Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

L’IMPORTANT N’EST PAS LA DESTINATION, MAIS LE VOYAGE. LA PREUVE AVEC MATITI, PREMIER ALBUM EN APESANTEUR DE TEME TAN, ALIAS TANGUY HAESEVOETS.

Tout juste! Quelques mois à peine avant ses 30 ans, Tanguy Haesevoets sort son 1er album. L’homme a pris son temps. Pour flâner, se perdre et trouver finalement la bonne boussole. Il est des musiques comme des personnalités: certaines se déchiffrent comme un livre, d’autres comme une carte, donnant moins une direction à prendre qu’un ensemble de possibilités. Exemple: le duo Willerzie, avec lequel on a appris à connaître Tanguy Haesevoets, lors des sélections du concours Unsigned Music Talents 2010. Le projet est né de jams avec le batteur François Legrain, dans une baraque du village ardennais du même nom… Willerzie sera demi-finaliste, finaliste, puis gagnant du concours, avant d’être aussi vite mis sous l’éteignoir… Fausse piste. « Aujourd’hui, Willerzie n’existe plus », sourit Tanguy. Le véritable os à ronger s’appelle donc Teme Tan. Avec un récent album, Matiti, qui a le sens de l’aventure, croisant musique indé et rythmes afro, bossa, tout en dégageant une chaleur bienveillante, presque soul. Un véritable exercice d’équilibriste entre exploration des racines et envies d’ailleurs.

Kinshasa-Kyoto

Les racines d’abord. Père belge, mère métisse, Tanguy Haesevoets est né à Kinshasa, en 82. « Mes premiers souvenirs sont liés aux réunions de famille, à la musique congolaise. «  Sur la pochette de son album, un polaroid de lui, gamin. Le titre, Matiti, enfonce le clou de l’enfance, ce paradis perdu. « Les matiti, ce sont les buissons. On nous interdisait d’aller y jouer, parce que des serpents s’y cachaient souvent… Et puis, c’est aussi lié à ma grand-mère maternelle qui s’appelait Matinda. «  Tanguy a 6 ans quand la famille revient en Belgique, se fixant du côté de Walshoutem, coin paumé entre Hannut et Landen, entre Wallonie (il y fait ses primaires) et Flandres (ses secondaires). Ado, il se voit basketteur. Puis peintre. Un jour, à l’école, il est foutu dehors du cours de musique. Au lieu d’une colle, le prof, persuadé que l’élève maîtrise la guitare, lui donne 2 titres à jouer lors de la messe, la semaine suivante. « J’ai passé mon week-end à apprendre Wonderwall « , rigole l’intéressé… Et le Congo? Il n’y est plus retourné depuis 95, mais le lien, au moins familial, est resté. « C’est sacré. On a un lien très fort avec nos cousins là-bas, qui sont des amis, des frères pour moi. « 

Mais Teme Tan n’est pas qu’un exercice de thérapie familiale. Il est aussi branché sur les envies de voyage. Le nom du projet déjà. « Tan était mon surnom quand je suis parti en Erasmus en Espagne. Les gens avaient du mal à prononcer mon prénom en entier », sourit-il. A Grenade, il a emmené avec lui sa guitare, un laptop, suivi des cours de flamenco, passé un minimum de temps au cours, bougeant dès que possible… Et le Teme? « C’est du japonais. Cela veut dire: les yeux et les mains. Les yeux parce que je suis bigleux. Les mains parce qu’elles sont capitales pour moi: pour la guitare, peindre, jouer au basket… «  Mais pourquoi le japonais? « J’ai pris des cours, j’ai déjà été jouer là-bas avec mon premier EP, en 2009, via ma meilleure amie qui est japonaise. J’ai toujours été fasciné par cette culture, depuis que je suis petit. «  On fait remarquer qu’on imagine difficilement plus éloignées que les cultures japonaises et congolaises. « C’est vrai, en même temps, dans les sonorités, le japonais sonne parfois comme du lingala. Il y a également des liens entre le son du koto et celui de la guitare n’goni malienne. «  Fin de l’année, il se rendra d’ailleurs sur place, au Mali, projetant d’assister dans la foulée au fameux festival du désert. Teme Tan world tour…

TEME TAN, MATITI, TOPSY TURVY RECORDS. EN CONCERT LE 15/12, TRIX, À ANVERS; LE 16/12, AU SALON, SILLY.

LAURENT HOEBRECHTS

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