Trois films ont fait de l’aventurier cher à Steven Spielberg et George Lucas un véritable mythe de cinéma. Retour sur ces antécédents.

Un soupçon de Tintin, un zeste de Bond, un parfum de film d’aventures exotiques et de serials d’antan, mais un esprit et un laconisme bien ancrés dans leur époque: il n’en aura guère fallu plus – le talent de ses créateurs et interprète, tout de même – pour qu’Indiana Jones s’invite, au tournant des années 80, dans le cercle très fermé des mythes du Septième art.

Le premier plan des Aventuriers de l’arche perdue, film qui ouvre la série en 1981, pose déjà le personnage, émergeant de dos, en contre-jour, des pentes escarpées de chemins de montagne, le chapeau vissé sur le crâne. Sous le galurin, Harrison Ford, lancé à la conquête de la gloire cinématographique – le Han Solo de Star Wars, c’est lui également, à quoi il faudra bientôt ajouter le Rick Deckard de Blade Runner -, en même temps que sur les traces de l’Arche d’Alliance qu’il entend soustraire à la convoitise des nazis (mais aussi de vulgaires aventuriers, avec qui il ne faudrait pas confondre cet éminent professeur d’archéologie).

Impossible de ne pas relever l’influence de Tintin – revendiquée, d’ailleurs, par Steven Spielberg, réalisateur de tous les épisodes, George Lucas cumulant les crédits d’auteur et de producteur – sur les trépidantes aventures qui s’ensuivent. Le fouet à la main, quand il ne s’agit pas d’un pistolet afin de prendre de vitesse quelque manieur de sabre, Indiana Jones sillonne la planète, au crépuscule des années 30, comme le fit avant lui le journaliste. Si Les Aventuriers de l’arche perdue évoque fréquemment Tintin et le Temple du soleil, et que l’on croise l’une ou l’autre momie n’étant pas sans rappeler Rascar Capac, le volet égyptien du film est, pour sa part, réminiscent d’un autre fleuron de la bande dessinée belge, à savoir Le mystère de la grande pyramide, d’Edgar Pierre Jacobs.

MR BOND, I PRESUME

L’aventurier a pris de la bouteille lorsqu’on le retrouve, trois ans plus tard, dans Le temple maudit. Le prologue est, à cet égard éloquent qui, dans un bar de Shanghaï, fait d’Indy Jones le cousin manifeste de James Bond plus encore que le parent du héros de Hergé. L’aventure perd un peu de son innocence, voire de son romantisme, alors que s’étoffe le volet action la sous-tendant. Elle mène Jones, un gamin et une chanteuse de cabaret, de l’Himalaya en Inde, où ils devront affronter les redoutables Thugs, peuplade barbare en passe de s’assurer un pouvoir illimité à l’aide de pierres précieuses. Jones saura y mettre bon ordre au prix de moult péripéties décoiffantes (la poursuite en chariots de mine est un monument), tout en lâchant quelques répliques machistes – témoignage de la virilisation du personnage? – à l’égard de sa partenaire Kate Capshaw, future Mme Spielberg.

La filiation avec Bond est réaffirmée dès le générique de La dernière croisade en 1989, qui annonce rien moins que la rencontre de Sean Connery et Harrison Ford. Clin d’£il plutôt « fun », le premier n’est autre à l’écran que le père du second, dont les origines de la vocation d’archéologue/aventurier désintéressé sont dévoilées. Le prologue du film, où l’on découvre Indiana Jones adolescent sous les traits de River Phoenix, joue d’ailleurs sans modération (mais avec un incontestable humour) de l’autoréférence: on y apprend, pêle-mêle, d’où Indy tient son chapeau, ou comment il apprit à manier le fouet dans des circonstances particulièrement délicates, tandis qu’une scène – celle où il siffle un cheval, avant que ses poursuivants ne sifflent… une voiture – apparaît comme le double de l’épisode du revolver face au sabre du premier épisode…

De Venise en Jordanie, il s’agit cette fois d’aller à la conquête du Graal, convoité, une fois encore par les nazis. Le second degré en sus – Sean Connery donne à Harrison Ford du Junior, Indiana Jones croise un Hitler bouffon… -, La dernière croisade renoue joliment avec l’esprit du premier épisode. Et clôt avec un indéniable allant une première série d’aventures ayant réussi la gageure de rassembler des publics de générations différentes. Vingt ans après, la formule fera-t-elle encore recette? Avec Steven Spielberg à nouveau aux commandes – condition sine qua non pour que Harrison Ford accepte de reprendre du fouet -, voilà qui n’a, a priori, rien d’impossible…

TEXTE JEAN-FRANçOIS PLUIJGERS

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