Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

CHAQUE ANNÉE, LE WIELS CONSACRE UN ACCROCHAGE À UN ARTISTE BELGE SIGNIFICATIF. À WALTER SWENNEN D’EXPOSER SON GOÛT POUR L’ABSTRACTION ET LE DÉTACHEMENT.

So Far So Good

WALTER SWENNEN, WIELS, 354, AVENUE VAN VOLXEM, À 1190 BRUXELLES. JUSQU’AU 26/01.

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Bénis soient ceux pour qui la peinture est une évidence. Ceux-là même qui noircissent à longueur de temps des toiles d’une main qui ne tremble jamais. Ces bienheureux touchés par la lumière oblique de la grâce savent quand la toile commence et, surtout, quand elle s’arrête, ce qui est loin d’être une sinécure. Disons-le d’emblée, Walter Swennen n’appartient pas à cette race des bienheureux du peindre. Né à Bruxelles en 1948, le plasticien incarne un art pictural éclaté et remis en question par un siècle en proie aux bouleversements -quelques séismes sont passés par là. Exposée aux nouvelles pratiques artistiques -les nouveaux médias, la performance…- et à la mondialisation, la peinture est en crise, sans cesse traversée par deux questions fondamentales-« que peindre? » et « comment le peindre? »- qui suspendent le pinceau au bord de la toile. Le parcours de Walter Swennen témoigne de ce doute ontologique -un scepticisme que l’on se plairait à qualifier de profondément belge si l’on ne se défiait pas de ce genre de stéréotype. Non, il n’a pas été appelé par la peinture. Adolescent, il se rêvait « philosophe indépendant » -au sens de « freelance »-, une profession de foi qui en dit long sur sa méfiance des pouvoirs en place. Par la suite, c’est en tant que poète qu’il débute au milieu des années 60, fasciné par le pouvoir des mots. Au début des années 80, il s’en éloigne -sans toutefois rien renier- pour explorer les possibilités poétiques de la peinture. Il se dirige vers l’abstraction, refusant le langage visuel spontané, chasse gardée de ses contemporains néo-expressionnistes. Impossible de faire autrement pour lui, qui considère l’acte de peindre avant toute chose comme un « malentendu ».

En marge

Cette approche pour le moins modeste va déboucher sur une oeuvre fascinante qui multiplie les emprunts à la culture populaire-bande dessinée, littérature internationale, dictionnaires bilingues, dessins d’enfants…- et qui fait se croiser abstraction et figuration. Parmi les faits remarquables, on pointe également l’exécution pseudo-naïve qui attire l’oeil du spectateur, tandis que le fond, moins facile à définir, aurait plutôt tendance à l’éloigner. Sans oublier les mots pour lesquels il garde une tendresse toute particulière, héritée de son immersion poétique ainsi que d’un goût prononcé pour la typographie dadaïste et la poésie graphique. En phase avec la densité du propos, l’exposition que lui consacre le Wiels -c’est bien entendu Dirk Snauwaert qui se charge du commissariat- brasse large, depuis les années 80 jusqu’à aujourd’hui. Ce, tant à travers des toiles en bonne et due forme que par le biais de petits formats et de supports décalés. On notera qu’il s’agit de la plus grande présentation de l’oeuvre de Swennen à ce jour, avec plus de 130 travaux empruntés à 75 collections européennes publiques et privées.

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MICHEL VERLINDEN

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