« C’est pas l’homme qui prend la mer, c’est la mer qui prend l’homme« . Une évidence qui s’est souvent vérifiée dans un monde du cinéma confronté à un cruel dilemme. La mer possède un potentiel cinématographique immense mais l’élément marin confronte les cinéastes à des problèmes inévitables s’ils s’aventurent à tourner en milieu naturel. Roman Polanski nous le disait à la sortie de son très divertissant Pirates au milieu des années 80:  » Dès que vous filmez sur l’eau, les ennuis commencent! Même si la météo est bonne, il y a cette constante absolue: sur l’eau, tout bouge, même un bateau mis à l’ancre. C’est un cauchemar pour la continuité, les raccords, parce qu’entre deux prises, le soleil, les nuages ou les côtes ne sont plus à la même place. Vous ne pouvez pas imaginer le temps et donc l’argent qui se perd dans ces conditions…  » Bien sûr on peut toujours tricher, en filmant les plans larges avec des navires maquettes évoluant en bassin. Et aussi travailler dans d’immenses piscines où des sections d’un bateau, voire un vaisseau entier, peuvent être installés et arrimés grâce à la machinerie du studio. Aujourd’hui, on peut aussi et surtout recourir aux techniques digitales, qui permettent, après filmage, de « corriger » les images de manière à ne pas tolérer de faux raccords. La triomphale série des Pirates Of The Carribean fait abondamment appel à la « gomme électronique » et autres instruments de « repentir » garantissant une image parfaitement et paradoxalement réaliste.

Addition… salée

Mais avant cette révolution digitale, à laquelle James Cameron fit spectaculairement appel pour son Titanic après avoir galéré au tournage de The Abyss une dizaine d’années plus tôt, il fallut bien braver les éléments! L’eau… calme étant déjà source potentielle de tracas, comme la production de The 7th Voyage Of Sinbad s’en aperçut quand le quai et le dock on ne peut plus contemporains situés non loin du navire antique ne cessèrent d’apparaître dans un coin de l’image, forçant les techniciens à une constante gymnastique pour les éviter! Le plus souvent, ce sont les réalisateurs de « second unit » qui se coltinèrent les obstacles naturels. Notamment dans les tournages de films de pirates des années 30 à 50, où les stars restaient sagement en studio tandis que des « petites mains » s’aventuraient en mer pour ramener des images appelées souvent à devenir les plus spectaculaires du film achevé!

Quand la nature se déchaîne en mer, elle n’y va pas avec le dos de la cuiller. C’est ainsi que Inchon, film de guerre avec Laurence Olivier, vit son tournage gravement perturbé par un typhon. Catastrophe à laquelle s’ajouta la bourde d’un assistant réalisateur envoyant des péniches de débarquement dans le mauvais sens, avec pour conséquence plus de 2 millions de dollars de dégâts…  » La mer, c’est cher!« , concluait Polanski à propos de son expérience sur Pirates. Surtout quand on fait des bêtises. Ou quand un accident de plongée (comme sur Waterworld), l’attaque d’un requin prenant pour cible un cameraman (comme sur un tournage de James Bond) touchent indirectement les compagnies d’assurance…

Tout cela fait que dans le monde du cinéma, on aborde l’élément marin avec circonspection. Mais malgré toutes les précautions, il reste toujours l’imprévisible. Et son ironie. Prenez l’exemple d’ Astérix et Obélix: Mission Cléopâtre. Pour se prémunir contre les problèmes liés à la météo marine, on avait aménagé un grand bassin donnant directement sur la mer. Aucun grain ne vint en effet de la Méditerranée perturber Alain Chabat et son équipe. Mais deux terribles tempêtes de… sable allaient s’en charger!

L.D.

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