Un bon conseil: à côté de l’événement Lil Wayne, les amateurs de rap (et les autres) ne devront pas rater le concert de Q-Tip, aux Ardentes.
Le rap a toujours hésité: danser ou revendiquer? Musique de fête ( Rappers Delight) ou de protestation ( The Message)? Facteur d’aliénation ou d’émancipation? Dès le départ, le rap a louvoyé. Pour le meilleur et pour le pire.
Le meilleur, c’est, par exemple, A Tribe Called Quest. Formé à la fin des années 80, en plein âge d’or du rap, le groupe du Queens a toujours tiré vers le haut. Dix ans, cinq albums – dont au minimum deux classiques -, des tubes aussi (Can I Kick It?). Rien à jeter ou presque. Une carrière exemplaire qui s’était achevée en 98. Depuis, on n’avait que de trop rares nouvelles de ses trois membres. L’an dernier pourtant, le groupe se reformait pour une unique tournée américaine. Dans la foulée, Q-Tip, figure centrale du trio, annonçait la sortie d’un deuxième disque solo (neuf ans après Amplifier). Le jour de l’élection d’Obama déboulait l’album The Renaissance…
Soul system
Que cherche-t-on finalement la plupart du temps dans un disque de hip hop? Voire dans la musique tout court? Certainement à ce qu’elle arrive à bousculer sans agresser, à combiner accessibilité et expérimentation. Cela, The Renaissance y parvient à merveille. Rencontré dans les coulisses de l’AB, juste avant un concert proprement explosif, celui qui est né Jonathan Davis (le 10 avril 1970), expliquait: « J’essaie juste de faire de la musique qui… parle à mon âme. C’est la porte, le filtre. C’est pour cela que j’essaie de ne pas trop intellectualiser. Les gens peuvent penser la musique, d’autres la sentir. Je crois que je fais les deux. Mais à la fin de la journée, je laisse le feeling l’emporter sur la réflexion. » On lui fait pourtant remarquer que c’est le visage caché derrière une machine (un MPC) qu’il apparaît sur la pochette de Renaissance. Par ailleurs, son (autre) surnom reste tout de même The Abstract… « Depuis une quarantaine d’années, avec les premiers ordinateurs, il y a une fascination pour les machines. Quand on en vient à la musique, elles sont pourtant toujours dépeintes comme stériles. Même avec des exemples comme Kraftwerk, Depeche Mode ou Daft Punk… Il faut les voir comme des outils, une cuillère pour remuer le café, et essayer d’y glisser un peu d’humanité. C’est ma quête. C’est ce qui est documenté dans toute ma musique… « Au collège, Q-Tip était déjà intéressé par l’électronique et l’informatique. Un peu comme le précurseur Grandmaster Flash, idole qui a accueilli Q-Tip sur son dernier disque. « C’est vrai, on en a parlé d’ailleurs… Flash, c’est vraiment l’un des pionniers. C’est notre Chuck Berry, l’équivalent d’un Muddy Waters pour le blues, d’un Charlie Parker pour le Be Bop. AfrikaBambaataa serait Dizzy Gillespie, Kool HercMiles Davis… « Et lui, où se voit-il? Il sourit, et évacue la question. Après réflexion, on se dit que Lester Young fera parfaitement l’affaire…
u Le 10/07, aux Ardentes, Liège. Q-Tip,
The Renaissance, Universal.
Laurent Hoebrechts
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