Sur la road

© Pippa Ungar

Le musicien-producteur Pascal Gabriel fait appel à son alter ego, Stubbleman, pour un album confectionné comme une BO ambient d’une virée américaine.

« Mountains and Plains »

Quel est le point commun entre les Razors, punks namurois actifs 1977, Kylie Minogue, Miss Kittin, Marc Almond et Bebel Gilberto? La réponse, sur cette page, s’appelle Pascal Gabriel, auteur-compositeur-mixeur-producteur travaillant depuis les années 80 dans des zones très diversifiées de la pop et de l’électronique. Belge de naissance -il est de 1956-, après avoir tâté de la binaire avec les Razors, Gabriel s’installe à Londres, où ses talents protéiformes vont s’exercer notamment en coécrivant/produisant l’acid-house Theme from S-Express, numéro 1 britannique en avril 1988. Dans la foulée du Beat Dis de Bomb The Bass, co-composé avec Tim Simenon. Le joli paquet de cash ramassé permet dès lors à Gabriel de faire du pointu -Claudia Brücken de Propaganda- ou de travailler sur des projets davantage commerciaux avec Debbie Harry ou EMF. Trente ans et un copieux CV plus tard, Gabriel se rappelle sa belgitude via cet album sous l’étiquette Stubbleman qui sort dans la collection Made to Measure de Crammed Discs. Département de la firme de Marc Hollander, très actif dans les années 80-90, où les disques instrumentaux brassent large, des incongruités de Daniel Schell aux BO des films de Jim Jarmusch signées John Lurie, membre du groupe new-yorkais Lounge Lizards.

Sur la road

Sur mesure

C’est précisément depuis New York que Gabriel a démarré un périple en voiture qui lui a fait traverser quinze États pour arriver à Los Angeles. Armé d’un enregistreur numérique, il a pris au fil des semaines de voyage, des notes sonores dans les natures et météos les plus diversifiées. Rentré à son studio au pied du Mont Ventoux -il vit entre là et Londres-, il a travaillé une musique qui intègre la vaste récolte américaine dans ce qu’il est convenu de nommer ambient. Au moins depuis la parution du Music for Airports de Brian Eno en 1978. L’intention de Stubbleman est semblable: laver les scories et les griffes du quotidien, via un liquide sonore ambiant, purgeant l’anxiogène et les menaces de burn-out. Tout en prenant soin en pochette de contextualiser chacun des onze instrumentaux en citant leur source d’inspiration géographique: on entend donc l’eau couler à la fin de Moonstone Beach, un curieux sifflement traverser Great River Road ou encore une forme de voix lointaine, toujours extraite des found sounds, hanter Piety Wharf. Avec à peu près aucune connotation de l’habituel road-trip ricain: on a davantage l’impression d’être au Népal ou dans les plaines de Mongolie. Le tout en laissant une large place au piano et aux synthés modulaires qui, dans Highway Sixty Something ou South 61 West 14, s’emballent dans des bacchanales a priori peu ambient. Preuve peut-être que le genre est devenu bien moins étanche au reste des familles sonores qu’on peut le penser.

Stubbleman

Distribué par Crammed Discs.

7

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