Le besoin de légèreté, quoi…

Avant d’être DJ Kwak, il est Philippe Coicou, citoyen belge de 45 ans, d’origine haïtiano-judéo-polonaise, père et mari. Au vu des dernières semaines, parler de musique lui paraît, encore et toujours, futile. In My Hard Drive S4E15.

Le besoin de légèreté, quoi...
© PC

Toujours pétrifié, même si moins que la semaine dernière, j’ai repris contact avec ma cave et son contenu, mes disques, mes platines. J’ai aussi fait l’acquisition d’un joli lot de deux cents disques en allant me promener dans la campagne carolo. Lot que je sélectionne soigneusement parmi cent mille vinyles répartis entre un garage non-chauffé et un grenier qui l’était à peine plus. J’y retourne au printemps, c’est sûr, n’ayant eu que le temps de l’effleurer, le renifler, je veux y plonger comme on plonge, corps et âme dans un bon article, bien écrit, pensé, argumenté; dans une histoire d’amour ou un excellent bouquin. Sans arrière-pensée aucune. La personne en question était un acheteur compulsif, ce qui donne un fatras de disques. Tout et n’importe quoi. Au vu du nombre, il y a de la qualité, bien entendu. Mais ce « tout et n’importe quoi » m’a rappelé la nécessité de retourner à mes bases. De même, tous les grands événements importants et/ou traumatiques, tant d’un point de vue personnel que politique m’y ramènent (décès du père, 11 septembre, tremblement de terre de janvier 2010 en Haïti, décès du frère).

Ma base, c’est la musique des parents. Jazz, blues, chanson française, musique classique et musique brésilienne, soul. Et puis mes premiers choix personnels, hard rock, métal, hip hop, funk. Mon identité, mes choix. Astérix en Corse et L’écho des savanes. Lucky Luke et Blueberry. Un terrain extérieur pour jouer au basket, une salle d’arts martiaux et un sac de frappe, la chronique judiciaire de Philippe Toussaint sur la RTBF le mercredi midi et les relevés colombophiles. J’aurais, d’ailleurs, donné pas mal pour récupérer mes cassettes des émissions Black Magic Plastik de Peter (du disquaire Arlequin) sur SIS, l’une des premières radios libres. Le bouquin de contes yiddish que me lisait ma grand-mère avec son inimitable accent polonais et ses gâteaux fourrés de Yom Kippour. Le besoin de légèreté, quoi, suite aux indicibles événements de Paris et l’ambiance lourde qui empeste l’air depuis lors.

De Miles Davis à Cameo en passant par Prince, Public Enemy, Otis Redding, Wilson Pickett, De La Soul, Big Daddy Kane, Sugarhill Gang, Grandmaster Flash, The Beatles, Serge Reggiani, Brel, Brassens, Ferré, Bob Marley & the Wailers, Motörhead, John Coltrane, Trust et Téléphone, Mingus, AC/DC; autant de raisons d’être de cette chronique hebdomadaire… Retrouver mes fondations, pour me ré-enraciner dans ce puant réel, pour pouvoir l’affronter, donner à mes mômes des explications qui soient substantielles et intelligibles pour eux, qui fassent sens à leurs oreilles, à leur questionnement. Sans être doctrinaire pour autant.

Je suis comme un os cassé qui se ressouderait de lui-même. J’ai passé une excellente soirée au Bar du Matin en compagnie d’une DJette française, nommée Caroll. Jouer, c’est la base. Soumettre un ami artiste ou une journaliste à la question, c’est la base. Être instinctif, c’est ma base. Lire des histoires à mon petit et jouer avec lui au jeu de l’oie ou faire un puzzle, c’est ma base. C’était chouette et ça fait un bien fou! Je reviens donc progressivement à la normale.

L’autre aide au retour de la normalité, c’est la perspective d’un voyage d’ici quelques semaines. L’évasion temporaire, cette nécessité aussi prégnante que l’air, la bouffe, l’eau, le sexe et la musique. Allez, je vous demande la route. En vous souhaitant une excellente semaine. Quoi que vous fassiez, faites-le bien.

Back To Niceness 17/01/15 (Sonzeira, Blu, Percussions, Flako, 7 days of Funk, Big John Patton, etc) by Strictly Niceness on Mixcloud

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