This is Brittany

La chanteuse d’Alabama Shakes se fait la malle le temps d’un premier album solo personnel, éclectique et groovy.

C’est l’une des chanteuses avec le plus de coffre découverte dans le rock ces 20 dernières années. Brittany Howard, la voix d’Alabama Shakes, vient de se lancer dans l’échappée en solitaire. Solitaire? Tout se discute. L’Américaine tourne avec un groupe de huit musiciens. Mais elle a en tout cas décidé de revendiquer et d’assumer seule ce nouvel album. Un disque qu’elle sort donc sous son propre nom. Il faut dire que Jaime pourrait difficilement se révéler oeuvre plus intime et personnelle. Son titre, déjà, est le prénom de sa soeur aînée décédée suite à un rétinoblastome (une forme rare de cancer de l’oeil) à l’âge de treize ans. Brittany n’en avait que neuf à l’époque. La maison familiale ayant brûlé pendant la maladie, il ne lui reste que quelques photos de ce bout d’elle parti trop tôt. L’album ne parle de toutes façons pas de Jaime qui lui a appris à jouer du piano et l’a initiée à l’art de la poésie. Il parle d’elle. Explorant la spiritualité, la sexualité, les traumas du passé…

This is Brittany

L’an dernier, après deux albums et quasiment dix ans d’aventures qui les avaient emmenés de petits clubs moites aux scènes des plus grands festivals, leur avaient valu quatre Grammys et un concert pour les Obama à la Maison-Blanche, Howard a fait savoir à ses compagnons de jeu qu’elle avait besoin d’une pause.

Coup de foudre et rapport au divin

Brittany a grandi pauvre à Athens, dans l’Alabama, le sud rural des États-Unis. Père noir. Mère blanche. Elle le chante de manière déchirante dans Goat Head. L’histoire du morceau fait froid dans le dos et raconte le genre de souvenir qu’on n’oublie jamais. Quand, alors qu’elle était encore gamine, un inconnu avait crevé les pneus de la voiture familiale et déposé une tête de chèvre sur le siège arrière.

Howard avait déjà existé musicalement en dehors d’Alabama Shakes. En 2015, à la tête d’un groupe de hard rock: Thunderbitch. Puis en 2017, lorsqu’elle fondait avec celle qui allait devenir son épouse le groupe Bermuda Triangle. Avant de se lancer en solo, elle avait commencé à écrire ses mémoires et déjà plongé dans ses souvenirs. Georgia raconte un coup de foudre adolescent pour une autre fille. He Loves Me parle de son rapport au divin (« je sais qu’il m’aime encore quand je fume des blunts/qu’il m’aime quand je bois trop »). « We are all brothers and sisters », martèle-t-elle en mode Martin Luther King/Gil Scott-Heron sur 13th Century Metal. Rock, soul, funk, groove, country, gospel… Howard profite de l’occasion pour exploser les cadres. Baby et History Repeats se promènent du côté de D’Angelo et de Prince (son père était fan). Presence commence avec sa harpe comme une chanson de Joanna Newsom… À l’exception de Run to Me, son titre de clôture, à côté de la plaque, Jaime dévoile une palette qu’on n’imaginait pas si large. Sacré bout de femme que cette Brittany Howard…

Brittany Howard

« Jaime »

Distribué par Sony.

7

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