
Giorgio Poi, Lael Neale, Maria Somerville, Viagra Boys : qu’est-ce qu’on écoute cette semaine?
Entre chanson italienne (Giorgio Poi) et dream pop éthérée (Maria Somerville), rugissements de guitare (Viagra Boys) et minimalisme rock (Lael Neale), tous les goûts sont dans nos sorties de la semaine.
1. Giorgio Poi – Schegge
On avait découvert le musicien romain en 2021, avec son disque précédent, Gommapiuma. Un petit bijou pop, venu nourrir idéalement nos fantasmes d’une musique italienne à la fois solaire et sentimentale. Des chansons f.aisant écho au vague à l’âme de l’époque et au désordre amoureux à coup de mélodies soyeuses et faussement légères – quelque part entre l’icône Lucio Dalla et le slacker nord-américain Mac DeMarco.
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Quatre ans plus tard, celui qui a étudié le jazz à la Guildhall School of Music and Drama de Londres et vécu plusieurs années à Berlin, remet donc ça. Et c’est toujours aussi irrésistible. Dès Giochi di gambe, Giorgio Poi soigne non seulement son jeu de jambes (…), mais surtout son nuancier de sentiments, avec une balade amoureuse aux reflets doux-amers. Plus loin, Tutta la terra finisce in mare n’a pas peur de mélanger grincements ironiques et refrain grandiose. On notera que Schegge – fragments en italien – a été produit avec l’aide de Laurent Brancowitz, guitariste chez Phoenix. Un groupe dont Giorgio Poi a fait la première partie, et avec qui il partage une même sensibilité esthétique, un même goût pour une musique à la fois cultivée et directe, élaborée et sincère. Cela s’entend de manière assez directe sur un titre comme Les jeux sont faits ou même Nelle tue piscine.
De son côté, le clavier interstellaire de Non c’è vita sopra i 3000 kelvin appuie la mélancolie éclatante de la mélodie. Il n’y a pas de vie en-dessous de 3000 kelvin, raconte Giorgio Poi, faisant référence à la température de couleur désignant généralement un « blanc chaud ». Ce qui correspond au fond assez bien à sa musique, dans ce qu’elle a de plus lumineux et enveloppant, reflet d’un certain spleen contemporain. En introduction de son disque, le musicien explique d’ailleurs la signification de son titre : « J’aime me sentir fragmenté, éclaté, emporté avec tout et tout le monde. Une éclat parmi d’autres éclats infinis ». Full sentimental…
Distribution Bomba Dischi. Le 10 mai à Pilar (Bruxelles)
La cote de Focus : 4/5
2. Lael Neale – Altogether Stranger
De retour à Los Angeles après avoir passé le confinement dans la ferme de ses parents en Virginie, Lael Neale s’y est sentie comme une extraterrestre découvrant une planète dystopique et a écrit ses nouvelles chansons comme une créature d’un autre monde témoignerait des étranges particularités de l’humanité. Composé et enregistré avec son compagnon Guy Blakeslee (Entrance) dans le calme californien des petits matins, Altogether Stranger est un disque tout en contraste habité par la solitude rurale et le chaos urbain. L’innocence joyeuse de l’enfance et la mélancolie existentielle de l’adulte. Une collection de neuf chansons minimalistes, raffinées, énigmatiques et magnétiques emmenées par sa voix hantée et son omnichord (instrument électronique qui ressemble à un orgue-jouet). John Lennon, Joni Mitchell, Dionne Warwick, les Spacemen 3, le gospel primitif américain et l’irrésistible pianiste éthiopienne Emahoy Tségué-Maryam Guèbrou auraient entre autres inspiré ce joyau. Beautiful stranger… ● J.B.
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Distribué par SubPop/Konkurrent. Le 17/05 aux Nuits Botanique.
La cote de Focus : 4,5/5
3. Maria Somerville – Luster
Fondé en 1980, 4AD fait partie de ces enseignes qui ont largement contribué à l’idée – devenue aujourd’hui nettement plus vague – de label. Soit celle d’un refuge pour artistes qui se retrouveraient peu ou prou sous une même bannière esthétique, partageraient les mêmes repères. Avec des groupes comme Cocteau Twins, This Mortal Coil ou Dead Can Dance, 4AD a ainsi longtemps passé pour l’un des berceaux d’une certaine musique cafardeuse, entre cold wave et dream pop. Entre-temps, le label a évidemment élargi sa palette. En signant une artiste comme Maria Somerville, impossible de ne pas se dire toutefois qu’il revient à ses fondamentaux.
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Basée aujourd’hui dans le Connemara, l’Irlandaise chante du bout des lèvres des mélodies folk brumeuses, flottant dans des vapeurs dream pop. Sur Luster, son 2e album, elle accueille ainsi l’auditeur avec le chant d’oiseaux gazouillant sur des nappes ambient et des notes de harpe en cascade. Sur Projections, la basse métallique et la batterie monotone rappellent volontiers les paysages les plus décharnés de The Cure, là où la mélodie apaisée de Stonefly remue profondément. Sur le tourmenté Violet, Somerville chante même : « I believe in life and love ». Magnifique.
Distribué par 4AD
La cote de Focus : 4/5
4. Viagra Boys – Viagr Aboys
A la veille de retourner l’Ancienne Belgique en mode bélier façon Idles/Amyl and the Sniffers, les Viagra Boys dévoilaient le 25 avril leur quatrième album sur leur tout beau tout neuf et propre label: Shrimptech Enterprises. Toujours enclin à dénoncer les travers du capitalisme, le groupe emmené par Sebastian Murphy prend (comme d’habitude avec beaucoup d’humour) son destin en main. Rien n’offre davantage de liberté que l’autonomie et l’indépendance…
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Coproduit avec son fidèle collaborateur Pelle Gunnerfeldt, Viagr Aboys (faut bien déjouer les filtres à spam) varie les plaisirs et comme Tangk pour Idles justement élargit le spectre de son univers et de ses envies. Si Man Made of Meat, qui s’inspire de ce que Murphy a observé en tournée aux Etats-Unis dans les supermarchés Walmart, et The Bog Body avec son saxophone fou conservent un tempérament clairement offensif, les Suédois calment un petit peu le jeu et s’offrent même des moments de subtilité pour mieux exposer le ridicule de l’existence et les anxiétés contemporaines.
Distribué par Shrimptech Enterprises. Le 17/08, au Pukkelpop.
La cote de Focus : 3,5/5
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