NEIL YOUNG SE RÉINVENTE À LA TÊTE D’UN ORCHESTRE SYMPHONIQUE. UN NOUVEL ALBUM DÉCEVANT QUI NE VAUT QUE PAR LES VERSIONS DÉPOUILLÉES DE SON ÉDITION DELUXE.
Neil Young
« Storytone »
DISTRIBUÉ PAR WARNER.
5
Il y a sept mois à peine, il sortait un album de reprises acoustiques enregistrées à Nashville dans le studio de monsieur Jack White et, pourfendeur de la « malécoute », vendait tel un marchand de tapis au South by Southwest texan son Ponoplayer, un baladeur numérique haute fidélité pour gens friqués. A pratiquement 69 ans (il les fête ce 12 novembre), Neil Young ne cesse de se réinventer. On l’a connu country « dude », folkeur angélique, rockeur psychédélique, pionnier du rock électronique (Trans), parrain du grunge, collectionneur de trains électriques, conducteur de corbillard et de voiture bio… A l’âge des pensionnés du futur, le Canadien déballe son disque symphonique. Le premier de sa carrière sur lequel il ne joue d’aucun instrument.
On pensait avoir tout vu et tout entendu du rocker farmer. C’était sans compter sur son goût du changement et son art du perpétuel contre-pied. Le natif de Toronto avait déjà enregistré deux chansons (A Man Needs a Maid et There’s a World) avec le London Symphony Orchestra pour Harvest au début des années 70. Puis, quelques années plus tard, il avait embauché une section de cordes de 17 membres pour le disque Comes a Time. Jamais néanmoins, il n’avait enregistré un album tout entier à la manière des crooners des années 50. Live in the room comme le faisait Frank Sinatra, Neil s’accompagne pour Storytone d’un orchestre symphonique de 92 musiciens, d’une formation plus réduite de 60 musicos et d’un big band. Aux grandes carrières, les grands moyens. Mais pas, cette fois, pour une grande réussite…
Romantique et environnementaliste
Certaines chansons s’intitulant Like You Used To Do ou I’m Glad I Found You, il est difficile de ne pas chercher çà et là dans les paroles de Storytone écho à la vie sentimentale du vieux Young qui, après 36 ans de mariage, vient de demander le divorce de Pegi et s’est, pour la petite histoire, entiché de l’actrice Daryl Hannah -icône des années 80 aux préoccupations vertes révélée par Splash et relancée par Quentin Tarantino grâce à Kill Bill. A côté de ses visées environnementalistes et de ses lamentations sur le mal causé à mère Nature (Plastic Flowers et ses faux airs d’After The Gold Rush, Who’s Gonna Stand Up), il s’en dégage d’ailleurs les pensées d’un homme à nouveau amoureux…
Cependant, ce qui domine, les dix titres durant, c’est forcément la grandiloquence: cette orchestration ample ne fonctionne que rarement et nuit finalement plus souvent qu’autre chose aux compositions du Loner. Anodin, Storytone ne vaut pour tout dire que par sa version Deluxe. Neil y propose les mêmes morceaux dans le même ordre mais en mode solo acoustique. Là, dépouillés, dénudés, enregistrés à la guitare ou au piano, ils retrouvent, ainsi que leur auteur, du moins par endroits, le charme de la vulnérabilité. Même si Glimmer continue d’évoquer brièvement le En Chantant de Michel Sardou… Si un jour vous voulez acheter un album tout beau tout frais pour ses bonus davantage que pour sa version originale, c’en est l’occasion. Et encore.
JULIEN BROQUET
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