Dernier-né de l’union rock et cinéma: le concert live sur grand écran. Comme celui de Robbie Williams, retransmis le 20 octobre, dans 200 salles de 10 pays européens, en direct par satellite.

L’initiative s’inscrit parfaitement dans l’époque virtuelle: diffuser un événement live par le biais des canaux électroniques. Ce n’est plus la moustache de Susan Boyle qui fait sauter les plombs de YouTube mais le sourire de Robbie Williams qui mange du grand écran comme un rêve d’orthodontiste. Deux différences, de taille justement, s’imposent d’emblée: le fait que le second événement soit du direct clé sur porte et que cela se passe en version XXL. Pas juste en télé comme le Live Aid, ou sur écran ciné mais avec 1000 fois moins de battage comme l’opéra. Entre l’écran du Kinépolis – refuge belge de la performance de Williams – et celui de votre computer, on laissera l’avantage qualitatif au premier. Pour le son, le 5.1 garantit que la prestation de Robbie – aux BBC Electric Proms – chauffe vos oreilles à coups d’infra-basses et de murmures funky. La captation, à l’anglaise, manucurée jusqu’aux mouvements de la Louma, est prompte à saisir les détails qui comptent, notamment ce fameux sourire bébé tigre de Robbie, auquel on aurait fait pousser une rangée de dents supplémentaires. Le cinéma – plus que la télévision et Internet – expose au mieux les prises de vue digitales en HD, dont la qualité atteint désormais celle du 35 mm. Voire plus. La retransmission du concert – depuis la Roundhouse londonienne, 2000 places en configuration assise, 3000 debouts – est d’autant plus événementielle que Monsieur Williams y présente les titres de son tout prochain album encore inédit (1) dans des conditions uniques d’intimité. Le buzz propagé autour de la retransmission est d’ailleurs la première marche de l’imposant escalier marketing bâti autour du disque.

Sans surprise

Et puis le cinéma a toujours utilisé son espace pour englober le spectateur dans sa narration la plus intime: le rock, passé aux stades et au consumérisme géant semble opportunément s’en rappeler. D’autant que le film rock classique en salles est peu fréquent, pour ne pas dire en voie d’élimination. Sauf quand il sort l’artillerie lourde 3D comme U2 en 2008. Et puis, argument imparable, le ticket pour une séance Kinepolis est certes plus cher qu’une projection usuelle -15 euroeuros – mais pour ce prix-là, la seule place de concert achetable, se situe au parking voisin de Forest National ou du Sportpaleis. Et les risques de se faire doucher façon Werchter sont plutôt limités indoors. Alors que des avantages? Non, parce que le spectateur ne décide pas de ce qu’il veut regarder, ne sachant rien de ce qu’on ne lui montre pas: pendant un break de guitare, la star peut malencontreusement chuter sur une olive – glissée de son martini Dry – et le réalisateur aura tout le loisir d’omettre un plan embarrassant. Technologiquement parlant, ces directs par satellite (…) peuvent bluffer, mais ils participent aussi à une façon toujours plus marquée de présenter un spectacle où la surprise est contingentée, à distance, sous surveillance. Comme d’autres caméras, fameuses, qui peuplent les villes. Pour rappel, c’est le 28 octobre que sort chez nous le film posthume de Michael Jackson. Ce n’est pas du direct – pour cause – et là, on connaît déjà le dénouement…

(1) Reality Killed The Video Star sort chez EMI le 9/11.

LA CHRONIQUE DE PHILIPPE CORNET

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