Madonna n’est pas qu’une chanteuse. C’est une figure de style en soi: celle qui consiste à changer tout en restant soi-même. Et puisque ses métamorphoses inspirent jusqu’aux stratèges de l’Otan, retour sur le parcours d’une artiste qui a toujours su s’entourer à la veille de la sortie de Hard Candy, sa nouvelle friandise.

LIKE A VIRGIN ////////////////////////////////// 1984

La chanteuse Madonna est née avec le disco. C’est en tous cas l’image qui domine son premier disque éponyme sorti l’année précédente. Pour son deuxième album, elle s’offre donc les services de Nile Rodgers himself. Avec Chic, à la fin des années 70, celui-ci avait déjà livré une série de classiques disco-funk: Le Freak, Good Times… Quand Madonna l’embauche, Rodgers s’est retranché dans le rôle de producteur qui transforme tout ce qu’il touche en or. L’année précédente, il a réalisé Let’s Dance, qui reste à ce jour le plus gros succès de David Bowie. Avec Like A Virgin, il assoit le statut de superstar de Madonna. Quelque 19 millions d’exemplaires seront écoulés: seul True Blue, deux ans plus tard, fera mieux.

true blue ////////////////////////////////////// 1986

Dans les années 80, la musique pop a son roi: Michael Jackson. Dès 1986, elle a sa reine. Avec True Blue, Madonna enfile les hits. Il faut dire que le terrain a été bien préparé. Rien n’est laissé au hasard, et certainement pas l’image. La photo de la pochette, par exemple, est l’£uvre d’ Herb Ritts. Le photographe américain s’est spécialisé dans le noir et blanc glamour, typique des eighties. Il collabore avec des magazines aussi prestigieux que le Harper’s Bazaar, Rolling Stone, Vanity Fair ou Vogue, pour lesquels il réalise surtout des portraits. Il vient d’exposer pour la première fois dans une galerie quand Madonna l’appelle pour ce qui deviendra une des pochettes les plus emblématiques de sa discographie.

justify my love ///////////////////////////// 1990

En plein trip cul, Madonna sort un single sulfureux, prélude à l’album Erotica. Son  » Je t’aime moi non plus » est mis en images par Jean-Baptiste Mondino (qui a déjà réalisé le clip d’ Open Your Heart, quatre ans plus tôt). Mais c’est surtout le nom du coauteur (avec Ingrid Chavez, protégée de Prince) qui surprend: Lenny Kravitz. Certes, l’homme est réputé chaud lapin et a plutôt la cote après un premier album remarqué ( Let Love Rule). Mais son univers rock sixties-seventies à guitares est à des années lumière de celui de la diva pop. Peu importe: le beau Lenny range ses six cordes, et pique un sample au groupe de rap Public Enemy (le titre Security of the First World). Bien chauffé, il miaule aussi par-dessus les nappes de synthés. Hot.

bedtime stories ///////////////////////////// 1994

Après avoir tenu le haut du pavé pendant 10 ans, Madonna accuse un peu le coup. Erotica a fait un « four » (on s’entend: son plus mauvais « score » jusque-là, mais avec quand même 7 millions de copies vendues). Les années 80, légères et superficielles, sont derrière. L’ambiance a changé. Plus que jamais, Madonna va devoir user de tout son flair. Un exemple? Les grosses machines sont bousculées par les petits indépendants. Madonna convoque alors l’Anglais Nellee Hopper, membre de la mouvance Massive Attack, et producteur des débuts de Björk (qui coécrit le titre principal). D’un autre côté, Madonna observe également le New Jack américain se transformer en R’n’B. Que fait-elle? Elle embauche Dallas Austin (Joi, TLC,…) et Babyface, spécialistes du genre.

ray of light ////////// 1998

Malgré les efforts fournis sur Bedtime Stories, Madonna peine à retrouver un second souffle. Elle collabore à nouveau avec Patrick Leonard, responsable des principaux hits des années 80. Elle essaie également de prolonger le partenariat avec Babyface. Mais le déclic ne vient pas. Il faudra attendre William Orbit. L’Anglais s’est fait une réputation dans le milieu de la musique électronique par ses travaux solo (notamment sous le pseudonyme Strange Cargo), mais aussi grâce à ses nombreux remixes. Pour Prince par exemple ou… Madonna, pour qui il a relifté Justify My Love ou I’ll Remember. Cette fois, il prend les commandes depuis le début et impose un son plus électro. Un pari qui s’avère gagnant, remettant à nouveau Madonna en piste.

music /////////////////////////////////////// 2000

Après la mue réussie de Ray Of Light, Madonna reste braquée sur l’Europe électronique. Depuis quelques années, la French Touch y fait la loi. Après l’Anglais William Orbit, elle s’entiche donc de Mirwais Ahmadzaï, Parisien né en Suisse de père afghan et de mère italienne. Un inconnu au niveau international. Par contre, les (punk-) rockeurs francophones le connaissent bien: au début des années 80, il accompagnait Daniel Darc au sein du groupe culte Taxi Girl. En 2000, Mirwais s’est reconverti dans l’électro, croisant disco et new wave, comme sur son disque Production (qui contient les tubes Naïve Song et Disco Science). C’est ce même son typique, fan des filtres et du vocode, que l’on retrouve quasi tel quel sur Music.

confessions on a dance floor /// 2005

L’interlude politique (avec l’album American Life, en 2003) n’a pas complètement convaincu. Retour sur la piste de danse pour Madonna. Mirwais est encore là, mais c’est surtout Stuart Price qui dirige la man£uvre. Que ce soit avec Les Rythmes Digitales, Zoot Woman ou sous le pseudo de Jacques Lu Cont, l’homme a démontré sa capacité à agiter le dance floor. En outre, il partage les mêmes obsessions eighties qu’une bonne partie de la mouvance French Touch. Avec peut-être un souci plus grand d’efficacité (cf. le sample d’Abba)? A noter: c’est aussi à ce moment-là qu’une nouvelle Lolita pop s’impose: Britney Spears. Sur deux titres, Madonna invite donc le duo suédois Bloodshy and Avant, producteur du hit Toxic.

hard candy ///////////////////////////// 2008

Comment ne pas y avoir pensé plus tôt? Un peu larguée par la vague R’n’B, Madonna rattrape son retard en travaillant avec la crème du genre. Une sorte de dream team imparable, les « galactiques » du groove des années 2000. A tout seigneur, tout honneur: Timbaland, responsable de quelques-uns des plus gros hits de ces dernières années, est dans la place. Entre expérimentations sonores et cartons monstres, il a trusté les charts ces dernières années. Que ce soit avec Aaliyah, Missy Elliott, Nelly Furtado,… ou Justin Timberlake. Le George Clooney de la pop est d’ailleurs également présent, notamment sur le premier single. Pour compléter le casting, Madonna s’est encore adjugé les services de Kanye West, Pharrell Williams, et Nate « Danja » Hills. Bingo?

TEXTE LAURENT HOEBRECHTS

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content