Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Adult Fan Club – Le Teenage Fan Club revient avec Shadows. Un 8e album sans surprise, si ce n’est la qualité imperturbable de ses mélodies pop. Conseillé.

« Shadows »

Distribué par Pema/Pias.

Le 17 mars dernier, Alex Chilton disparaissait, emporté par une crise cardiaque. Agé de 59 ans, il devait remonter sur scène quelques jours plus tard avec Big Star. Dans ces conditions, voir aujourd’hui revenir Teenage Fan Club, héritiers spirituels de la formation culte de Chilton, a quelque chose de particulièrement touchant. Comme une sorte d’hommage indirect à un groupe qui a posé les canons esthétiques de la power pop, ce genre qui n’en est pas vraiment un.

Début des années 90, les Ecossais de TFC incarnaient à merveille cet axe musical, gorgé de mélodies et de guitares saturées, de ch£urs sucrés et de paroles négligemment désenchantées. Ils appliquaient à la perfection la théorie des 3 B: Beach Boys, Byrds et Big Star. Un coup de billard à 3 bandes qui, quand il était gagnant, vous rendait l’existence un peu plus facile à vivre. Et vous obligeait du coup à préserver à jamais une oreille au moins curieuse à tout ce que le groupe allait produire -on doit bien cela à des gars qui ont été capables de pondre une chanson comme The Concept

Crochets mélodiques

Le groupe revient aujourd’hui avec un nouvel album, intitulé Shadows. Cela faisait 5 ans qu’il n’avait plus rien sorti -une paie. De cette longue période d’hibernation plus ou moins volontaire, le TFC, et ses 3 principaux cerveaux (Blake, McGinley et Love se sont partagé équitablement la paternité des titres), n’a cependant pas profité pour bouger les meubles. Et après tout, pourquoi le ferait-il? Tant qu’il garde assez de mélodies au frais pour contenter tout le monde… Or, l’air de rien, Shadows a de quoi faire, disque sans enjeu mais pas sans âme. Dès l’entame, Sometimes I Don’t Need To Believe In Anything pose d’ailleurs le débat: accords de guitares simplissimes, voix pastel, ligne mélodique attrape-c£ur, avant l’arrivée du refrain emphatique. Baby Lee enchaîne, pour ce qui ressemble le plus à un single éclair, celui qui n’a pas besoin de 3 écoutes pour faire mouche.

Avec le temps (l’âge?), le Teenage Fan Club appuie moins souvent sur la pédale de distorsion. Shock And Awe joue encore un peu là-dessus, mais la plupart du temps, Shadows donne dans l’acoustique, presque folk par moments. Sur certains morceaux, cela peut rendre la démarche plus anodine ( Live With The Seasons), s’il n’y avait à chaque fois le petit crochet mélodique ou la phrase qui fait mouche (« The Rolling Stones wrote a song for me, a minor song with a major key » sur When I Still Have Tee).

En un sens, TFC fait aujourd’hui un rock adulte, et assumé comme tel. Il ne changera plus rien au monde, sauf peut-être au vôtre -ce qui reste le plus important. Car in fine, la mission du Club n’a pas changé: investir le format pop à coup d’harmonies vocales et de mélancolies subtiles. Le poids du passé aurait pu épuiser cette veine. On a l’impression que c’est tout l’inverse qui arrive. Sur The Fall, McGinley répète ainsi en final: « J’allume un feu en dessous de ce que j’ai été/Je ne me sentirai pas triste, seulement réchauffé par la perte. »… l

Laurent Hoebrechts

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