Terres voraces

Un roman court, qui prend à la gorge, effilé comme une lame de couteau. Lame qui assassine Bianca, fille adorée d’une mère célibataire vivant avec ses deux enfants, laquelle ne voit pas revenir la plus grande, partie chez des amis voir un match du Barça en Champions League, revêtue du maillot de son joueur fétiche: Lionel Messi. Ne pouvant accepter la volatilisation de l’adolescente, enlevée par les cartels mexicains, Lucia se met à fouiller les alentours, puis les forêts, à la recherche de dépouilles, de cadavres dans les charniers, les fosses où les assassins enfouissent leurs innombrables victimes, et finit par constituer dans son garage un véritable ossuaire. Glaçante histoire basée sur des faits hélas trop réels, le livre de Sylvain Estibal, qui vit en partie au Mexique, ne romance qu’à peine la réalité d’un pays dévoré par la violence extrême et une corruption endémique des institutions. Le romancier et son écriture au scalpel semblent endosser le rôle du photographe de son roman, lequel utilise son boîtier comme bouclier face à l’indicible que ses clichés révèlent. Un roman à la deuxième personne qui redonne chair aux anonymes squelettes de disparus, au Mexique, mais aussi ailleurs en Amérique latine dans un passé encore très présent, celui de diverses dictatures de droite. Un livre sidérant.

De Sylvain Estibal, éditions Actes Sud, 176 pages.

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