Guy Verstraeten
Guy Verstraeten Journaliste télé

LE SCÉNARISTE DAMON LINDELOF REVIENT AVEC UNE SÉRIE AUX RELENTS FANTASTIQUES, DENSE, MAIS UN PEU TROP AUTO-COMPLAISANTE POUR CONVAINCRE TOTALEMENT.

The Leftovers – saison 1

UNE SÉRIE HBO CRÉÉE PAR DAMON LINDELOF ET TOM PERROTTA. AVEC JUSTIN THEROUX, LIV TYLER, CHRISTOPHER ECCLESTON. DIST: WARNER.

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De Damon Lindelof, on connaît surtout une série. Ou plutôt la fin d’une série. Pour celui qui fut l’un des scénaristes en chef de Lost, cette fin évoque un traumatisme, celui d’avoir déçu des millions de fans de par le monde, celui d’avoir reçu des insultes façon « tu m’as volé six ans de ma vie » quand, le 23 mai 2010, il fermait d’une façon jugée insatisfaisante l’une des épopées télé les plus importantes du XXIe siècle. Lindelof a juré qu’on ne l’y reprendrait plus, et on peut s’imaginer la pression qui pèse sur ses épaules avec The Leftovers, la série qu’il développe pour HBO depuis l’été 2014. Adaptant le roman de Tom Perrotta, Les Disparus de Mapleton, le scénariste renoue avec une histoire un brin ésotérique: un 14 octobre, 2 % de la population mondiale se volatilise d’un coup, sans raison. Une disparition de masse qui, naturellement, va impacter ceux qui restent, the leftovers… C’est par le prisme de Mapleton, petite ville de province, que la série va aborder les conséquences de ce « ravissement » aussi douloureux qu’inexplicable. Bien sûr, il y a les pères, les mères, les maris, les soeurs, et tous ceux qui ont perdu un proche trois ans plus tôt. Mais il y a également ces communautés aux relents sectaires, notamment les Guilty Remnant: habillés de blanc, murés dans le silence, ses membres errent dans les rues en fumant cigarettes sur cigarettes, comme pour rappeler de ne jamais oublier tous ces proches partis en fumée. C’est dans cette « secte » qu’a atterri la femme de Kevin (Justin Theroux, appliqué), héros de la série et shérif du village…

Très sérieux, très grave

The Leftovers s’insinue dans la vie de Mapleton en tentant de saisir comment on vit un deuil de masse, comment on communique, comment on s’organise après un événement aussi déstabilisant. L’argument de départ est engageant: 2 % de la population qui disparaît sans raison apparente, ça rend curieux. D’où le premier souci: puisque le scénario ne peut évidemment pas révéler d’emblée les causes du ravissement, on réalise vite qu’il faudra attendre la fin de la série pour avoir le fin mot de l’histoire. Lindelof a donc la lourde tâche de nous captiver suffisamment pour patienter jusque-là. Et c’est là que le bât blesse: très consciente de sa force intérieure et de ses effets, la série patine rapidement, se regarde être dramatique, BO sophistiquée (James Blake, Fuck Buttons…) à l’appui. Tout cela est très sérieux, très grave, très abscons parfois, sans qu’il ne se passe grand-chose de notable. En clair, on s’ennuie un peu à force d’être privé d’une intrigue percutante ou de personnages vraiment attachants. Reste une interprétation solide et un véritable parti pris intimiste: très clivante, The Leftovers est considérée par une partie de la critique comme la meilleure série de 2014. A vous de voir…

GUY VERSTRAETEN

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