Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

KNOCK ON WOOD – L’ALBUM DU GUITARISTE BIS DES STONES MÉRITE UNE SÉANCE DE RATTRAPAGE. SA GOUAILLE OLD SCHOOL DESCEND BIEN LA PENTE, MÊME SI RONNIE A ARRÊTÉ LA BIBINE.

« I FEEL LIKE PLAYING »

DISTRIBUÉ PAR PIAS.

Sorti à l’automne, le disque a injustement poireauté sur la pile du bureau, quelques semaines, plus si affinités. Une nouvelle livraison solo du sexagénaire Wood ne nous était pas apparue d’une urgence folle. D’autant que le titre est simplet et la couverture faite d’une vilaine turpitude de couleurs criardes: l’£uvrette signée Wood a sans doute contribué à faire croire à une dispensable série B. Et d’une certaine façon, l’album est bien en deuxième division, médiatique en tout cas, assez loin des atermoiements Inrocks, de la mode brooklynienne et autres gloires passantes boostées par le NME. On serait donc plutôt dans le pré(cambrien) que dans le post(rock). On le comprend dès la première phrase du morceau d’ouverture ( Why You Wanna Go And Do A Thing Like That For) où Wood met en place sa scénographie musicale:  » I hear that old coyote howlin’ at the moon », annonce-t-il . Non seulement la chanson est de lui -comme 9 des 11 autres- mais elle semble parfaitement autobiographique. Le coyote a terminé sa huitième et dernière en date cure de désintox début 2010 (pour alcoolisme aggravé): il est aujourd’hui content d’hurler à la lune, en compagnie de copains passés aux sessions (Flea, Slash, Billy Gibbons). Wood livre Lucky Man ou Forever, avec la même humeur laxe et gommeuse où la décontraction n’est que l’autre face convenue de la jouissance.

De bons restes

La sonorité est définitivement old school, terme trompeur qui peut définir un bout d’ennui de star bénéficiant d’un lourd marketing ou un vrai bon disque concocté en recette gumbo. Avec plus de viande que de couenne au menu. Wood (63 piges) est définitivement dans la seconde option, épiçant la marmite mais pas trop. Et d’abord, il chante beaucoup mieux que son modèle Keith Richards, le supplément de justesse virant facilement à la confession soul. Wood a d’ailleurs le personnel ad hoc au rayon rouages: le bassiste Darryl Jones et le vocaliste Bernard Fowler -tous 2 employés de la maison Stones- lubrifient la matière rock d’accents bluesy, rhythm’n’blues ou reggae. Comme dans Sweetness My Weakness qui a la fraîcheur Jah des années new wave: presque puritain dans son désossage jamaïcain, le morceau est irrésistible. Hormis la présence de son vieux complice des Faces -Ian McLagan- Wood bénéficie aussi de représentants de la dynastie néo-orléanaise des Neville et de l’impérial Bobby Womack. Sur le meilleur morceau, Spoonful, le groove s’installe et le funk se durcit, câlinant 5 minutes 36 secondes caoutchouteuses. L’ensemble maintient son envie comme la nôtre, jusqu’au bout de la douzième plage, ballade stonienne qui s’essaie avec conviction à la mélancolie. Cet album, où même les solos de guitare ont de la présence ( I Gotta See), est le meilleur de Wood depuis ses 2 premiers parus en 1974-1975. Et le résultat est indéniablement charmeur.

PHILIPPE CORNET

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