme Mykki Blanco s’est “banalisée”, il reste une marge. Sur son nouvel album, elle explique ainsi: “Black and gay/I wonder if they’ll ever claim us” et s’inquiète: “HIV, I got HIV, can I still be famous?/Will they wait until I’m dead to give me credit?” (Carry On).

© National

Non, le débat ne s’est pas éteint, ni dilué. Il s’est juste déplié différemment, rallumant même parfois des feux où on ne l’attendait pas toujours. Récemment, la télé française en a fourni un bon exemple -le talk show Quelle époque! de Léa Salamé, organisant la rencontre forcément explosive entre Marie Cau, première maire transgenre de France, et la blogueuse Dora Moutot, excluant les personnes trans du combat féministe. Sur ce nouvel album, Mykki Blanco coupe court: “Your feminism is not my feminism/Unless it includes all kind of women

Comme son titre l’indique, Stay Close to Music ne se limite cependant pas à son seul discours. Épaulée par le producteur FaltyDL, Mykki Blanco étend son spectre musical, sans rien perdre de son sens de l’expérimentation. Un an à peine après Broken Hearts and Beauty Sleep, elle floute toujours davantage les limites entre les… genres, parvenant à rassembler sur un même disque à la fois Michael Stipe (REM) et Saul Williams, Anohni et Jónsi (Sigur Rós). Pop à fleur de peau sur French Lessons, réminiscences new wave sur Your Love Was a Gift, rap décalé sur Lucky, trap en roue libre sur Ketamine… Sur ce troisième album, Mykki Blanco multiplie les angles de vue. Au risque parfois de se disperser, certes, mais en dévoilant une nouvelles vulnérabilité. Le regard plus perçant que jamais.

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