Avec Pulsar, L’Impératrice rallume la piste de danse

Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Vraie bête de scène, L’Impératrice sort son troisième album, Pulsar. 
Au programme du groupe frenchy, une pop-disco-funk fun et sensible, le cœur battant sur le dancefloor. Explications à six voix, où il est question de Daft Punk, d’IA et de l’Homme à la tête de chou…

De l’autre côté de l’écran, ils sont tous là. La fenêtre de l’ordinateur est même trop petite pour les contenir. Forcément. L’Impératrice reste cette anomalie dans l’univers musical actuel: un groupe de six musiciens, sans vraiment de leader déclaré. Hors champ, Charles Dugros de Boisseguin (claviers) et Hagni Gwon (claviers) entourent David Gaugué (basse), Tom Daveau (batterie), Achille Trocellier (guitare) et Flore Benguigui (chant).

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

Assis dans les loges de l’émission Quotidien, ils sont venus lancer la promo de leur nouvel album, le troisième. Intitulé Pulsar, il sera accompagné d’une grande tournée. De fait, c’est sur scène que la pop-disco-funk-dance chromée du groupe prend tout son sel. Après le Primavera barcelonais, le week-end dernier, le groupe tournera un peu partout en Europe (à Ronquières cet été, à l’AB à la rentrée). Mais aussi aux États-Unis. Le mois dernier, ils étaient de retour à Coachella, le festival qui sert chaque année de baromètre pop. Charles: « C’est une proposition qu’on ne pouvait pas louper. Surtout pour une carrière comme la nôtre, encore en développement. Mais du coup, il fallait aussi justifier notre présence et arriver avec quelque chose de nouveau. Ce qui nous a obligés à enregistrer l’album dans une certaine urgence, à être plus directs et se faire confiance.« 

Bot bizarre

L’Impératrice est en effet devenue l’une des plus belles promesses d’export françaises, depuis Phoenix, voire Daft Punk. Le duo légendaire est d’ailleurs une influence revendiquée de la formation, avec qui il partage notamment le goût pour un certain rétrofuturisme. À ceci près que L’Impératrice ne se planque pas derrière des casques. Mais arbore plutôt des tenues spacey seventies façon Star Trek, signées Pierre Cardin, et joue sur des « vrais » instruments. Tom: « Quand Charles m’a proposé de rejoindre le projet en 2012, en tant que batteur, je m’étais déjà fait lourder de deux projets précédents, parce que ça coûtait moins cher de me remplacer par un drum kit. Du coup, j’étais surpris et flatté d’être convoqué pour refaire de l’ »humain ». » Sans pour autant pouvoir ranger L’Impératrice dans la catégorie des traditionnalistes technophobes. Hagni Gwon: « Pour reprendre l’exemple des Daft Punk, un album comme Homework, bricolé entièrement avec des machines, sonne, pour moi, plus « organique » que Discovery. »

Sur la pochette de Pulsar, un papillon vient se poser poétiquement sur la main d’une androïde. Tandis que sur Amour Ex Machina, Flore Benguigui chante: « Les robots pleurent aussi parfois« … Tout se passe un peu comme si L’Impératrice avait mis au point sa propre intelligence artificielle. Et puisqu’on en parle… Charles: « L’IA, pourquoi pas, si c’est correctement encadré. Après tout, chaque époque a connu ses indignations technologiques: l’arrivée des synthés, du sample… C’est vrai que si vous utilisez uniquement des outils numériques, votre musique aura tendance à être insipide. Mais à l’inverse, en vous braquant sur l’analogique, ça sonnera vite suranné. Ce qui est intéressant, c’est le mélange.« 

Révélation féminine

Sur Pulsar, le cœur de L’Impératrice bat donc au son du funk (Girl!, Sweet & Sublime, avec le rappeur US Erick the Architect), du balearic (Me Da Igual), de l’italo-disco (Danza Marilù, avec Fabiana Martone), de la city pop (Déjà-vue) ou encore de la soul, avec Any Way. Sur ce dernier titre, c’est l’Américaine Maggie Rogers qui tient le micro. Charles: « À la base, l’instrumental dénotait par rapport au reste. Du coup, c’était intéressant de pousser le contraste jusqu’au bout, en allant chercher une autre voix. »

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

De fait, le morceau tranche. Et souligne paradoxalement d’autant plus l’importance de Flore Benguigui dans le son de L’Impératrice. Un groupe de cinq garçons et une fille, mais qui a quand même réussi, avec son album précédent, Tako Tsubo, à se faire nommer aux Victoires de la musique dans la catégorie… Révélation féminine. Charles: « ça nous a bien fait rigoler. Mais après tout, puisqu’on s’appelle L’Impératrice…« 

Épanouie au sein du groupe, Flore Benguigui n’a jamais caché le sexisme qu’elle a pu subir dans ses groupes précédents. Ces dernières années, elle en a d’ailleurs profité pour aiguiser toujours plus son activisme féministe -par exemple à travers des podcasts (Cherchez la femme) ou l’organisation de soirées, etc. « C’est vrai que je suis plus investie dans le milieu militant. Mon engagement s’est solidifié. Mais uniquement sur mes réseaux personnels. Je peux l’appuyer éventuellement davantage dans les textes de L’Impératrice. Mais ça reste soumis à la validation de chacun. »

Variations sur Marilou

Charles confirme: « Au départ, j’ai envisagé ce projet comme de l’entertainment. Parce que c’est toujours comme ça que j’ai appréhendé la musique. Je n’ai jamais beaucoup écouté d’artistes « engagés », à part peut-être l’un ou l’autre album des Smiths. Donc, oui, quand j’ai créé ce groupe, je ne me suis jamais posé la question de ce que j’allais raconter, ni de ma responsabilité.« 

Flore Benguigi continue: « C’est clair que si l’un d’entre nous avait envie d’une chanson plus frontalement politique, il faudrait qu’on en discute. Après, j’ai une position particulière. Autant c’est difficile de faire passer un « message » avec une ligne de basse, autant c’est compliqué de ne pas le faire quand on utilise des mots. Même si l’idée est de parler des émotions. En tout cas, je ne voudrais plus écrire de textes qui n’ont plus de sens. Même un morceau aussi dansant et léger que Danza Marilù n’est pas complètement innocent.« 

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

En l’occurrence, le morceau envoie Marilù sur la piste de danse italo. Derrière le prénom, une femme d’âge mûr qui se libère des diktats sexistes-âgistes sur le dancefloor. Mais aussi une référence pas tout à fait innocente, à la Marilou de L’Homme à la tête de chou. Sur le plateau de Quotidien, Yann Barthès demande d’ailleurs: « Un hommage à Gainsbourg? ». Plutôt un « fuck à Gainsbourg, en ce qui me concerne », rigole Flore Benguigui, rappelant que l’album-concept se termine par un féminicide. 
Chassez le naturel… ●

L’Impératrice, Pulsar, distribué par Microqlima/Pias. En concert le 02/08 au Ronquières Festival 
et le 25/10 à l’Ancienne Belgique (Bruxelles).

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content