Un fils comme un autre

© National

Eduardo Halfon dessine immédiatement le fil rouge de ce nouveau bouquet d’histoires courtes en débutant par la naissance de son fils. Depuis la circoncision du nouveau-né jusqu’au décès de son grand-père, courant d’une histoire à l’autre, la filiation et le sentiment paternel seront sans cesse appréhendés, soupesés. Qu’il s’épanche sur les allergies qui lui pourrissent l’adolescence ou ravive un premier baiser, l’écrivain latino-américain creuse le sillon familier des rôles à adopter. Parmi l’herbier de souvenirs, sur l’artisanat de l’écriture, on cueille plusieurs belles pages sur sa transformation accidentelle en lecteur compulsif puis la découverte surprenante de sa vocation d’écrivain chez un acupuncteur… De quoi plaquer une carrière d’ingénieur au Guatemala: “De la même manière qu’un acteur shakespearien sait comment sortir de scène quand il est poursuivi par un ours -si je voulais être écrivain, il fallait que j’aille à Paris.” Parfois, dans le ballet des ellipses, le lecteur se trouve transporté au cœur du massacre du hameau de Dos Erres (Colombie) en 1982 ou face au souvenir des trains de la déportation. Puis le livre repart en apesanteur entre un détour par la cinémathèque de Bruxelles ou un dimanche de fable de l’Iowa, collectionne les feuilles volantes sur l’inconscient, le délibéré et l’accidentel. Au cœur des parenthèses (un épisode de confinement “dans un monde de plus en plus réduit”, un souvenir d’enfance où s’éteint le dernier tigre), toujours les pages d’Halfon nous ramènent du côté de la vie. Leur intelligence émotionnelle dégourdit les yeux et l’esprit.

D’Eduardo Halfon, éditions de La Table Ronde/Quai Voltaire, traduit de l’espagnol (Guatemala) par David Fauquemberg, 204 pages.

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