Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

QUATRE ANS APRÈS LE DÉCISIF ON A MISSION, L’ANGLAISE SORT UN 2E ALBUM POP IMPARABLE, CONFIRMANT SON STATUT DE DIVA DU DANCING, TRANSPARENTE ET IRRÉSISTIBLE.

Katy B

« Little Red »

DISTRIBUÉ PAR SONY.

7

Quand Katy B déboula en 2010, la scène UK-funky tenait là sa première superstar globale. Une sorte d’Adele « clubby » qui aurait davantage écouté du dubstep que Dolly Parton. Kathleen Brien, de son vrai nom, avait en outre l’avantage de pouvoir compter sur une certaine crédibilité. De tout temps, de par leur liberté, leurs expérimentations, les radios pirates anglaises ont contribué à chambouler le paysage des charts mondiaux. C’est dans l’une d’elles -l’emblématique Rinse FM- que Katy B s’est fait un nom et une réputation. Produit par Benga, l’un des pionniers du mouvement dubstep, son single On a Mission fera ainsi directement un carton. Alors âgée d’à peine 21 ans, Katy B chantait l’euphorie d’après 2 h du mat’, l’hédonisme « lager » -non pas depuis la VIP room, mais bien en direct du dancefloor, sous la « mirror ball » exactement. C’était en quelque sorte une nouvelle posture de diva dance: loin des déhanchements lascifs et souvent fort peu habillés du r’n’b, Katy B apparaissait dans ses clips en simple jeans-sweat-shirt, au pire débardeur-pantalon en coton baggy. Une vraie girl next door.

Cela ne pouvait évidemment pas durer. C’est du moins ce que l’on se dit en voyant le clip de 5 AM: si Katy B évite d’y jouer la femme fatale, elle se promène désormais dans des tenues chics, invitée à des soirées masquées données dans des châteaux du Kent… Scénario classique: comment raconter la sortie dans la boîte du coin et la vie quotidienne quand le succès vous en a mis à distance? Le single Crying For No Reason confirmerait volontiers que Katy B a définitivement largué les amarres: voilà une ballade over-the-top insoutenable si justement elle n’assumait pas à ce point son pathos et sa dramaturgie. Katy B en pleine Célinedionisation? Ce serait oublier ce génie populaire, tout briton, qui consiste à mêler musique d’auto-tamponneuse et culture underground, trivialité et twists décalés, les chiffres et les lettres. A côté du sirop amené par Guy Chambers (Robbie Williams, Kylie Minogue…), le fidèle Geeneus, patron de Rinse FM, reste ainsi l’auteur de la plupart des productions présentes sur Little Red. C’est avec lui que Katy B avait gravé l’un de ses premiers titres, une reprise du Good Life de Kevin Saunderson (Inner City): on ne s’étonnera donc pas de retrouver un peu du tube crossover techno millésimé 1988 dans le Next Thing qui ouvre le nouvel album. De son côté, Aaliyah, déjà paru sur le EP de 2012, s’aligne sur le renouveau house (le morceau n’aurait pas dépareillé sur l’album de Disclosure), sucrerie dance parfaite, à laquelle Jessie Ware ajoute encore une classe supplémentaire. Même principe avec I Like You, qui sans réinventer la boule à facettes sait parfaitement comment la faire tourner. Sur Play, Katy B laisse encore la main au jeune prodige Sampha qui a tout compris: pourquoi faudrait-il choisir entre production maligne et lignes vocales charnues? Une formule que Little Red déroule sans prétention, mais pas sans relief.

LAURENT HOEBRECHTS

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