Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

De Raoul Servais. 1 h 20. Dist: Twin Pics.

Le coffret a pour titre Les Trésors de l’animation. Et c’est bien de cela qu’il s’agit à travers une sélection de 3 £uvres aussi différentes que possibles, mais qui ont au moins -outre leur qualité- 2 choses en commun. Les Triplettes de Belleville, Persepolis et Taxandria partagent une originalité profonde et le désir d’ouvrir le public de l’animation aux adultes. Persepolis est sans aucun doute celui qui a marqué le plus, avec son Prix du Jury au Festival de Cannes, ses 2 César et des nominations tant aux Oscars qu’aux Golden Globes. Le film de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud fut l’une des réalisations majeures parues en 2007. Adapté des albums de BD autobiographiques publiés par Satrapi, c’est le récit sous forme de chronique d’une enfance passée dans l’Iran devenu théocratie oppressante. Marjane est née dans une famille qui a vécu le totalitarisme du Shah avant de subir celui des religieux fondamentalistes. Elevée dans l’amour de la culture et de la liberté, la gamine s’attirera quelques ennuis qui pousseront ses parents à l’envoyer poursuivre ses études en Europe, à l’âge de 14 ans… Autoportrait en mouvement d’une fillette puis d’une ado rebelle, Persepolis offre aussi une plongée dans une société iranienne en mal de liberté. Le noir et blanc épouse idéalement un trait ferme, décidé, personnel en diable. Les suppléments accompagnant le film sont très intéressants. Les scènes coupées surtout, parmi lesquelles on découvre une séquence de tentative de suicide avec coma et visions fantastiques, jugée trop noire et impudique par Satrapi.

La moitié de Taxandria

Au départ, Les Triplettes de Belleville devait être un court métrage! Mais la richesse d’inspiration de Chomet, et le succès rencontré par le Kirikou de Michel Ocelot, décidèrent les producteurs à tenter l’aventure du long. Bien leur en prit, car le film est une réussite absolue. Il raconte les mésaventures de Champion, un petit garçon recueilli par sa grand-mère et manifestant une passion fervente pour le vélo. Devenu coureur cycliste à force d’entraînement, il sera un as de la bicyclette, et participera au Tour de France. C’est là qu’il sera… enlevé par de mystérieux individus qui l’emmèneront aux Etats-Unis. Sa grand-mère traversant à son tour l’Atlantique… en pédalo, pour lui porter secours! Une histoire de fous, au style mélangeant réalisme et caricature avec un rare bonheur, et dont certaines séquences ont été réalisées par des animateurs belges.

Quand on dit belge, et animation, c’est le nom de Raoul Servais qui vient immédiatement à l’esprit. Et le fantôme de son grand projet en collaboration avec François Schuiten, Taxandria, qu’inclut le coffret avec des bonus du plus vif intérêt. Fable sur le conservatisme, la censure et le culte du présent absolu dans une société imaginaire excluant aussi bien l’art que toute référence au passé ou à l’avenir, ce film ne put pas être achevé selon les plans de son auteur. Les producteurs refermèrent en effet leur bourse alors qu’un peu plus de la moitié du travail était accompli, pour finalement sortir une version incomplète de ce qui aurait pu être un petit chef-d’£uvre. Tourné en « servaisgraphie », procédé révolutionnaire permettant (avant le numérique) de mêler prises de vue réelles et animation, Taxandria est traversé d’instants géniaux, plus forts que les regrets.

Louis Danvers

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