Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

L’AN DERNIER, LA HOUSE MUSIC PERDAIT SON « GODFATHER ». AVANT DE DISPARAÎTRE, FRANKIE KNUCKLES EUT LE TEMPS DE COMPILER SES PLUS HAUTS FAITS D’ARMES.

Frankie Knuckles

« House Masters »

DISTRIBUÉ PAR DEFECTED/NEWS.

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C’était il y a un peu plus d’un an. Le 31 mars 2014, Frankie Knuckles décédait, âgé d’à peine 59 ans, des complications liées à son diabète. Quelques années auparavant, la maladie avait déjà amené les docteurs à amputer son pied droit: un comble pour celui qui a fait danser des générations entières… De nombreuses réactions ont suivi la disparition de Knuckles. L’une d’entre elles a particulièrement marqué les esprits. Portant l’en-tête de la Maison Blanche, la missive était signée Barack et Michelle Obama. Le Président et la First Lady y saluaient notamment la manière dont la musique de Knuckles avait contribué à « ouvrir les esprits et rassembler les gens ». Dix ans auparavant, alors qu’il n’était encore que sénateur de l’Illinois, Barack Obama avait déjà largement « milité » pour que la ville de Chicago rebaptise un coin de rue et instaure même un Frankie Knuckles day (le 25 août)… Le geste permit de consacrer une bonne fois pour toutes un véritable héros musical. Surnommé le « godfather of house music », Knuckles n’a en effet jamais usurpé son titre, comme le prouve la récente anthologie goupillée par le label Defected.

La revanche du disco

Si son parcours est intimement lié à la ville de Chicago, c’est bien dans le Bronx que Frankie Knuckles est né, en 1955. C’est aussi là, à New York, qu’il fit ses premières armes en tant que DJ, aux côtés de son pote d’enfance Larry Levan. Au début des années 70, il file déjà des coups de main au Gallery, le nouveau club de Nicky Siano: avec Levan, ils s’occupent de la déco et de préparer le punch « maison », dans lequel ils émiettaient des tablettes d’XTC… Après le Continental Baths, en 1976, Knuckles a l’occasion de prendre en main le Warehouse, club essentiellement gay et black de Chicago. Problème: c’est aussi le moment où le disco connaît un fameux retour de flamme. En quelques semaines, le genre passe du sommet des charts au pilori. Affolées, les maisons de disque ferment les robinets. Knuckles cherche donc des solutions pour alimenter malgré tout ses sets. Il commence alors à « remixer » des anciens titres. Plus tard, le DJ met la main sur une Roland 909, boîte à rythme déclassée que lui revend Derrick May. Il s’en servira pour moderniser le son du disco et de la soul orchestrale de Philadelphie: la house est née.

Repassant en 1984 sur le Your Love de Jamie Principle, il sort un premier tube, pièce essentielle d’un mouvement qui bouleversera la dance, et plus généralement la musique populaire de la seconde moitié du XXe siècle. Il enchaînera par la suite avec une série de remixes, dont les plus significatifs se retrouvent compilés ici, d’Inner City à Chaka Khan en passant par les Pet Shop Boys ou Hercules & Love Affair. Double, n’oubliant aucun classique (Your Love, Tears, etc), l’anthologie avait été en fait agencée par Knuckles lui-même, quelques semaines avant sa disparition. Elle sort enfin aujourd’hui, tous les profits étant reversés à sa fondation qui, avec celle d’Elton John, contribue à la lutte contre le sida. Le plus d’une compilation en tous points essentielle.

LAURENT HOEBRECHTS

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