LEUR NOUVEL ALBUM SOUS LE BRAS, LES KILLS SE PRÊTENT POUR FOCUS À UN PETIT TEST ADN.

Les Black Keys ont recruté du renfort. Les White Stripes mis la clé sous le paillasson. Mais pour les Kills, qui sortent cette semaine leur 4e album, Blood Pressures (lire la critique page 35), le rock se vit toujours à 2. Rien qu’à 2. Jamie Hince -Hotel- futur mari de Kate Moss, est anglais. Alison Mosshart -VV- qui fait mumuse avec Jack White dans Dead Weather, américaine. Les Kills, eux, sont-ils plutôt Union Jack ou Oncle Sam? La réponse est dans leurs gènes…

Musique

Jamie: « Sur ce nouvel album, Alison a tapé dans ses racines américaines. Et moi dans mon identité anglaise. Inconsciemment, je pense. Ces derniers temps, j’ai écouté pas mal de Roxy Music. Brian Ferry vient d’un milieu ouvrier sans le sou et il s’est réinventé en nouvel aristocrate. Je le trouve très british dans sa bizarrerie. La première musique que j’ai entendue venait d’Afrique où j’ai passé quelques années de mon enfance mais à l’adolescence, je n’écoutais que de l’anglais. Du punk pour commencer. Puis des trucs à la PJ Harvey. J’ai pris plus tard la direction des Etats-Unis.  »

VV:  » Ils t’ont laissé entrer? »

Jamie:  » Oui. Ils m’ont même permis d’écouter leurs groupes. Ils m’ont donné une semaine. Une semaine « to listen to some music  » (avec un accent du cul-terreux). Et j’ai aimé. J’ai aimé leur rock’n’roll. J’ai aimé leur blues.  »

VV:  » Perso, Fugazi est le premier groupe à avoir sérieusement bouleversé ma vie. Je devais avoir 11 ou 12 ans quand j’ai entendu ces gars pour la première fois. Ils m’ont scotchée. Je voulais écouter toutes leurs chansons. Voir tous leurs concerts. Tout savoir à leur sujet. Quand j’étais à l’unif, j’ai profité de vacances pour les suivre en tournée avec ma voiture à travers les Etats-Unis. J’aurais sans doute pu mourir heureuse en passant mon existence à voir Fugazi tous les jours mais j’ai rencontré Jamie qui m’a fait découvrir 95 000 autres groupes. Il m’a notamment mis sur la piste de Captain Beefheart, devenu depuis mon artiste favori.  »

Jamie:  » Je lui passais des tas de vieux trucs. Pas des albums. Même pas des chansons. Des extraits de 30 secondes tellement j’étais excité à l’idée de lui en faire découvrir d’autres. »

VV:  » Je n’avais aucune érudition. Ado, je me focalisais sur des groupes punks locaux. Des skateboards kids qui faisaient du rock à crêtes.  »

Littérature

VV:  » Récemment, j’ai lu White Mischief du journaliste anglais James Fox. L’histoire vraie de meurtres mystérieux en Afrique coloniale au milieu du siècle dernier. Puis Snooty Baronet , le livre préféré de Don Van Vliet (comprenez Captain Beefheart, ndlr), du Britannique Wyndham Lewis. Mes auteurs favoris sont néanmoins Tennessee Williams, Hubert Selby Junior, Jack Kerouac, Hunter S. Thompson… Des trucs très amerloques.  »

Jamie:  » Je n’ai pas de religion, mais je suis aussi sans doute plutôt branché par ce qui se fait outre-Atlantique. J’aime les gens qui documentent le rock’n’roll. Qui construisent les ponts entre les sans-abris et les Bohémiens. Enfin, ces derniers temps, je m’intéresse davantage à mes compatriotes: Orwell, T. H. White. Des voix anglaises. J’aime les bouquins qui ont un langage.  »

VV:  » Comme Trainspotting ? »

Jamie:  » Par exemple oui. C’est un roman incroyable, même si le film lui donne un côté franchement risible. Je pense aussi à un Last Exit to Brooklyn … C’est si fanatique dans l’écriture. Wouw… J’en frissonne.  »

Peinture

Jamie:  » Je ne suis ni anglais ni américain. Mes artistes préférés sont Picabia, les Dadaïstes, Hans Bellmer. Enfin, je suis quand même très branché pop art.  »

VV:  » Il y avait beaucoup d’artistes intéressants dans la Factory de Warhol. Je les ai découverts très jeune mais je pensais pouvoir faire comme eux alors que je me sentais en rupture avec la peinture classique. Je suis une fille impatiente. Tout ce qui m’arrive arrive vite. J’aime les trucs spontanés. »

Jamie:  » Pour moi, la scène est plus belle que son art. Warhol, c’est un peu comme Hendrix. Il est tellement intégré dans la culture mainstream qu’il est difficile de savoir ce qu’il représente encore vraiment. Quand tu vois toutes ces photos qui incarnent l’amour, l’aventure, l’excitation… Puis ces personnages et lieux incroyables: Max’s Kansas City, Factory, Edie Sedgwick… J’aime cette famille dans toutes ses sous-cultures. Basquiat, Keith Haring… Est-ce que pareille scène peut encore s’agiter aujourd’hui? En 2002, je n’aurais jamais cru que le monde serait pris en otage par les ordinateurs. Mais on a créé cet univers à part entière qu’est Internet. Personne ne sait s’il a une conscience. Mais il réagit, grandit. Il a une vie. Il est incontrôlable. Alors, oui, tout peut arriver.  »

Cinéma

Jamie:  » Je n’ai pas vraiment de réalisateur préféré. En tout cas, la plupart des films anglais sont devenus des putains de désastres. J’apprécie un Mike Leigh, un Ken Loach, mais je suis très familier des univers qu’ils explorent. Ce qui les rend nettement moins intéressants à mes yeux. Récemment, je me suis enfilé un coffret Fassbinder. Du grand art.  »

VV:  » J’adore John Cassavetes. Son côté sauvage, je veux dire libre. Il m’a inspiré des clips quand j’étais encore à l’unif. « 

Photographie

Jamie:  » Un de mes photographes préférés est un paparazzo. C’est Ron Galella. Il est renversant. Je peux aussi citer Richard Prince, Robert Frank. Surtout pour les sujets auxquels ils s’intéressent. Comme les top modèles… (rires). Nous, nous prenons énormément de photos. On s’est déjà demandé ce qu’on allait en faire. Et bien, rien. C’est le résultat, c’est tout. Il me suffit. Il satisfait mon art. Je pense que beaucoup trop de gens ont perdu tout intérêt de s’adonner à l’art par simple plaisir.  »

BLOOD PRESSURES, CHEZ DOMINO.

RENCONTRE JULIEN BROQUET, À BERLIN

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