Nuits Bota: Juliette Armanet, bête de scène

Juliette Armanet © ISOPIX/Sadaka Edmond
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Aux Nuits Botanique, la Française a fait le show, performeuse bluffante, à la fois drôle et touchante, vintage et moderne, pop et chanson.

Il y a un an, elle se faufilait déjà dans l’affiche des Nuits. C’était au Cirque royal, alors encore largement inconnue, en première partie de Suarez. Aujourd’hui, Juliette Armanet aurait facilement pu remplir la même salle sur son seul nom. Elle n’est plus « l’une des nouvelles (nouvelles) têtes » d’une « nouvelle (nouvelle) vague ». Le genre de scène que la chanson française (et la machine médiatique) génèrent régulièrement, et qui doit à chaque fois ramener une nouvelle audience, un nouveau public. En l’occurrence, Juliette Armanet a trouvé mieux: le grand public.

Pour preuve, le concert de vendredi soir, dans le chapiteau des Nuits Bota, ultra sold out pour le coup. Sur le coup de 22h10, alors que ses musiciens (batterie, basse, guitare, claviers – que des mecs) ont déjà pris place, Armanet débarque en conquérante. Veste et pantalon lamés argent, celle qui a remporté récemment la Victoire de la musique de l’album-révélation, enchaîne les poses démonstratives, quelque part entre Céline Dion et Freddie Mercury – « C’est ti-par, les canards! », lance-t-elle.

S’asseyant derrière son piano, elle se lance dans Manque d’amour, première ballade dont la dramatisation seventies fait déjà mouche. Juste derrière, l’Indien confirme ses manières d’équilibriste, entre chanson, pop et variété, formule euphorisante, qui joue volontiers du kitsch. Too much, Juliette Armanet? C’est vrai qu’elle en fait des tonnes, cabotine à mort sur Star Triste. Mais ça marche. Parce que le second degré n’a pas ici le goût âcre de l’ironie; il est au contraire sucré – décalé certes, mais généreux. Il faut la voir demander au public d’imiter le bruit du vent, lui soufflant un lascif « Allez-y, décoiffez-moi », façon Juliette Greco. C’est sa manière d’introduire son tube L’amour en solitaire, scie dont elle n’a pourtant toujours pas épuisé le potentiel, avec une version particulièrement dense.

Autant dire que le public est au taquet. Quand arrive le tour du morceau Alexandre, au cours duquel Armanet a pris l’habitude de faire monter un « Alexandre » sur scène, les mains se lèvent par dizaines. Pas de bol: l’heureux élu ne s’appelle pas vraiment Alexandre (ils le sont rarement), l’avoue, s’en vante même. Avant de redescendre, l’imposteur demande quand même le bisou. Et finit par le prendre, d’initiative. Malaise? Pas loin, oui. Bon enfant, le public hue. Professionnelle, Armanet continue. Elle se fait plus sobre, quand elle enchaîne Seule sous la pluie – piano solo qui s’emballe, notamment grâce à la trompette de Voyou (qui l’a précédée sur scène, en première partie) -, puis A la folie, intense, debout face au public.

Dans la dernière ligne droite, sous la boule à facettes et le rideau à paillettes, du plus bel effet, Armanet se transforme carrément en disco queen. Déchaînée, dansant comme une possédée, elle enchaîne Loulou et Un samedi soir dans l’Histoire. La chanteuse est drôle, touchante. La performeuse, elle, est carrément impressionnante. En rappel, retrouvant son piano, elle glisse encore son adaption du I Feel It Coming de The Weekend. La salle est aux anges, applaudit, tape des pieds. On appelle ça un carton. Elle, tout sourire, visiblement touchée, quitte la scène à reculons. En n’oubliant pas de signaler d’un geste à son faux Alexandre, que, la prochaine fois, elle lui coupera la… Ouf!

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