Mort-la-loi – Trash en diable, Wanted est une plongée dans l’intimité des grands fauves. Un monde où les super-vilains ont atomisé tous leurs rivaux en collants.

Par Mark Millar et J.G. Jones, chez Delcourt.

Pour le scénariste Mark Millar, tout est parti d’un mensonge de son grand frère. Interrogé sur l’emploi du temps d’un Superman incapable de sauver la veuve et l’orphelin, le diabolique aîné a répondu:  » Superman a disparu dans une grande guerre avec tous les super-vilains. Superman, Batman, Spider-Man, Captain America, ils ont tous disparu dans cette énorme bataille et on ne les a plus jamais revus. » Détresse du cadet… et genèse d’une réussite.

Trash, cynique, ordurier, Wanted narre l’histoire de Wesley Gibson, un looser comme on en fait trop. Un beau jour, quelqu’un lui annonce que sa vie n’est pas sa vie, que son père est le plus grand assassin de tous les temps… et qu’il vient de mourir en lui laissant toute sa fortune.

Le début de Wanted joue résolument les anti- Harry Potter. Wesley – un clone d’Eminem – est emmené par Fox – un sosie de Halle Berry – dans les sous-sols de la Fraternité des super-vilains. Où il découvre que les plus grands bad guys de la Création ont éradiqué la partie adverse. Les héros encapés, du moins ceux qui n’ont pas été annihilés au terme d’une guerre (inter-)planétaire en 1986, ne sont plus que de pathétiques ombres d’eux-mêmes.

PERSOS BORDERLINE

La référence inversée au Watchmen génial d’Alan Moore et Dave Gibbons explose à chaque page. Le monde de Moore est une Terre trop humaine, où les vigilantes sont pour la plupart des hommes et femmes ordinaires qui ne peuvent plus rien contre la violence et la médiocrité. L’univers transdimensionnel de Millar est une réalité remodelée par les super-vilains dans leur propre intérêt – même si certains d’entre eux regrettent ce temps où, dans leurs costumes effrayants, ils menaient la danse macabre au grand jour.

Le duo Millar/Jones pervertit les codes du récit d’initiation, du conte et du comic, sous le dessin léché de J.G. Jones, un prof de peinture reconverti dans la BD. Son trait joue les contrastes absolus avec le ton de Miller, ses titres de chapitre outranciers (« Allez tous vous faire enc…! »), son ultraviolence gratuite, ses persos borderline (Tas-de-Merde, qui finira javellisé dans la cuvette des WC) et sa fin en forme de gifle au lecteur…

Le final, avec sa mise en abyme, compose un contrepoint passionnant au chef-d’£uvre de Moore. Là où ce dernier illustrait un vertigineux espoir pour l’avenir de l’humanité, Millar plonge dans la part d’ombre de ce mouton de Panurge qu’est forcément le lecteur de comics. Vous vous sentez visé?

www.editions-delcourt.fr

Vincent Degrez

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