Voir venir. Écrire l’hospitalité.

Elle est écrivaine, il est philosophe. Depuis l’explosion de ce qu’on a appelé la « crise des migrants », l’une comme l’autre n’ont cessé d’être interpellés par ce que tous deux voyaient se dérouler devant leurs yeux. Chacun à leur manière, ils ont décidé d’agir: lui en ouvrant la porte de son appartement parisien aux sans-papiers, elle en prenant sa part dans l’organisation des réseaux de solidarité qui s’étaient mis en place au Pays basque, où elle vit. Un jour, ils ont décidé de s’écrire -ou plutôt: de s’entre-écrire. De cet échange devenu un exercice à quatre mains, mais qui parfois n’en laisse distinguer que deux, indistinctement, Voir venir constitue le témoignage. C’est un témoignage sensible, rédigé au fil des circonstances et des voyages, sur des ordinateurs portables ou des smartphones, entre deux trains ou pendant une pause. Il y a des cris de colère, des réflexions froides, des moments de désarroi, des méditations suspendues, des silences. Il y a, aussi, une question éperdue, qu’aucune réponse ne vient jamais solder:  » Pourquoi? » Cette question hantait déjà les romans de Marie Cosnay comme elle hantait les essais de Mathieu Potte-Bonneville. Mais, dans Voir venir, elle prend soudain un tour plus fragile, plus modeste, presque brisé, comme si l’art et l’intelligence acceptaient de renoncer à leur souveraineté pour mieux dire le réel d’une horreur dont on ne veut plus.

de Marie Cosnay et Mathieu Potte-Bonneville, éditions Stock, 280 pages.

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