Critique | Musique

[L’album de la semaine] Anthony Joseph – Caribbean Roots

Anthony Joseph © Mirabel White
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

WORLD | Griot créole, poète urbain, le Trinidadien Anthony Joseph explore ses racines caribéennes sur un disque qui a le spoken word jazzy, exotique et funky.

Dans l’un de ses romans, Anthony Joseph questionne les origines africaines des ovnis. La terre a été détruite par des inondations et les survivants se sont réfugiés à Kunu Supia, une planète tellement chaude que seules les peaux les plus foncées peuvent y survivre et où s’est développée la contrebande d’une mélanine de synthèse… Personnage singulier né en novembre 1966 à Port of Spain, sur l’île de Trinidad, où il fut élevé par ses grands-parents, le chanteur-auteur-musicien-poète londonien s’est toujours intéressé à son passé et interrogé sur ses racines. L’histoire coloniale des Caraïbes, l’héritage amérindien et africain… Élu en 2004 parmi les cinquante écrivains noirs et asiatiques à avoir apporté une contribution majeure à la littérature britannique contemporaine, le père Joseph s’est imposé sur disque comme un brillant mélangeur de styles. Funk, soul afro-caribéenne, afrobeat, (free) jazz, soca, calypso, rapso (genre musical trinidadien politisé qui a grandi en même temps que le Black Power et les syndicats)… Ce Caribbean Roots ne déroge évidemment pas à la règle. Initié comme une collaboration avec le percussionniste guadeloupéen Roger Raspail (Papa Wemba, Cesária Évora, Kassav), le projet s’est mué en grand disque caribéen ayant pour objectif de rassembler les îles et leurs musiques sans pour autant les laisser perdre leur identité. Anthony Joseph se promène donc de San Fernando à Scarborough, de Kingston et des Abymes à Port-au-Prince et à La Havane pour livrer un de ces bouillants melting-pots dont il possède la recette secrète, évoquant l’histoire des Caraïbes mais aussi les réminiscences de personnages croisés à Trinidad.

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Deuxième album d’Anthony Joseph sans son Spasm Band, Caribbean Roots est un disque caméléon. Un disque qui change de couleurs et qui métisse son groove. Titre d’ouverture qui avoisine les dix minutes, The Kora commence comme une BO de film afro-américain à la Curtis Mayfield pour rapidement virer sur du spoken word à la Gil Scott-Heron et s’imprégner des ambiances locales. Jimmy, Upon That Bridge lorgne du côté de James Brown. Là où Mano a Mano sent bon les vacances au soleil. Fela, les Last Poets, Archie Shepp… Il y a de tout ça dans le monde merveilleux d’Anthony Joseph. Le saxophone de Shabaka Hutchings (The Heliocentrics), la trompette d’Yvon Guillard (Magma), la basse de Mike Clinton (Salif Keita), le trombone de Pierre Chabrèle (Creole Jazz Orchestra), le steelpan (ou tambour d’acier) de l’un de ses ambassadeurs Andy Narell jouent avec les ambiances et font danser dans les chaumières. Quelques sonorités à l’occasion plus cheesy ne tempéreront pas notre plaisir. Anthony Joseph est de retour, a des choses à dire et ne se prive pas pour les faire entendre. Ne vous reste plus qu’à danser en les écoutant.

DISTRIBUÉ PAR STRUT/V2.

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