Lara tourne en rond – La nouvelle Lara Croft s’englue dans une formule vieille de douze ans. Son gameplay magistralement orchestré sauve les meubles.

Édité par Eidos Interactive et développé par Crystal Dynamics, âge 16+, disponible sur PC, Nintendo Wii, Nintendo DS, PS2, PS3 (version testée) et Xbox 360.Les formes sculpturales, les tenues moulantes et les poses provocantes de Lara Croft n’expliquent pas, à elles seules, son succès planétaire. Icône de la pop culture de la fin du 20e siècle, l’aventurière dépoussiérait il y a dix ans les codes créatifs, sociaux et techniques des jeux vidéo. La bimbo acrobate peut ainsi se vanter d’avoir popularisé la 3D (aux côtés de Mario 64) au milieu des nineties, aidant par la même occasion la vacillante Play-Station des débuts. Rayon gameplay, son approche inédite entre plate-forme, réflexion et tir a également fait mouche. Un remix de Mario 64, Myst et Duke Nukem 1 séminal pour les jeux de tir contemporains vus à la troisième personne.

Socialement, Lara cristallise aussi la conquête du joystick par les filles, joueuses comme développeuses. Haïe et adulée par les féministes, l’Indiana Jones à la taille de guêpe souffre du syndrome de la belle plante schizophrène. Traduction: le rôle de la femme dans les jeux vidéo se cantonnait jusque-là à celui d’un objet passif à délivrer (Mario et sa princesse). Lara Croft prend son destin en main, mitraille et combat mains nues. Mais reste un objet sexuel. Son tour de poitrine, les mouillages intempestifs de maillot et autres angles de caméra suggestifs en témoignent.  » Personne ne se soucierait de sex appeal s’il s’agissait d’un troll tout mouillé vu sous les mêmes angles. Lara Croft déploie une dimension sexuelle parce que vous la voyez ainsi. Lorsque j’ai montré le jeu à ma grand-mère, elle l’a simplement vue comme une charmante jeune fille« , rétorque sur la défensive Eric Lindstrom, directeur créatif de la série chez Crystal Dynamic.

Baby Doll conservatrice

Disparue des médias, Lara continue l’aventure sur consoles et PC. Tomb Raider Underworld, son neuvième opus, déploie un gameplay régressif. Las! Manettes en mains, on constate que Lara n’a presque pas évolué dans ses mouvements offensifs. Face à l’ennemi, impossible de se mettre à couvert façon Gear Of Wars 2. Impressionnants il y a dix ans, les joutes armées contre les dinosaures, tigres, requins et autres bad guys stéréotypés manquent cruellement de saveur face au dynamisme d’un God Of War. Les rares nouveautés comme le bullet time (la possibilité de ralentir l’action façon Matrix) n’y changent rien. Et de fait, Lindstrom avoue à demi-mot que dans ce gameplay triangulaire, l’exploration et les puzzles se montrent bien plus saillants que les combats.

Epoustouflante et parfaitement intégrée aux casse-têtes, l’architecture torturée des décors force le respect. Etriquées, gigantesques, in ou outdoor, il faut toujours parvenir à trouver la sortie d’une succession de salles en escaladant des murs, en s’agrippant à des corniches ou en sautant de pieu en pieu. Le tout pour parvenir à accéder à une suite de plates-formes haut perchées qui débloqueront généralement des séries de mécanismes ouvrant la sortie. Un dirigisme et une linéarité anachronique à l’heure où Grand Theft Auto prêche une ouverture permettant au joueur d’aller où bon lui semble.  » Ce débat d’un gameplay plus ouvert a toujours été latent chez nous. Il y aura forcément un moment dans la série où Lara déambulera dans des espaces vraiment plus ouverts. » On l’espère, car elle en a grandement besoin.

Michi-Hiro Tamaï

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