L’un des papes des comiczines fête le 20e anniversaire de sa série King-Cat. Juste avant de partir en tournée aux 4 coins des Etats-Unis, John Porcellino a répondu à nos questions… et participé au strip de Max de Radiguès. Une exclu à découvrir en page de droite!

Chris Ware dit de lui que  » ses comics distillent, en à peine quelques lignes et mots, le sentiment d’être simplement vivant« . John Porcellino, né à Chicago en 1968 et actif dans la BD depuis… 1977, est une référence majeure aux Etats-Unis. Du moins, pour les dessinateurs adeptes du comiczine autopublié, photocopié et envoyé à la main aux abonnés. Le numéro 70 de King-Cat, Comics and Stories marque aussi le 20e anniversaire de cette « auto-revue ». L’occasion rêvée de l’interroger sur sa carrière, l’importance du zen sur son style, et sa pratique du souvenir comme moteur de la création.

Dans King-Cat, vous semblez moins rédiger un journal intime que revisiter vos propres souvenirs. Seriez-vous le Kerouac du comics?

Lorsque j’ai débuté King-Cat, cela ressemblait sans doute davantage à un journal intime. Je m’éveillais, vivais une expérience durant la journée, et la transformais en bande dessinée le soir. Aujourd’hui, je me retrouve à regarder en arrière et à écrire à partir de mes souvenirs. J’ai peut-être une bonne mémoire, mais je demande souvent aux personnes impliquées dans ces histoires, à mes vieux amis, leur vision de ces événements. Et très fréquemment, leurs souvenirs diffèrent fortement des miens. Il m’arrive d’intégrer ces autres appréciations.

Peut-on dire que la profonde évolution de votre style reflète l’arrivée de la pratique zen dans votre vie? Vers plus de simplicité: quelques lignes, parfois abstraites, une approche magnifiquement enfantine…

J’ignore à quel point cette évolution de mon dessin a été consciente. Je n’y pense pas vraiment. Avec le recul, je vois bien sûr mon style s’affiner. J’ai toujours été attiré par la simplicité et l’évidence dans l’art et la vie, qu’il s’agisse de cinéma, de littérature, d’art visuel, de conversation, etc. Il me paraît donc naturel d’avoir développé une certaine simplicité de trait dans mon travail. A coups de petits changements intervenant çà et là. La découverte du zen a été l’affirmation des manières dont je me sentais dans le monde qui m’entourait. Le zen a rassemblé ces impressions vagues, informes que j’avais eu toute ma vie et leur a donné une base solide. A un certain moment de votre pratique, cela devient simplement la façon dont vous vivez ou, dans mon cas, dont vous travaillez.

Seriez-vous donc d’accord avec cet adage: « Simplicité n’est pas facilité »?

Totalement, car il n’est vraiment pas facile de dessiner comme je le fais! Un artiste plus « élaboré » dessinera des choses visiblement plus complexes, du moins en surface. Mais dessiner avec simplicité requiert une attention vraie, une réelle maîtrise. Les lignes ne peuvent se cacher nulle part. Lorsque je dessine, je réalise que, si un seul trait est décalé d’un millimètre, cela peut totalement affecter la façon dont l’image est ressentie. Vous devez prêter attention à tout, c’est terriblement subtil.

Vous fêtez cette année le 20e anniversaire de King-Cat. Avec le recul, comment définiriez-vous ces 2 décennies… et les 2 prochaines?

Ma vie est très différente que lorsque j’ai commencé King-Cat à l’âge de 20 ans. Mais l’un des fils rouges de mon existence se compose précisément de ces comics. Dessiner constamment m’aide à garder les rênes de ma vie, même si elle change en permanence. Quant aux 20 prochaines années… j’ai déjà beaucoup de mal à imaginer le mois prochain! Si j’en suis capable physiquement, je continuerai à dessiner des comics. C’est l’£uvre de ma vie – et je suis un gars borné.

www.king-cat.net

Propos recueillis par Vincent Degrez

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