Mélanine

Après Narcopolis (L’Olivier), dans les arcanes opiacés du Bombay des années 70, Jeet Thayil brise à nouveau la linéarité et choisit l’exubérance. Ce sont ceux qui ont connu Francis Xavier Newton qui le racontent tantôt en louanges, tantôt en persiflements à Dismas Bambai, un journaliste devenu son biographe. Depuis son enfance à Goa, où sa mère, sur un fil fragile, le familiarise avec les statues de saints à la peau foncée, jusqu’à New York, où, réfugié avec sa muse, il se voit rattrapé par le racisme post-11 septembre, Newton, poète bohème puis peintre, apparaît autant dispensateur d’éveils spirituels qu’humainement contestable. Dans ce mille-feuille qui demande de l’endurance, Jeet Thayil passe au mixer postmoderne faits et fiction, prenant appui de façon éclatée sur les vrais Francis Newton Souza (entre expressionnisme et art brut) et Dom Moraes (poète indien qui écrivait en anglais). C’est lorsqu’il aborde la lorgnette avec laquelle nous envisageons le champ de l’art ou lorsqu’il plonge au coeur d’un ressentiment post-colonial légitime qu’il se montre le plus convaincant. Il nous faudra (re)découvrir ces singuliers auteurs de Bombay, à présent que la voie de la bibliodiversité est entrouverte.

De Jeet Thayil, éditions Buchet-Chastel, traduit de l’anglais (Inde) par Bernard Turle, 560 pages.

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