Hit by Hit – Retour sur The Hit et My Beautiful Laundrette, les deux pépites qui révélèrent Stephen Frears au milieu des années 80.

The Hit. De Stephen Frears. Avec Terence Stamp, John Hurt, Tim Roth. 1984. 1 h 40.

My Beautiful Laundrette. De Stephen Frears. Avec Daniel Day-Lewis, Gordon Warnecke, Rita Wolf. 1986. 1 h 33 .

Cinéaste d’une remarquable polyvalence, Stephen Frears a construit avec les ans une filmographie défiant toute tentative de classification. Tournant des deux côtés de l’Atlantique, le réalisateur britannique a su, par exemple, se réapproprier aussi bien l’héritage du western ( The Hi-Lo Country) que celui du film gothique ( Mary Reilly); réaliser de pertinentes chroniques sociales ( Dirty Pretty Things) qu’une non moins acérée étude du pouvoir (le mémorable The Queen, autour de la disparition de Lady Di); encore ne s’agit-il là que du volet le plus récent de son parcours.

Les deux titres ici réunis viennent opportunément remettre en perspective son travail, puisqu’il s’agit des films qui le révélèrent au milieu des années 80. Si Frears n’était alors plus totalement un inconnu (avec un parcours à la télévision britannique, mais aussi comme assistant de Karel Reisz et Lindsay Anderson, et même un premier long métrage, Gumshoe, tourné en 1972), The Hit et My Beautiful Laundrette lui apportèrent reconnaissance critique et succès public international, en même temps qu’ils contribuèrent à insuffler un sang neuf au cinéma anglais.

The Hit s’ouvre alors qu’un truand (Terence Stamp, plein de morgue) balance ses complices devant un tribunal. Dix ans plus tard, il coule des jours paisibles en Espagne, lorsque deux tueurs (Tim Roth, agité, et John Hurt, impassible) viennent l’arracher à sa retraite; direction Paris, où il devra payer pour sa trahison. Débute alors un road-movie ensoleillé et ensanglanté, qui verra bientôt le trio mal assorti renforcé par une jeune otage (Laura del Sol) n’ayant d’autre ressource pour en réchapper que tenter de monter ses « compagnons » de route les uns contre les autres.

Modèle de polar finaud et nerveux, The Hit n’a pas pris une ride. De l’interprétation, millimétrée, aux détours finement existentiels de l’intrigue – il n’est jamais question, ici, que d’attitude face à la mort -, en passant par la sécheresse de sa mise en scène, voilà en effet un film dont on savoure chaque instant. Even Bad Guys Have Bad Days annonçait la bande-annonce de l’époque, mais pour le plus grand plaisir du spectateur alors.

Drôle et sensible

Tourné à l’origine pour la télévision, avant d’être finalement gonflé en 35mm et distribué en salles, My Beautiful Laundrette n’est pas moins mémorable. Le film s’attache à deux jeunes homosexuels, Omar, un Pakistanais, et Johnny, son ami anglais, gérant une laverie dans le sud de Londres. Leur emboîtant le pas, de réussites éphémères en plans foireux, Frears signe une chronique drôle et sensible. Non sans livrer un portrait incisif de l’Angleterre des années Thatcher, entre troubles raciaux et culte contagieux de l’argent-roi – à défaut d’autre chose. En prise sur son temps, un film dont l’acuité ne s’est point démentie, soutenu, notamment, par un épatant Daniel Day-Lewis.

En complément, le réalisateur revisite cent ans d’histoire du cinéma britannique dans Typically British. Un document précieux, permettant de tordre le cou, avec le sourire mais non sans une appréciable érudition, à quelques préjugés – et notamment ceux d’un Truffaut, qui avait décrété l’incompatibilité entre les termes britannique et cinéma.

Jean-François Pluijgers

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