Quelques siècles nous séparent d’une vie peuplée de Terminators intelligents et crapahutant dans les rues. Mais leurs ancêtres primitifs vivotent déjà au fond de nos poches. Explications.

Inconsciemment, l’informatique a grandi sous perfusion de bio-mimétisme. Disque dur, mémoire vive, alimentation… Les éléments mécaniques d’un ordinateur empruntent ainsi (grossièrement) le schéma anatomique humain. Après avoir miniaturisé les fonctions d’un PC, les smartphones passent à la vitesse supérieure, copiant avec un talent grandissant certains des 5 sens humains. La définition première d’Android, le système d’exploitation mobile de Google, se réfère d’ailleurs à un robot dont l’aspect évoque celui d’un être humain.

A Londres, des publicités vantant les mérites de Voice Search pour Google Maps tapissent les murs du Tube. Le business passe par la voix. Et dire « pizza » à son smartphone dans Google Maps déniche ainsi les pizzaiolos les plus proches sur la carte. Si les téléphones intelligents ne sont pas (encore?) capables d’odorat et de goût, leur ouïe s’affine depuis les premières tentatives grand public sur le Nokia 3210, il y a 10 ans. Ces oreilles artificielles capables de reconnaître de la musique ( voir sélection) et de surveiller les pulsations cardiaques des patients (iStethoscope Pro) font constamment l’objet de l’attention des plus grands constructeurs de téléphone mobile.

Apple a ainsi introduit la reconnaissance vocale de série sur ses téléphones depuis l’iPhone 3GS tandis que cette fonctionnalité était mise en avant (pour de la prise de note) par Samsung lors de l’avant-première du Galaxy S II à Barcelone. Dans les faits, parler à son GSM en public reste embarrassant tandis que la dictée de mots se montre aléatoire lorsqu’on tente une traduction ou une mise à jour de ses statuts Facebook et Twitter en parlant à Speech Trans sur iPhone.

Visions surnaturelles

Non content d’écouter, le téléphone regarde également son environnement immédiat avec une acuité grandissante. Parmi les 500 000 apps pullulant sur iPhone et smartphones Android, de nombreux micro-programmes liés à la reconnaissance d’images bluffent. Ainsi de ABBY Business Card Reader et Google Goggles ( voir sélection). En shootant le code-barres d’un CD ou d’un livre, les adeptes d’achat online comparent également les prix en magasin et en ligne avec Pic2shop, Shopsavvy et Barcode Scanner. L’£il intelligent des smartphones ne se limite toutefois pas à comprendre les objets qui l’entourent.

Si elles demeurent claudicantes, les premières applications capables de reconnaître les traits d’un être humain apparaissent également. FaceR déniche ainsi sur le Net la célébrité qui ressemblera le plus à la photo d’un visage photographié avec son smartphone. Les intentions ne sont toutefois pas que ludiques puisque d’autres apps se glissent dans la vie privée à l’image de AutoTagger qui, à partir d’une simple photo d’un passant en rue, retrouve automatiquement ses coordonnées Twitter et Facebook. Un procédé heureusement pas encore au point. Mais pour combien de temps?

Car la finesse de la perception visuelle des smartphones grandira ces prochaines années. On trouve ainsi des téléphones (chez LG) et caméscopes (chez Sony, JVC et Panasonic) qui adoptent non pas une, mais 2 lentilles optiques, pour percevoir leur environnement en 3D. Dans les faits, être filmé par une paire d’yeux digitaux donne l’étrange impression d’être ausculté par Wall-E

Apprenant également le sens du toucher via des écrans tactiles toujours plus précis, les smartphones développent, en aval des 5 sens de base, des aptitudes cérébrales extra-terrestres. La technologie de lecture d’ondes cérébrales de Neurosky, que l’on avait déjà croisée sur le Mindflex de Mattel (1), se retrouve ainsi sur le Xwave de PLX. Connecté à un iPhone, ce casque équipé de capteurs posés sur des endroits stratégiques de la tête permet de contrôler celui-ci par la pensée. Si cette approche devra encore mûrir, Intel dirige en tout cas ses recherches vers des téléphones capables de lire les sentiments de son propriétaire.

En attendant ce futur angoissant, de nos jours, un smartphone connecté au Web en 3G possède potentiellement plus de connaissances que n’importe quel cerveau tandis que des gyroscopes et capteurs d’accélération lui permettent une perception de l’espace inouïe, l’informant entre autres de son inclinaison exacte face au sol. Sans oublier sa puce GPS qui le renseigne de sa position exacte sur terre.

Un zombie dans la cuisine

Combinées à un appareil photo numérique intelligent, ces 3 aptitudes (devenues monnaies courantes sur téléphone haut de gamme) ont récemment offert un « super pouvoir »aux smartphones, celui de la réalité augmentée. Déjà remarquée il y a quelques années sur PlayStation 2 et PC où elle fait « jaillir » des objets en 3D sur des pages de magazine papier par l’intermédiaire d’une webcam et d’un écran PC, cette technologie explose sur téléphones portables.

Tourisme, sports, immobilier, sciences… Le nombre d’applications disponibles ( voir sélection) impressionne. Celles sortant du lot tournent autour du jeu vidéo. AR Zombie transforme ainsi sa cuisine ou son jardin en zone infestée de zombies. Filmé par l’APN de son smartphone, un flux vidéo de l’environnement immédiat du joueur accueille ainsi en incrustation des morts-vivants à éliminer au fusil à pompe via l’écran tactile.

L’expérience ludique la plus marquante de ces derniers mois reste toutefois à mettre sur le compte de l’AR Drone de Parrot. Se pilotant via un iPhone ou un téléphone Android, cet hélicoptère embarque 2 caméras retransmettant autant de flux vidéo vers l’écran du smartphone. La fonction ne sert toutefois pas qu’à espionner son (sa) voisin(e). Lorsqu’il se retrouve face à un second appareil, l’AR Drone peut ainsi le lancer dans un versus où les images aériennes captées par les 2 appareils incrustent des tirs laser imaginaires, avec comptage de points pour chaque adversaire.

Les apps de réalité augmentée ne servent toutefois pas qu’à jouer puisqu’elles aident également à appréhender son quotidien. Le smartphone s’utilise alors comme une fenêtre intelligente que l’on braque sur son environnement immédiat. Un rapide mouvement de panorama avec Layar ( voir sélection) permettait par exemple aux festivaliers des dernières éditions du Voodoo Experience de La Nouvelle-Orléans, des Vieilles Charrues en Bretagne et du Sziget en Hongrie, de connaître la distance exacte les séparant de chaque scène ainsi que les noms et infos des groupes qui s’y produisaient en temps réel. Toilette, bar, boutiques… Ce super GPS évoque la vision d’Arnold Schwarzenegger dans la scène du bar de Terminator 2. Espérons qu’aucune jambe ne pousse un jour sur nos smartphones…

(1) Un parcours d’obstacles où une balle lévite selon son niveau de concentration.

Texte Michi-Hiro Tamaï

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