Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Diamants éternels – Micachu ne crée pas que des chansons pop tarabiscotées. Elle donne vie à ses propres instruments. Jewellery est un bijou bizarre.

« Jewellery »

Distribué par Rough Trade.

Malgré ses airs de garçon manqué, on a envie de la présenter comme la cousine british de Panda Bear, Avey Tare et Geologist. On l’imagine bien d’ailleurs avoir passé toutes ses vacances scolaires depuis une dizaine d’années dans la moiteur de Brooklyn ne perdant pas une miette de ce que bricolaient dans leur coin les membres d’Animal Collective avant qu’ils virent électro.

Rien de tout ça pourtant. Née Mica Levi, dans le Surrey, au sud de l’Angleterre, en 1987, Micachu (« un nom in- spiré par mes amis rappeurs toujours prêts à glisser des chu chu un peu partout ») est avant tout une fille de musiciens. Papa est collectionneur de disques – « J’ai toujours été entourée par beaucoup de musique, de CD’s et de vinyles » -, maman est musicienne – « Mais le premier concert auquel j’ai assisté, ça devait être un groupe de punk local. »

Mica, précoce, touche ses premiers instruments dès l’âge de cinq ans. Elle apprend d’abord le piano. Avec sa mère justement. Puis étudie le violon, le violoncelle et la composition à la Purcell School avant de rejoindre la Guildhall School of Music and Drama. Au passage, la petite Anglaise, à l’accent, disons, prononcé, s’émancipe de cette formation classique. Elle laisse parler ses talents de multi-instrumentiste, monologue dans sa chambre pour donner vie à une musique audacieuse, inventive… Et s’associe à d’autres musiciens frondeurs: les Shapes.

Do it yourself

Fortement inspirée par le compositeur expérimental Harry Partch, la Londonienne d’adoption utilise des instruments peu orthodoxes. Certains customisés. D’autres créés de ses propres petites mains. « J’ai écrit la plupart des chansons de Jewellery toute seule. Près de mon lit. Assez rapidement, j’ai décidé d’enregistrer certains objets qui traînaient autour de moi. Dans ma chambre. Dans mon environnement… Des tasses par exemple. J’ai réalisé pas mal de recherches autour de Partch qui a inventé un nouveau système de tonalité. Il s’est mis à construire des instruments qui le matérialisaient. Moi, c’est juste pour le plaisir. Sans démarche scientifique inventive et harmonique. J’aime le Do it yourself. Tracer mon propre chemin. Trouver ma voie par essais et erreurs. »

Quitte à jouer de l’aspirateur autant que de l’ordinateur… Micachu, dont Björk est fan, n’est autre que la dernière protégée de Matthew Herbert. Personnage habitué aux instruments du quotidien. « Il m’a laissée travailler. On a juste cassé de nombreuses boîtes de CD. »

Ça se voit, ça s’entend, ça se sent. Elle a beau être sympa, la petite prodige qui, à 21 ans, a déjà écrit pour le London Philharmonic Orchestra (un projet pour jeunes compositeurs), n’est pas du genre à se laisser marcher sur les pieds et mener par le bout du nez. Son pied, à elle, est de nez. Elle l’adresse à l’industrie et l’a intitulé Jewellery. Un petit bijou de pop arty, bizarre et bancal. Nettement plus facile à écouter qu’à oublier.

www.myspace.com/micayomusic

En concert le 11/04 à Cologne et le 14/04 à Bruxelles (Ancienne Belgique).

Julien Broquet

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