« Je n’écris pas du théâtre pour dénoncer la marche boîteuse du monde: elle est de notoriété publique. J’écris pour trouver en quoi nous sommes vivants dans tout cela… « Le propos est signé Jean-Marie Piemme, plume phare du théâtre belge francophone. Liège, sa matrice affective, présente un zoom sur lui, avec une table ronde et trois spectacles -dont Le Café des patriotes, repris par les étudiants du Conservatoire de Liège. Soit le récit de l’ascension d’un patron de café qui finira député d’extrême droite. A la loupe: « Nos comportements privés et collectifs face à l’idéologie fasciste. » Extrait du style Piemme: « Le loyer! Pourquoi tu me parles de loyer? Est-ce qu’on doit courir toute sa vie après un loyer? Et les portes du ciel alors? Et la pensée inouïe? Et grimper? Et briller? Celui qui baisse la tête, il est déjà mort, faudrait s’en souvenir! »

Les deux autres –L’Ami des belges et J’habitais une petite maison sans grâce, j’aimais le boudin– passeront aussi par le Théâtre de Namur, Wolubilis, Bozar (Bruxelles) et le Jean Vilar (Louvain). Le premier est un solo de l’excellent Fabrice Schillaci endossant le personnage d’un milliardaire français souhaitant s’installer en Belgique. Extrait: « …ma solidarité avec les Belges était sans faille, je les aimais sales, embouteillés, défigurés par une architecture nulle et sans RER pourvu qu’ils ne changent rien à leur dispositif fiscal…  »

Piemme a une écriture orale, une petite musique concrète au tempo « franc-parler » non sans fulgurances poétiques, personnages touchants, cruauté ordinaire et une bonne dose d’humour! Autant d’épices à savourer dans J’habitais une petite maison sans grâce… , adapté de son roman autobiographique Spoutnik, porté avec brio par Philippe Jeusette et Virginie Thirion. Dans une cuisine d’ouvriers liégeois, on découvre, au lendemain de la guerre 40-45, des ouvriers, des intellos, des cracheurs de bénitier, l’exposition universelle de 58, les braves de la province, les prétentieux de la capitale, la vie du gamin Piemme, son émancipation du monde des usines. Extrait: « … je n’oublie pas ce que tu m’as balancé quand maman t’a dit qu’elle était enceinte. Il (le père) avait grogné! Il avait pesté! Il avait hurlé: « Je n’en veux pas, on a déjà le chien! » »

Jean-Marie Piemme est passionnant à voir et à lire, lui qui écrit: « Une des vertus du théâtre réside dans son obstination à faire voir le visage contradictoire et tourmenté du réel, sa grandeur et sa bassesse, sa gravité et son dérisoire… »

FOCUS PIEMME, DU 04 AU 07/12 WWW.CITEMIROIR.BE, J’HABITAIS… DU 26 AU 28/12 À NAMUR, LE 10/03/15 À BOZAR.

L’AMI DES BELGES 26 AU 31/12 À WOLUBILIS+ DU 29/01 AU 04/02 AU THÉÂTRE JEAN VILAR. WWW.JEANMARIEPIEMME.BE

NURTEN AKA