Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

POUR LEUR SIXIÈME ALBUM, LES DANOIS DE MEW ACCENTUENT LE CARACTÈRE PROG DE LEUR ROCK, SOUS INFLUENCE NOTABLE DES VOCAUX SPATIAUX DE YES.

Mew

« + – »

DISTRIBUÉ PAR PIAS.

7

En avril 1997 paraît le premier album de Mew, 2000 copies à peine sur un petit label danois. Elles attirent les amateurs de dream pop emphatique: harmonies éduquées, mélodies saccharines, fleuves d’accords mineurs. Le titre She Came Home For Christmas et ses claviers pneumatiques ont tout du slow hivernal mais là comme ailleurs une guitare noisy perturbe la bienséance. Quasi deux décennies plus tard, le son s’est étoffé et stratifié comme s’il avait grimpé de plusieurs étages dans la fusée prog. « On dit d’habitude qu’on fait de l’indie pour stade, un mix entre le sentiment et la pensée »,déclare le groupe, fortement identifié par la voix de Jonas Bjerre Terkelsbol, pitch vocal élevé et goût pour les tessitures himalayesques. Bjerre naît en 1976, précisément à l’époque où le prog rock anglais sent déjà le sapin, enseveli sous ses propres exhibitions et bientôt ringardisé par la génération punk. Le fait que son chant rappelle très nettement la « gelée d’eunuque » associée au vocaliste de Yes Jon Anderson doit donc venir d’une expérience intra-utérine, maman Bjerre s’étant peut-être régulièrement éclatée aux 18 minutes 43 secondes de Close to the Edge.

Liturgie prog

Quoi qu’il en soit de la génétique prénatale, les premières notes de ce sixième album ramènent brutalement aux auspices seventies de Yes: hissée par-dessus des cumulus de claviers et de guitares lyriques, la voix de Bjerre joue volontiers de notes stratosphériques. Typiques de la liturgie prog qui consistait à challenger les musiques dites savantes, le classique en particulier: outre le chant, quelques autres appendices ramènent ces madeleines-là, notamment les accélérés de guitare tout en arpèges teintés de virtuosité affirmée. Ceux que pratiquaient Steve Howe ou, dans une veine plus jazzy, John McLaughlin. Ce qui distingue Mew du pur syndrome rétro-vintage embarrassant, c’est le format des chansons et la dynamique de production qui sonne comme une émanation 2.1. Une question de machines, de compresseurs et d’empilement de couches.

La musique évite aussi le travers majeur de l’ex-prog, à savoir la durée souvent grotesque de chansons se voulant symphonies pop, frôlant parfois la demi-heure. Ici, on est plus proche d’une charpente pop et des cinq minutes, même si Rows plonge au-delà des onze dans un rock épique,décongelé du cosmos seventies. Tellement décalé par rapport à 2015 que cela en devient -pratiquement- fascinant. Et pas seulement pour les quadras-quinquas éventuellement portés sur la nostalgie.

LE CONCERT DU 15 MAI AUX NUITS BOTANIQUE EN COMPAGNIE DE THE DO EST COMPLET.

PHILIPPE CORNET

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