No Direction

Moynot, quand il ne travaille pas pour la franchise des Nestor Burma entamée par Tardi, n’a pas envie de rigoler, et continue de creuser, l’air de rien depuis 40 ans, son sillon dans le genre du polar. Des polars (très) sombres, crus et sans fioritures, comme on l’avait déjà vu faire avec L’homme qui assassinait sa vie, adapté de Jean Vautrin. Cette fois seul aux commandes, Moynot se lâche: No Direction est le récit choral d’un duo de serial killers, Jeb et Bess, qui va traverser une bonne partie de l’Amérique, celle des déclassés surtout, offrant en dix chapitres proches de l’esprit comics autant de portraits désabusés et bientôt sanguinolents. Outre sa paire de jeunes anti-héros en quête de liberté plus que de rédemption, il y a ici un motard raté, une brute épaisse, un pasteur pédophile, des bons tueurs, des mauvais flics et quelques femmes battues. Un pur polar en forme de road trip, rempli de déglingués, tellement codé et si graphiquement maîtrisé qu’il impose bien des références: Bonnie & Clyde, Natural Born Killers, Tardi bien sûr, Vautrin encore, jusqu’au romancier Donald Ray Pollock, dont Le Diable, tout le temps fut un déclic pour Moynot et ce No Direction. Qui, en réalité, n’appartient qu’à lui.

No Direction

d’Emmanuel Moynot, éditions Sarbacane, 160 pages.

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