Saule: « Transformer le moindre « ouh, ouh » en « où, où » pour entrer dans les quotas français »

Saule, ici à Dour en 2009. © BELGA/Virginie Lefour
Kevin Dochain
Kevin Dochain Journaliste focusvif.be

BONUS TRACK | Chaque semaine durant l’été, on vous dévoile les secrets de fabrication des chansons d’une poignée de groupes belges dans une série d’interviews-fleuves. Deuxième à se prêter à l’exercice: Saule, qui lèvera le voile sur son album à venir aux Francofolies de Spa le 19 juillet prochain.

Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts entre son charmant premier album Vous êtes ici (2006) et le méga-tube Dusty Men avec Charlie Winston. Alors que Saule donnera un concert de chauffe mardi prochain aux Francofolies, avant son cinquième album prévu pour la rentrée, on a voulu le rencontrer pour qu’il nous explique ses secrets de chanteur bio. Toujours dans l’idée d’appliquer le Songwriters on Songwriting de Paul Zollo à la scène belge, et après un premier essai consacré à Ulysse, conversation tous azimuts avec Baptiste Lalieu dans les méandres de la composition, attablés à la terrasse de la pittoresque librairie Abao à Watermael-Boitsfort.

Comment te lances-tu dans l’écriture d’une chanson? D’abord les paroles, d’abord la musique? Il y a une recette qui marche mieux qu’une autre?

Malheureusement, je n’ai qu’une seule réponse: c’est qu’il n’y a pas de règle. Je ne sais pas comment les autres fonctionnent, mais pour moi c’est comme ça. Parfois, ça peut être un texte qui vient, sur lequel j’essaie de trouver une musique, mais ça peut être aussi l’inverse. Pour mon album à venir, je voulais qu’il soit très musical et j’ai commencé par chanter « la la la » pour trouver les arrangements, trouver l’ADN du morceau. Mais à côté de ça, je dois avoir une soixantaine de carnets pleins de gribouilles: quand j’attends quelqu’un, que j’attends le métro, que j’ai une heure à tuer, ou dans mon pieu, je le remplis. J’ai plein de textes en jachère, et quand je galère ou que j’ai une musique pour laquelle je n’ai pas de texte, je vais puiser dans cette malle aux trésors pleine de bonnes et de mauvaises surprises. Parfois aussi, ce que je baragouine en phonétique m’inspire l’une ou l’autre phrase, un mot clé autour duquel je partirai.

Je dois avoir une soixantaine de carnets pleins de gribouilles.

Comme je viens du rock à la base, parfois j’ai envie d’un bon riff, alors je ponds un riff et je tourne autour avec le texte. Ça m’arrive aussi d’écrire des textes en anglais en me disant que ce sera pour un autre projet (Baptiste joue aussi notamment dans Gonzo, NdlR), puis de revenir dessus et finalement chanter en français dessus. Du coup, ce ne sont pas du tout les mêmes paroles, parce que je ne chante pas du tout de la même façon en anglais qu’en français. C’est intéressant de jouer sur ces deux niveaux-là.

Tu bosses plutôt tout seul ou en groupe?

Je fais tout tout seul. Dans d’autres projets, on a écrit ensemble, mais quand j’ai commencé le projet Saule il y a dix ans, c’est parce que, même si j’aimais bien bosser en groupe, je n’arrivais pas à aller au bout de mes idées. C’est frustrant, parce que dans un groupe, tu es dans une espèce de pseudo-démocratie et des fois, tu ravales un peu tes idées en te disant « je vais laisser causer l’autre ». Ce qui ne veut pas dire que l’autre a de mauvaises idées… Mais là, j’avais envie d’aller au bout de mes idées à moi, les pousser jusqu’au bout tout seul. Je ne suis pas batteur, je ne suis pas bassiste, je ne suis même pas guitariste, je suis juste chanteur à la base mais je m’accompagne plus ou moins de tout. Et aujourd’hui, grâce à plein de programmes, tu as des outils qui te permettent de t’accompagner d’une batterie, même s’il faut la jouer aux doigts… La dernière fois que j’ai fait écouter une démo à mon batteur, il m’a demandé « c’est qui qui joue? », quand je lui ai répondu que c’étaient mes doigts, il était bluffé. Tu peux vraiment aller encore plus au bout de tes idées avec les outils d’aujourd’hui.

En groupe, je n’arrivais pas u0026#xE0; aller au bout de mes idu0026#xE9;es.

Généralement, je compose tout seul, je fais les arrangements de mon côté aussi, puis je demande à mes musiciens ce qu’ils peuvent apporter. Comme mon faible, c’est la batterie, sur ce dernier album, j’ai souvent demandé à mon batteur de « recouler une dalle » sur ce que j’ai tapé de mon côté. Des fois, il balançait vraiment un autre rythme qui me donnait d’autres idées d’arrangement. Parfois, on gardait le rythme et il le faisait en mieux, d’autres fois on a superposé des batteries MIDI avec de vraies batteries… En général donc, je vais le plus loin possible dans l’exploitation d’un titre et après, je partage avec les autres. À partir de ce moment-là, le guitariste tape des lignes en plus, le claviériste expérimente avec ce qu’il avait sous la main… À l’ICP, où on a enregistré, il y a plein de matos. Des vieux Juno, des trucs pour donner la texture… Je lui ai dit: « vas-y, lâche-toi! » Mais toujours, avant d’arriver en répet ou en studio, la charpente est là.

Tout en laissant des portes ouvertes, donc…

Bien sûr. J’estime toujours que quand je travaille avec d’autres musiciens, ils ont quelque chose à apporter. Maintenant, c’est sûr qu’ils amènent moins que sur certains projets où on travaillait tous ensemble. J’ai essayé par le passé de demander à mes musiciens d’écrire également leurs chansons. On m’a filé des chouettes trucs, mais on se rendait compte en réécoutant que ça ne se mariait pas avec le reste. Comme c’est un univers très personnel, ça dénotait trop. J’avais demandé à Dominique A de m’écrire une chanson, il m’en a écrit une super où il personnifie le hasard, avec un super beau texte. Mais j’étais hyper mal. C’est moi qui lui avais demandé, le morceau était super mais je n’allais pas l’utiliser. C’est gonflé de dire à Dominique A « je ne vais pas prendre ta chanson », mais quelque part, c’était se rendre compte du truc très perso duquel il est difficile de sortir.

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Mais je laisse la porte ouverte à chaque disque. Il y a même des fans qui m’ont envoyé des textes sur ma page Facebook. Ça m’est arrivé pas mal de fois, et toujours j’ai joué le jeu. Si je leur réponds « malheureusement, ça ne va pas aller mais c’est super gentil, j’ai un univers vraiment particulier, etc. », j’aurai toujours pris ma guitare et essayé de le chanter ou de le mettre en musique. Sur le dernier album, il y a une chanson très live qui s’appelle Renonce à tes adieux. J’écrivais chez moi une chanson sur les ruptures et les couples célèbres. Je parlais de Gainsbourg et Jane, Adam, Ève et l’Éden, Cléopâtre, etc. Mais quand j’ai été bloqué dans l’écriture, j’ai été googler les couples célèbres avant de me dire que je demanderais plutôt bien à mes fans sur Facebook. C’est devenu une espèce de jeu avec les internautes, il y avait des centaines de commentaires, et au final, j’ai gardé une partie de ce qu’ils avaient écrit. Puis je me suis amusé à écrire la musique dessus. Après, je leur ai proposé de faire les choeurs. J’ai enregistré une guitare au clic, les gens enregistraient leurs voix chez eux et me les ont envoyées. On a collecté toutes les voix, il y a eu plein de surprises: un solo de Rhodes, plein de trucs. Ça a été un boulot d’archivage de fou. Maintenant, le morceau est là, on va l’enregistrer live aux Francos, en la jouant au clic pour pouvoir rajouter toutes les voix rigolotes pour en faire un bonus pour le disque.

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J’ai toujours bien aimé l’interaction. En live d’ailleurs, je descends souvent dans le public pour aller faire des chansons, ici on a fait des pré-shows où on jouait en cercle avec le public autour… J’aime bien casser les conventions: de 1, tu ne t’ennuies jamais, et de 2: pour le public, c’est un moment un peu unique.

Il y a un instrument sur lequel tu retombes systématiquement quand tu composes?

La gratte. Gratte nylon. J’aime bien aussi bosser sur des bases de données de boucles, où tu vas choper des grattes, des basses, des claviers, des loops… Partir sur ces boucles, ça te mène rythmiquement et harmoniquement vers des trucs que tu ne connais pas par coeur. Ça m’oblige à sortir de mes sentiers battus.

C’est marrant, je n’ai peut-être pas une vision globale de comment chaque musicien fonctionne, mais tu dois être le premier que je rencontre qui bosse comme ça…

C’est soit sur Logic, ou sur des sites comme Looperman où des gens postent des musiques libres de droits en peer-to-peer. Des fois, tu trouves des boucles de clavier, des fois des cuivres, des fois des cordes, etc. Ça va dans tous les styles, tu peux choisir des catégories, des tempos… C’est gratuit, et souvent je vais piocher dedans pour m’emmener ailleurs. Parfois, tu tombes sur un truc électro, et moi qui ne suis pas du tout dans l’électro, je me retrouve à en faire. Je suis quelqu’un qui écoute vraiment plein de trucs. Ça peut aller du hip hop pur et dur à des trucs électro à la Aphex Twin ou Matmos, mais il n’y a aucun ADN duquel je me sens complètement étranger. Comme en pop et en chanson française, j’y ai été avec mes gros doigts d’autodidacte qui n’y connaît rien mais qui y va à l’oreille, dans tous les styles j’y vais un peu de la même manière. Je ne me sens pas étranger au style dans lequel je vais. Peut-être que j’aurai l’air con, peut-être que ça va être nul, mais ça me permet de m’essayer à d’autres styles.

Des exemples concrets de ce que ça a pu donner?

L’année passée, Franco Dragone m’avait demandé d’écrire des chansons pour le Lido, je me suis retrouvé à bosser sur du Broadway-big band avec un mec qui fait des orchestrations de comédie musicale. Ce qui est chouette, c’est qu’on n’est pas partis dans un délire de comédie musicale ringarde, c’est plutôt un truc à la Baz Luhrmann, de hip hop mélangés à du brass band, mais au début, j’ai eu du mal à m’y retrouver. Puis je me suis mis à phagocyter tout ce qui se passait et au fur et à mesure, j’étais dedans et je me sentais légitime dans ce que je faisais. Au final, je suis hyper fier de ce truc, je pense que ça va sortir en disque l’année prochaine. Là, pour l’instant, ça se joue tous les soirs au Lido, et par rapport à tout ce qui s’y faisait que je trouvais un peu ring’, je suis hyper fier des chansons, des textes. C’était une expérience.

Quand j’ai fait Zombie Kids l’année passée, le pitch, c’était de faire du hip hop avec un vrai band. On a approché Skread, le mec qui bosse avec Orelsan, à qui on a filé deux-trois prods. Je me suis retrouvé à dialoguer avec ces mecs-là alors que je ne viens pas du tout du hip hop. On a fait venir Hippocampe Fou qui a chanté sur une chanson. J’ai énormément de respect pour lui et j’avais peur qu’il me rie au nez. J’ai mis des gants avant de lui donner les morceaux, en lui disant « tu peux changer les textes, et si les instrus ne te plaisent pas, on peut faire autre chose… » C’est surtout au niveau du texte et de la métrique que j’avais peur, mais il a changé quatre virgules… J’ai halluciné. Ça partait d’une blague mais ça a plu. C’est gai de s’essayer à plein de choses, se mettre en danger.

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Si la démarche est intègre, je crois que ça se ressentira toujours.

C’est pas fake, quoi. J’aime bien que les gens soient cash, je préfère qu’on me dise que c’est nul si ça l’est. En même temps, j’écoute pas mal de hip hop, donc par rapport à mes références, je me sentais légitime. Quelque part entre l’univers d’un Damon Albarn avec Gorillaz et les musiques des films de Tim Burton. On a fait quatre dates sold out, les gens venaient nous voir après avec leurs gamins hyper enthousiastes. Le pari était gagné, parce que c’était un one-shot, et en sortant du spectacle, tout le monde nous demandait quand sortirait le disque.

Pour en revenir aux chansons en elles-mêmes, quand est-ce que tu te dis « c’est bon, celle-là est clôturée »?

Jamais (rires). En studio, je me demande souvent: « est-ce que les gens vont encore aimer ce que je fais? Est-ce que je ne vais pas devoir raccrocher et faire autre chose? » Mais comme je suis quelqu’un qui touche à plein de trucs, je me suis dit que ce n’était pas grave: si Saule ne plaît un jour plus aux gens, je ferai autre chose, d’autres projets musicaux mais je ne lâcherai de toute façon jamais la musique. C’est un besoin. Quand j’écris mes chansons, il y a toujours un doute. « Est-ce que j’ai vraiment fini mon album? Est-ce que j’ai suffisamment de chansons bien? » Si le mec de ma maison de disques, PIAS France, ne m’avait pas dit « mais qu’est-ce que tu attends pour entrer en studio? T’as des putain de bonnes chansons, arrête de te poser mille questions. Je te cale un studio, dans un mois tu enregistres… » C’est vraiment comme ça que ça s’est passé. Ils m’ont fait chier pendant des mois pour avoir mes démos mais je ne voulais rien lâcher. À force qu’ils insistent, j’ai envoyé, et ils m’ont envoyé en studio. J’y suis rentré en ayant la trouille, comme quand j’ai fait ma première démo. Puis tu te rends compte que tous tes musiciens kiffent, que ta maison de disque kiffe, que les gens qui arrivent en studio comme Mark Plati -avec lequel on a travaillé et que j’admire beaucoup- te disent « great song, great record! » Puis tu commences à toi-même légitimer ton boulot en te disant « la petite voix que j’avais à l’intérieur avait peut-être raison ». Spielberg a dit que l’instinct, c’est une petite voix qu’on a en nous et qu’il faut écouter, mais ce n’est jamais une voix qui hurle. Moi, si j’avais une voix qui chuchotte, j’avais aussi des tas et des tas de couches de doutes par-dessus. « Est-ce que les gens vont aimer? Est-ce que je ne suis pas en train de faire complètement fausse route? Est-ce que je n’ai pas pris trop de risques? Est-ce que ce n’est pas trop différent de ce que j’ai fait avant? Est-ce qu’il y a des singles?… »

Spielberg a dit que l’instinct, c’est une petite voix qu’on a en nous et qu’il faut u0026#xE9;couter, mais ce n’est jamais une voix qui hurle.

Est-ce que tu sens d’ailleurs à l’avance si un morceau va marcher? S’il va être un bon single?

Je me souviens que sur l’album précédent, une fois que Dusty Men a vraiment explosé, dans toutes les interviews, je disais « ce morceau, il ne va pas être sur l’album, j’allais le jeter, je l’ai écrit à la dernière minute, jamais je n’aurais cru qu’il allait devenir un gros hit, etc. » Et puis un jour, ma chérie lit un article où je raconte ça et elle me dit « mais tu te fous de ma gueule? Tu ne te souviens plus? Tu es descendu de ta pièce de musique, j’étais dans le salon, et tu m’as dit « je travaille sur un morceau, avec ça, on va s’acheter une maison ». » (rires) Je passe par tellement de phases d’emballement qui s’enchaînent à des phases de doute, que quand j’ai dit ça en interview, j’étais sincère. Mais quand je suis rentré en studio, mes zicos, ma maison de disque m’ont quand même dit « c’est un bon gros tube, ça! » La première étape, c’est d’être emballé parce que tu t’éclates, puis tu doutes, et puis c’est avec les retours que tu te rends compte du potentiel.

Comment tu t’es mis à bosser avec Charlie Winston?

Charlie, je le connais depuis bien avant cette collaboration. Je me suis retrouvé sur France Inter à l’époque de mon deuxième album, en 2009, à faire une émission où Charlie était également invité. Il y avait un gros plateau avec trois scènes face à face. J’y ai découvert Charlie dont je ne connaissais que Hobo, j’ai pris une claque, et je l’ai également vu emballé pendant que je jouais mes 6-7 titres. Quand on a quitté la scène, on a sympathisé, il m’a invité à jouer avec lui, je l’ai invité à jouer avec moi. Depuis 2009, on entretient une correspondance: quand il vient à Bruxelles, on va boire un coup, on est devenu potes… Quand je bossais sur Géant, je l’ai appelé en lui disant que je voulais bosser avec des Anglais, je lui ai demandé des conseils de producteurs. Je lui fais écouter les démos, et en buvant un café ensemble, il me dit « je connais un producteur qui serait intéressé… Moi! » Ça a été génial, parce qu’il a produit tout l’album. C’est entre les deux sessions de studio que j’ai écrit Dusty Men en dernière minute en me disant que ce se serait bien qu’il ait sa voix sur le disque comme il l’avait produit. Je l’ai écrit comme une boutade et voilà le résultat. J’ai vu le docu d’Olivier Monssens sur les tubes belges, où il expliquait que la plupart étaient des faces B, des morceaux qui devaient être jetés, des accidents, etc. Cette chanson est devenue un tube mais à la base, c’était une blague. C’était « viens, on fait les cons, on fait les cowboys »

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L’histoire marrante avec ça, c’est que mon label a insisté pour que le morceau entre dans les quotas français pour les radios, qui impose d’avoir 60% des paroles en français. Ils me disaient qu’avec un format comme ça, un truc aussi pop, s’il entre en plus dans les quotas français, il tournerait en boucle sur les radios en France. Ce qui est incroyable, c’est que tu dois envoyer le morceau à un laboratoire qui compte le nombre de mots dans la chanson à la virgule près. Dans la première version de la chanson, on nous a dit qu’il n’y avait pas assez de mots en français, et on a fait deux choses: d’abord, on a rajouté un « ici! » en réponse aux « ouh, ouh, ouh, ouh », comme ça les « ouh, ouh » devenaient des « où, où? » (rires). Comme ça ne suffisait pas, j’ai demandé à Charlie de chanter en français. Il n’était pas chaud au départ, mais ce qui est marrant, c’est que c’est ce qui a donné son charme à la chanson au final.

Pour entrer dans les quotas franu0026#xE7;ais pour les radios, on a rajoutu0026#xE9; un u0022ici!u0022 en ru0026#xE9;ponse aux u0022ouh, ouh, ouh, ouhu0022, pour qu’ils deviennent des u0022ou0026#xF9;, ou0026#xF9;?u0022

Les producteurs ont chaque fois eu autant d’importance que Charlie Winston pour toi?

Ils le sont devenus à partir du deuxième album. Le premier était vraiment bricolé, même si on a eu l’ingé son de Dominique A, Dominique Brusson, qui est venu affiner ce qu’on avait fait. Mais dès le deuxième album, on a eu un producteur qui est venu dès le début des sessions, Seb Martel, qui est un ovni qui joue avec Ben Harper, Matthieu Chédid, Camille… À partir du moment où je suis auteur, compositeur, arrangeur, j’ai vraiment besoin d’un regard extérieur sur mon disque. Ici, j’ai bossé avec Marc Plati (David Bowie, The Cure, Les Rita Mitsouko, NdlR), c’est vraiment une super rencontre.

Quelle est la proportion de morceaux que tu jettes avant de rentrer en studio?

Plein, mais je ne jette jamais vraiment. Je ne supporte pas le gaspillage (rires). Sur l’album qui arrive, il y a un morceau qui s’appelle Je reviens qui est très Radiohead, période OK Computer. Je l’ai composé il y a trois ou quatre ans. Je l’aimais bien, mais je n’avais jamais réussi à aller au bout. Mais ici, avec la dynamique du disque et ce qui s’est mis en route, on l’a bossé et j’ai retravaillé le texte, Mark Plati m’a proposé une nouvelle structure et au final, j’en suis très content. J’ai toujours ma vieille tour d’ordinateur sur laquelle j’ai fait mes deux premiers albums. De temps en temps, je la rallume, et je réécoute ce que j’ai fait comme une madeleine de Proust.

L’allusion à Radiohead est d’autant plus pertinente qu’ils viennent de sortir le True Love Waits qu’ils avaient abandonné il y a longtemps…

Carrément, et le nouvel arrangement est terrible d’ailleurs. J’aime bien ce genre de trucs. Ça prouve aussi qu’une chanson, même si tu l’as écrite à un moment, peut aussi être intemporelle.

En live, tu retravailles beaucoup les morceaux, justement?

Ici, on a fait le processus inverse: on a fait dix dates pendant lesquelles on ne jouait que les nouvelles chansons. Après, pendant le rappel, on a évidemment joué les anciennes pour faire plaisir aux fans, mais quand on a vu l’engouement pour les nouvelles chansons, ça m’a conforté avec ma petite voix qui me disait qu’on tenait un truc. Ça nous a aussi permis de tester des arrangements, des structures, de jouer avec le groupe puisqu’on allait enregistrer l’album live. Mais oui, un morceau bouge tout le temps, pour moi. Entre cette pré-tournée, le studio, la résidence et la tournée qu’on va monter, ça va encore bouger. J’ai besoin qu’un morceau soit vivant, pas figé.

De un, il faut oser. Se mettre en danger, essayer des choses qu’on n’a pas l’habitude de faire. De deux, il faut aller voir plein de concerts et u0026#xE9;couter plein de disques.

Pour clôturer, est-ce que tu aurais des conseils au jeune groupe qui se lance pour écrire de bons morceaux?

Je n’ai pas la prétention de pouvoir en donner, mais il y a deux choses qui m’ont toujours permis d’avancer. De un, il faut oser. Se mettre en danger, essayer des choses qu’on n’a pas l’habitude de faire, comme je le fais avec mes boucles électro. Deuxième chose, il faut aller voir plein de concerts et écouter plein de disques. Aujourd’hui, avec Spotify, Deezer, les magazines, Facebook…, il y a moyen de découvrir des groupes toutes les semaines. Se mettre en danger et être curieux. Pour moi, être curieux, c’est aller voir des concerts. La compo, tu la vis en voyant un live. Tout à coup, tu comprends l’articulation d’une chanson alors que sur disque, tu es noyé dans la musique. Bref, être gourmand, curieux et se mettre en danger.

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