Pêche réservée – Tête brûlée de l’électropunk, Peaches redistribue les cartes de son jeu, en jouant l’ouverture.

« I Feel Cream »

Distribué par XL Recordings. En concert le 5/05, à l’ Ancienne Belgique, Bruxelles.

Peaches, alias Merrill Nisker, a toujours fait preuve de tempérament. Apparue en 2000, la Canadienne s’est directement faite remarquée avec son électropunk explosif, ses slogans subversifs et son sens tout particulier du look. « Ou bien vous faites comme les Ramones: vous portez des vestes de cuir noires, avec un pantalon noir et des lunettes noires. Ou bien vous vous amusez… Il y a toujours des fringues drôles à porter. Et pourtant, je ne suis pas quelqu’un qui aime faire du shopping. Quand j’ai débuté, je portais juste un petit short rose, qui était en fait un maillot cheap récupéré dans un magasin de seconde main. Par la suite, les gens ont commencé à me donner des choses. Du coup, j’ai fait une installation avec tout ce que l’on m’a envoyé sur scène. Etendus sur le sol, le tas de tissu occupait une surface de 2 m sur 1, sur presque 1 m de haut. Je lui ai donné l’apparence d’une cave dans laquelle les gens pouvaient rentrer. Le but était d’être inspirée par des gens que moi-même j’arrive à inspirer. »

Coups de gueule et maturité

Sorte de croisement entre Nina Hagen et Iggy Pop, Peaches a sorti jusqu’ici trois albums. Symptomatique: si tous ont réussi à se faire remarquer, parvenant à chaque fois à placer des titres dans tel film ou telle série télé branchée, aucun n’a réellement explosé commercialement. Cela pourrait changer. Avec I Feel Cream, Peaches s’ouvre en effet de nouvelles voies. Caractère fort, elle s’est notamment laissée aller pour la première fois à de vraies collaborations. A l’affiche, hormis Gonzales, des formations venues essentiellement de l’électronique: Digitalism, Soulwax, Simian Mobile Disco. « L’an dernier, j’ai moi-même beaucoup joué comme DJ. Notamment parce qu’on trouve aujourd’hui en club des sons très percutants, très durs dans lesquels je me retrouve facilement – je n’ai jamais été dans le trip minimal house ou techno. Donc j’ai décidé pour ce disque de laisser la guitare sur le côté et de collaborer avec des producteurs. Des gens qui pensent comme moi, qui font partie de mon monde, de façon à ce que je puisse davantage me concentrer sur les mélodies et le songwriting. »

Il reste bien quelques coups de gueule ( Serpentine, Show Stopper, Billionaire). Mais plus seulement. A 42 ans, Peaches parle de maturité, de l’âge qui avance, même si c’est pour mieux l’envoyer bouler ( Fuck maturity!). Plusieurs fois, elle se met à délaisser la harangue et à réellement chanter. Comme sur le discoïde I Feel Cream, par exemple, où elle se prend presque pour Donna Summer. « J’ai toujours été capable de chanter comme cela. Mais je l’ai longtemps évacué parce que je ne voulais pas que les gens se concentrent là-dessus. J’avais une idée précise en tête, je voulais montrer la musique dans sa forme la plus directe. Je voulais aussi dire un certain nombre de choses. Et j’étais certaine qu’à partir du moment où je me mettrais à chanter, les gens n’auraient retenu que ça. Cela aurait distrait l’attention. » Aujourd’hui, la démarche est possible, parce que la cible de Peaches est… son personnage même. C’est malin et plutôt réussi. Mais seulement à moitié accompli. C’est peut-être le seul regret du disque, qui effectue un pas en avant, sans faire l’autre. Venant de Peaches, on n’est pas habitué.

L.H.

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