Nouvel album pour King Hannah: “Toutes nos chansons sont basées sur des histoires vraies”

Craig Whittle, moitié de King Hannah: "Quand j’entends des groupes raconter qu’ils font la fête tout le temps en tournée, je ne comprends pas comment ils y arrivent. Comment c’est possible? Après une semaine, 
j’aurais besoin et envie de rentrer 
à la maison." © Joséphine Leddet
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

King Hannah regarde l’Amérique à travers la fenêtre de son van 
sur un deuxième album inspiré, à la fois sombre et lumineux, folk 
et abrasif.

À la sortie de leur premier album, I’m Not sorry, 
I Was Just Being Me, ils donnaient les interviews depuis leur cuisine, à Liverpool. Pour parler de son successeur, Craig Whittle et Hannah Merrick, le duo King Hannah, ont fait le déplacement jusque Bruxelles. Lui, le guitar hero des temps modernes (sans jamais trop en faire), quelque part entre l’icône grunge et le folkeur des bois. Elle, avec son petit côté « Hope Sandoval rencontre PJ Harvey ».

Big Swimmer est un peu comme un carnet de bord ou du moins un journal de leur tournée aux États-Unis, où ils ont été témoins des plaisirs, des horreurs et des banalités du quotidien. « On n’avait jamais tourné en Amérique auparavant, commente Hannah. Et c’est tellement différent de ce qu’on en connaissait, de ce qu’on avait pu en expérimenter. On a voulu écrire sur ce qu’on y avait vu et vécu. On y avait déjà été tous les deux, mais pas ensemble. Chacun de notre côté, en vacances. »

« Devoir rouler pendant 8 heures d’un concert à l’autre nous a permis de voir le pays autrement. On a d’abord opté pour le motel. Tu as vu le film The Florida Project? C’était un peu dans le genre, mais en pire. Le motel n’était pas rose et il n’y avait pas de manager bienveillant. Du coup, on s’est rabattus sur des Airbnb qu’on a réservés au fur et à mesure de notre voyage. »

Profondément marqué par la pauvreté, King Hannah s’est retrouvé plongé dans les décors de Badlands et de Butch Cassidy and the Sundance Kid. Le duo a visité les ­Multnomah Falls dans l’Oregon et été voir l’œuvre de street art dédiée à Kurt Vile à Philadelphie. « Toutes nos chansons sont basées sur des histoires vraies mais on adore les films et les romans. » Craig rebondit: « J’aime beaucoup une citation, de l’écrivaine Flannery O’Connor je pense, qui dit que la fiction est plus vraie que la réalité. En gros qu’elle touche à la vérité, qu’elle permet de dépasser les faits et les souvenirs. C’est sans doute ce qui explique qu’elle aide tellement de monde. Et c’est quelque part ce qu’on cherche. ­J’espère en tout cas qu’on arrive à faire naître des images dans la tête des gens. Comme un Bill Callahan ou une Joni Mitchell. »

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Sheryl Crow, Television et Sharon Van Etten…

Craig et Hannah respirent la simplicité et la bienveillance. Ils se qualifient de faciles à vivre, raisonnables, professionnels et responsables. « Ennuyeux, on peut le dire… » Big Swimmer, leur nouvel album, est un appel à la résilience. Une métaphore pour mieux nous rappeler qu’on n’obtient rien en jetant l’éponge et nous inviter à ne pas abandonner nos objectifs et nos rêves. « La vie est ce que tu en fais. Tu peux sortir de l’eau et prendre ton essuie ou tu peux continuer à nager. »

À chacun de leurs albums, Craig et Hannah expliquent une à une leurs chansons. Leurs sources d’inspiration, leur confection, la perception qu’ils en ont. Ils font référence à Sheryl Crow et à Television pour New York, Let’s Do Nothing qui célèbre (avec un côté Dry Cleaning) une de leurs villes préférées. Ils expliquent que les documentaires criminels dont ils se goinfraient en écrivant le disque ont débouché sur Suddenly, Your Hand, qui parle de serial killers et de leurs traits de personnalité. Et précisent que Lily Pad est une ode au rock indé américain des années 90. Qu’il est inspiré par leur récent amour pour Built to Spill et adresse un petit clin d’œil à Slint.

« On a écouté un tas de trucs, rencontré plein de gens qui nous ont fait découvrir de nouvelles choses », explique Craig. «On s’est par exemple intéressés de plus près à Fugazi et on a découvert Built to Spill qu’on ne connaissait pas, poursuit Hannah. C’est embarrassant de l’avouer d’ailleurs. On s’est aussi mis à écouter davantage de country«  (le dernier morceau de l’album s’appelle John Prine on the Radio, NDLR).

Ces espèces de déclaration d’intention et de mini making of confirment aussi leur fascination pour le cinéma et la télévision. Hannah, qui dit avoir plus qu’un faible pour Ruben Östlund (Snow Therapy, The Square, Triangle of Sadness), a écrit This Wasn’t Intentional après avoir regardé Aftersun de Charlotte Wells. Le morceau Scully renvoie à X-Files. Et Davey Says fait écho à Rushmore et My Own Private Idaho. « C’est difficile de lier directement et concrètement nos chansons à des films. C’est plus une question de feeling général. Je pense à des trucs des années 70 comme Badlands, Five Easy Pieces. C’est assez abstrait. Disons qu’on essaie d’insuffler certains des sentiments qu’ils dégagent à nos morceaux. Nous voulons que nos chansons sonnent comme ces films si ça peut faire sens.« 

Les Liverpuldiens de King Hannah sont curieux. Ils nous demandent de noter dans un calepin les choses auxquelles on fait référence durant notre entretien. Big Swimmer est le disque d’un Mazzy Star du nord de l’Angleterre qui jouerait avec le folk apaisé comme avec le rock abrasif. Craig et Hannah voulaient qu’il sonne plus live et plus vrai que son prédécesseur. Pour arriver à leurs fins, ils ont embauché le producteur Ali Chant. « On aimait beaucoup ce qu’il avait fait avec Aldous Harding et PJ Harvey. Il a bossé sur des disques qui sonnent incroyablement bien. Il y a une vérité, une chaleur, une intimité qui s’en dégagent. Ça peut sembler stupide de dire ça, mais la guitare acoustique sonne comme une guitare acoustique. La batterie comme une batterie. »

Et Sharon Van Etten comme Sharon Van Etten. « Quand on a sorti notre chanson Crème brûlée, Sharon a écrit un commentaire à son sujet sur Instagram. On ne la connaissait pas. On l’a remerciée. On a échangé nos emails. Et on a toujours eu dans un coin de la tête l’idée de l’inviter sur un album. On l’a contactée et on lui a demandé si elle était d’accord qu’on lui envoie quelques démos. Elle a accepté et est revenue vers nous alors qu’on était en train de terminer le disque. Elle a enregistré ses voix dans son garage et nous les a envoyées. On ne l’a toujours pas rencontrée. On se disait d’ailleurs encore récemment que ce n’était peut-être pas elle. »

King Hannah sera en concert le 13/09 à l’AB Club (Bruxelles), 
le 14/09 au Reflektor (Liège), 
le 15/09 aux Leffingeleuren (Middelkerke) 
et le 17/09 à l’AFF (Hasselt).

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