Critique | Musique

Kavinsky – OutRun

© Marcus Herring
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

ÉLECTRO | Après le carton de Nightcall de la B.O. de Drive, Kavinsky sort un premier véritable album consacrant ses obsessions électro eighties.

KAVINSKY, OUTRUN, DISTRIBUÉ PAR UNIVERSAL ***

C’est ce qu’on appelle un joli dérapage contrôlé. En même temps que le film Drive cartonnait dans les salles de cinéma, le Nightcall de Kavinsky affolait les charts. Il faut dire que l’alliance des deux ressemblait un peu au mariage parfait: les images de Ryan Gosling, mains gantées, conduisant de nuit sa Chevrolet Chevelle 1973 blanche dans les rues de Los Angeles, sur fond de mélodies eighties, synthés millésimés et voix sous vocoder. Planqué depuis des années dans les marges de la French Touch, Kavinsky dégoupillait le hit XXL. Logiquement, il arrive aujourd’hui avec un premier véritable album. Le Français ne s’est pas embêté. Avec OutRun, il prolonge et affirme une formule qu’il connaît sur le bout des doigts. Pas question d’opportunisme pour autant: cela fait des années qu’il la concocte. « They’re talking about you, boy/But you’re still the same »

L’effet Doppler

Cela fait en effet au moins 6, 7 ans que Kavinksy traîne ses obsessions eighties dans la French Touch, frayant avec ses principales têtes de gondole. Il est notamment pote avec Daft Punk -pour rappel, Guy-Manuel de Homem Christo, moitié du duo casqué, co-signe Nightcall. C’est toutefois via Quentin Dupieux, alias Mr Oizo, que Kavinsky met d’abord le pied dans l’électro made in France. Jusque-là, Vincent Belorgey de son vrai nom (Paris, 1975) ne jurait surtout que par le rap ricain. « La techno, la house, tout ça, ça m’emmerdait. Le premier Daft Punk par exemple, je ne l’ai découvert que longtemps après, vers 2001. Par contre, je connaissais Quentin depuis longtemps. C’est un pote. Déjà au lycée, il venait me chercher pour brosser les cours, en narguant le préfet. Un jour, il m’a fait écouter un morceau d’Arpanet, l’un des alias de Dopplereffekt (ndlr: projet techno allemand aussi radical que mystérieux). C’était à la fois sombre et bizarre. J’ai pris une claque. »

On aperçoit donc d’abord Kavinsky sur la B.O. de Steak, le premier long métrage de Quentin Dupieux (dans lequel il joue également le rôle de Dan). Suivent une série de premiers EP, et déjà des obsessions bien affirmées que consacre OutRun, dès la pochette. Comme les années 80, les bagnoles (Testarossa Autodrive) et les jeux vidéo. Lancez Kavinsky sur ce dernier sujet, il en devient intarissable. « OutRun est forcément un hommage au jeu culte du même nom, sorti en 1986. J’y ai joué pendant des journées entières. En général, Sega reste pour moi la référence ultime en termes de gaming. »

OutRun est donc un disque de geek. Parfois noyé dans ses références et faisant apparaître -affichant même- volontairement ses limites. Album d’électro plutôt sombre, il convoque à la fois le côté régressif de Daft Punk, l’efficacité d’un Justice période + (Protovision), et le côté hargneux d’un Mr Oizo. Rien de révolutionnaire donc, ou de surprenant pour qui a suivi l’itinéraire de Kavinsky depuis le début. Mais OutRun est aussi un album de sâle gamin qui n’en fait qu’à sa tête, finalement convainquant dans son jusqu’au-boutisme et sa précision. Same player, shoot again…

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