Nuits Bota: Ideal crash

TaxiWars, le projet jazz de Tom Barman et Robin Verheyen © Philippe Cornet
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Barman jazzman (TaxiWars), nouveau guitar hero (Steve Gunn) et relève touarègue (Imarhan). Tour de Nuit.

Il y avait de quoi faire jeudi aux Nuits Botanique. Le genre de soir où sous les coupoles de Saint-Josse on regrette que tout le festival ne se décline pas comme la Nuit belge. Avec un accès toutes salles qui permet de voyager entre le Chapiteau et le Grand Salon, l’Orangerie et la Rotonde. D’un côté, il y a Tom Barman entouré de jazzmen. Ce que le leader de dEUS propose de plus intéressant et d’excitant depuis, disons, 1999 et la sortie de The Ideal Crash. Né de sa collaboration avec le génial saxophoniste Robin Verheyen (ils avaient déjà travaillé ensemble sur son projet électro Magnus), TaxiWars mêle jazz et spoken word avec une classe et une énergie dingues. Un plaisir non feint aussi. Un peu comme si Barman s’était engouffré dans la brèche créée sur In a Bar, Under The Sea par Theme from Turnpike. Le morceau de dEUS, à l’époque diffusé dans les cinémas avant Trainspotting, contenait un sample de Mingus (Far Wells, Mill Valley). Mais c’est aussi l’amour d’Archie Shepp et de Pharoah Sanders, l’envie de renverser les barrières, d’effacer les frontières, qui transpire de ce concert. Accompagné d’un contrebassiste et d’un batteur, le duo, qui se produira le 19 juin à la Fête de la musique, parc du Cinquantenaire, propose une poignée de nouveaux morceaux qu’il s’en ira enregistrer fin du mois prochain pour un deuxième album à venir. Uber impatient…

Changement d’ambiance à l’Orangerie. Coup de soleil, vent des sables… Imarhan incarne avec un Kel Assouf la nouvelle génération du désertique rock touarègue. Deux guitares, basse, djembé, calebasse (cette demi sphère potagère)… Protégés du bassiste de Tinariwen qui a notamment produit leur premier album, les cinq musiciens du sud saharien plantés sur le devant de la scène en rang d’oignons sont encore plus convaincants en live qu’en studio. La rencontre entre l’Orient et l’Occident est ici moins méditative. Plus dansante et rugueuse. Un homme bleu en costume traditionnel est venu soutenir la communauté et se trémousse aux premiers rangs. La découverte, live, de la soirée.

Pour terminer à l’Orangerie où ont ouvert deux anciens musicos de Giant Sand et de Calexico reconvertis dans un groupe de rock psychédélique mystique arrosé de cumbia (solide son mais voix pas très convaincantes), Steve Gunn, qui jouait un an plus tôt à La Rotonde avec Kevin Morby, s’est arrêté présenter son nouvel album, Eyes on the Line, qui paraîtra le 3 juin chez Matador. Il se dégage toujours une atmosphère un peu particulière de ces concerts dont le public n’a jamais entendu une bonne partie des morceaux. Mais ceux de Steve Gunn ne sont pas de ceux qu’on chante ni danse. Inspiré par le blues, le jazz, le folk, Gunn sent les grands espaces américains. Les plaines à perte de vue. Décors dégagés dans lesquels il parvient malgré tout à nous perdre. Le New Yorkais de Philadelphie, pote de Kurt Vile (il a brièvement joué au sein de ses Violators), se situe quelque part entre un Kevin Morby et un Riley Walker. Si son nouvel album (on en reparlera) entre dans un format chanson plus traditionnel (titres plus courts et directs), le trentenaire revendique l’influence de La Monte Young, Michael Chapman, John Fahey… Les temps morts entre les morceaux (on ne déroge pas aux vieilles habitudes) ont beau donner au set des allures un peu décousues, Gunn vise juste et tire droit dans le mil. Ce Way Out Weather final valait à lui seul le détour. La fleur au fusil…

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