This Is It, documentaire sur les répétitions de la tournée avortée de Michael Jackson, sort dans les salles le 30 octobre. Autre chose qu’un coup de tiroir-caisse?

Dans un extrait disponible sur YouTube (1), on assiste au recrutement des danseurs de la tournée mondiale This Is It. C’est monté comme l’atterrissage des martiens et sonorisé avec la même délicatesse. Les jeunes corps chorégraphiés des recrues s’accordent tous la même confession: c’est-tellement-extraordinaire-de-devenir-danseur-de-Michael. A la fin de la séquence, un clampin annonce une surprise et Michael de débouler pour donner à ses 11 nouveaux disciples dansants, le fameux hug à l’américaine, plus simulé que voluptueux. Les 9 mecs et les 2 filles sont au bord de l’orgasme, c’est presque beau à voir. Mais si ces images sont l’indice de la température du film annoncé pour fin octobre, va-t-on visionner autre chose qu’un autel doré de superlatifs à la gloire du défunt King Of Pop?

La messe est dite

Quelques jours après la mort de l’idole, la multinationale Sony annonce avoir acheté les droits des images réalisées par AEG, promoteur des (défunts) concerts londoniens. La fulgurance de la décision n’a d’égale que le montant faramineux du rachat à AEG et la Fondation Michael Jackson – la famille, gestionnaire de l’héritage du Fils Prodige -, soit 50 millions de dollars. Sans doute l’avance la plus importante jamais déboursée pour un documentaire. Ce dernier était visiblement en cours puisque 100 heures de rushes – filmés en HD et son numérique – existent déjà des répétitions californiennes. Toujours sur YouTube, on peut en voir quelques échantillons, dont certains datent de l’avant-veille du drame (2).Deux minutes où Jackson et sa bande interprètent They Don’t Really Care About Us: Jackson, sobre en costard sombre et chemise rouge hawaïenne, semble en bonne forme même si ses gestes respirent l’économie. A peine s’il ouvre sa veste avec ce geste de violence exaspérée inauguré dans ses clips des années 80. Mais la captation est clairement celle d’une répétition: à la fin de l’extrait, on entend d’ailleurs le metteur en scène du spectacle, Kenny Ortega, dire  » laissez le temps aux applaudissements ». Ortega, également réalisateur du futur film, est un habitué des bluettes ados ( High School Musical, St Elmo’s Fire): voudrait-il exposer autre chose que le paradis jacksonien qu’il ne le pourrait pas… Contractuellement, le produit final ne peut pas  » montrer d’image négative de Michael Jackson ». Dès lors, dans quelle mesure ce genre de documentaire pourrait-il être autre chose qu’un artéfact pour fans, une variation sur le thème du plus grand, une hagiographie cinématographique bordée de rêves? Paraît qu’il y aura des interviews, du backstage, des surprises. Mais apprendra-t-on pourquoi et comment ce Roi déchu a été fauché en pleine opération de résurrection? C’est peu probable. En 1978, dans sa seule apparition au cinéma (3), The Wiz – une adaptation black du Magicien d’Oz –, Michael Jackson jouait le rôle d’un épouvantail: il s’amusait comme un fou, était encore noir et, semble-t-il, plutôt heureux. Dans This Is It, le dépindre en homme épanoui relèverait de la pure fiction, sinon de l’escroquerie.

(1) http://www.youtube.com/watch?v=OdcytuKhVQo

(2) http://www.youtube.com/watch?v=7qE22UOlQts

(3) si on omet son rôle central dans Captain EO, un 17 minutes en 3D réalisé par Coppola pour les parcs Disney.

LA CHRONIQUE DE PHILIPPE CORNET

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