Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Ile de beauté – Depuis Manchester, Lonelady sort un premier album, aussi rêche que vénéneux. Post-punk’s not dead…

« Nerve Up »

Distribué par Warp. En concert le 30/03, au Botanique, Bruxelles.

Il y a quelque chose de foncièrement insulaire dans Nerve Up, premier disque de Lonelady. Cela faisait même longtemps que l’on n’avait plus entendu une voix qui ne s’entête à ce point à suivre son propre chemin. Les divas pop actuelles cherchent à parler au plus grand nombre à la fois. Lonelady en est l’antidote parfait, son disque ne s’écoutant jamais mieux que dans l’isolement d’une chambre. Peut-être aussi parce que les chansons de Nerve Up sont d’abord nées dans le dénuement d’un petit enregistreur 4 pistes. « Au départ, c’est une question de ressources limitées. Au bout du compte, ces conditions ont aussi déterminé une certaine esthétique: rester au plus près de l’os, du c£ur des chansons. Ce qui pousse à être plus créatif. »

Julie Campbell, de son vrai nom, vient de Manchester. On en parle de plus en plus, à la faveur d’un buzz évident mais pas (encore) assourdissant. Peut-être parce que la jeune femme ne livre que peu d’éléments de sa biographie. Elle confie ne pas venir d’une famille spécialement musicienne. « Mais aussi loin que je m’en souvienne, je me suis toujours plongée dans des processus créatifs: des dessins, ensuite des écrits… » Plus tard, elle suit d’ailleurs un cursus académique artistique. « En sortant de là, je me suis retrouvée impliquée dans un tas de projets: des expositions, des magazines de poésie… » Finalement, en 2005, elle se met à la guitare et se concentre petit à petit sur la musique. « Les groupes qui m’ont donné envie de m’y mettre sont des gens comme Nirvana, Hole… Ou REM aussi, dans leurs premiers albums. » De fait, cela s’entend dans un morceau comme Intuition qui sonne comme un titre perdu de l’album Murmur, sorti en 1983.

Factory

Visiblement, Lonelady a d’ailleurs écouté pas mal de disques sortis à la charnière des années 70 et 80. « J’aime l’énergie que l’on pouvait trouver dans la musique de l’époque, le fait qu’elle s’évertuait à rejeter une partie de la tradition rock. Il y avait une réelle volonté de déconstruire les vieux schémas. Et puis on y trouvait aussi une naïveté, une fraîcheur, qui n’existent plus trop aujourd’hui. » Post-punk, funk blanc, no wave… Tous ces courants qui mélangeaient alors l’aridité du punk et la transe du funk, Lonelady les a parfaitement digérés. Le morceau Nerve Up en est un exemple frappant, avec sa boîte à rythmes rachitique. Early the Haste Comes en est un autre, griffé par un riff de guitare rêche. « J’ai toujours préféré un son de guitare plus scratchy, plus orienté funk. »

Au bout du compte, la démarche n’est pas tellement étonnante quand on sait que la jeune femme vient de la ville de la Factory, d’où sont parties les carrières de Joy Division, New Order, A Certain Ratio… « C’est vrai. En même temps, c’est un héritage que je n’ai commencéà creuser que très récemment. Auparavant, je n’y avais jamais vraiment fait attention. J’imagine que je prenais cela pour acquis. » Toutes ces références semblent trop belles pour être honnêtes? Peut-être, sauf qu’elles n’arrivent jamais à étouffer ce que Lonelady a à dire. On n’en sera que plus attentif à son parcours…

Laurent Hoebrechts

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