C’est LA question qui tue du moment. Après quelques mémorables mais vaines tentatives de nous en mettre plein la vue (dès les années 50 avec L’étrange créature du lac noir de Jack Arnold), la 3D va-t-elle enfin dépasser le stade de bête de foire technologique? Les oracles nous le prédisent depuis trois ans mais cette fois-ci, le fruit semble mûr. Au premier rang des adeptes des images shootées aux anabolisants, on trouve bien sûr l’industrie du cinéma, aiguillon depuis toujours d’une technique susceptible de rameuter vers les salles (équipées) les ouailles égarées devant leurs écrans plasma ou communiant avec ferveur sur le Net. Après Volt ou Up, qui a usé du procédé avec subtilité, sans chercher donc à balancer une locomotive lancée à plein régime dans le visage du spectateur à chaque plan, une batterie de films en trompe-l’£il se profilent à l’horizon. Pas plus tard que la semaine prochaine, le conte de Noël A Christmas Carol de Robert Zemeckis fera tourner les têtes des petits et grands (voir critique page 28). Un hors-d’£uvre avant le plat de résistance annoncé pour le 16 décembre prochain – roulements de tambour… -, le Avatar de James Cameron. De l’aveu même des professionnels de la profession, le succès ou l’échec de ce projet pharaonique déterminera l’avenir d’un format certes spectaculaire mais qui doit encore prouver qu’il peut être autre chose qu’un simple gadget bling-bling. Sans vouloir jouer les oiseaux de mauvais augure ou annoncer un scénario à la… Titanic, les premiers extraits qui ont parcimonieusement filtré sur le Net laissent sceptique. En 2D, la faune bleutée, très fantasy, imaginée par le réalisateur ne convoque pas les superlatifs. Mais bon, on jugera sur pièce comme on dit. A noter que les studios, qui ont également dans le four le prochain Burton, le très attendu Alice in Wonderland, ne sont plus les seuls dans la course au relief. L’emballement est général. La publicité s’est déjà convertie au standard (pour le cinéma notamment) et la télévision fourbit ses armes en coulisse. Les tiroirs des chaînes et des fabricants de téléviseurs fourmillent de projets estampillés 3D: écrans et lecteurs DVD « 3D ready » (premières livraisons annoncées pour le courant 2010), diffusion de matchs de foot avec des joueurs qui évoluent quasiment dans le salon, etc. On ne voit pas ce qui pourrait encore freiner l’essor des images stéréoscopiques. La technologie est arrivée à maturité. Avec la nouvelle génération de lunettes à cristaux liquides, exit les maux de têtes et cette désagréable impression que quelqu’un veut essorer votre cerveau. Mais surtout, les jeunes n’ont plus les réticences de leurs aînés à l’égard des images virtuelles. Biberonnés au Net et aux jeux vidéo, ils investissent émotionnellement les reflets du réel comme s’il s’agissait de ce réel. C’est le syndrome Tamagotchi. Pour preuve, ce concert « donné » à Paris il y a deux semaines par les clones holographiques de Tokio Hotel devant un parterre de fans en délire. De vrais groupies qui se prosternent devant un jeu savant de lumières… Bienvenue dans la quatrième dimension!

Par Laurent Raphaël

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